Coupures de Presse.
Les propos de la conseillère du président pour les dossiers
de la femme ont soulevé un tollé. Le harcèlement sexuel
aussi est sujet d’un débat sur la responsabilité de la
femme.
L’heure est au conservatisme
Les femmes en Egypte ont apparemment du pain sur la planche,
puisque le discours les concernant baigne de plus en plus
dans le conservatisme. L’un des phénomènes les plus en vue
est le harcèlement sexuel qui tend à prendre de l’ampleur.
Dans un article publié par le journal en ligne Al-Badil,
l’auteur Nassar Abdallah juge
qu’en ce qui concerne le harcèlement sexuel, la
responsabilité est partagée entre l’homme et la femme. Il
écrit : « J’ai suivi par hasard une émission télévisée où
l’invitée, une actrice connue, a été harcelée sexuellement.
Elle et le présentateur ont vivement critiqué les personnes
qui voient dans ce genre d’affaires que la femme est tout
aussi coupable que l’agresseur à cause de sa tenue. Tous
deux ont avancé que la manière de s’habiller n’avait rien à
voir avec le sujet, puisque des femmes voilées ou en
niqab se font aussi agresser.
Je veux dire à ce sujet que le fait de dégager complètement
et absolument la femme de toute responsabilité est une
manière de voir la question avec des œillères. Il est clair
que dans l’absolu personne ne doit harceler la femme
(l’auteur parle de la femme en la désignant comme « femelle »)
même si elle marche nue. Mais sur le plan de la réalité, les
choses diffèrent car la composante culturelle dans laquelle
la femme évolue a ses règles et s’exprime par des actes
quand la femme dépasse une certaine ligne dans son
habillement ou son comportement, et cela même si, de son
point de vue, elle se juge plus humaniste ou plus moraliste
que la composante de la société dans laquelle elle évolue. A
ce niveau-là, nous devons prendre cette composante en
considération et, dans le cas où la femme serait
provocatrice, elle porte une partie de la responsabilité,
car elle regarde la société de haut. Ce que le présentateur
et l’actrice ont dit sur le fait que même les femmes voilées
ou en niqab se font
harceler et que du coup seul le harceleur est mis en cause
est une manière de liquider le problème ». L’auteur
ajoute que les deux visions peuvent être justes, « mais
malheureusement nous n’avons pas de statistiques sur le taux
de harcèlement qui touche les voilées et les femmes en
niqab ou celui qui touche les
non-voilées ou celles qui portent des vêtements étranges.
Pour en arriver à la seule responsabilité du harceleur, il
nous faut des statistiques bien documentées. Mais en usant
de la simple logique, elle nous dit que plus l’habit sort de
l’ordinaire plus les possibilités de harcèlement augmentent ».
Il est sûr qu’avec ce genre d’articles les femmes doivent se
prendre en main et réagir d’autant plus qu’il a été publié
par un journal qui se dit progressiste.
Toujours dans la sphère féminine, l’article de Karima Kamel
dans le quotidien Al-Masry
Al-Youm revient sur les
propos de la conseillère du président pour les affaires de
la femme, Omayma Kamel, qui a
dit que les femmes non excisées manquent de foi. « L’expression
est choquante car la conseillère a relié entre la foi et
l’excision alors qu’il n’y a aucun rapport entre la religion
et cette pratique, et la preuve est que l’excision n’est pas
pratiquée dans plusieurs pays musulmans avec à leur tête
l’Arabie saoudite. Je peux imaginer le choc de nombreux
activistes dans le domaine qui ont travaillé dur pour
dissocier la pratique de la religion. Ce que je refuse
catégoriquement c’est que la conseillère parle d’une
question dont elle ne connaît pas grand-chose. Il est
supposé que le conseiller du président lui fournisse des
informations dans le domaine dont il est en charge et laisse
de côté ses propres convictions. Le vrai problème est que la
responsable du dossier des femmes doit défendre les droits
des femmes en général et ne doit pas appliquer le point de
vue d’un groupe donné, d’autant plus qu’elle ne représente
pas seulement les femmes de la confrérie des Frères
musulmans, mais aussi la totalité des femmes égyptiennes.
J’ai trouvé lors de mes tournées que beaucoup d’Egyptiennes,
même voilées, ont été outrées par ces propos. L’autre
problème est que nous sommes devant un groupe conservateur
qui utilise la religion pour imposer son conservatisme. Le
fait de nommer une conseillère en charge du dossier de la
femme venant du parti des Frères musulmans Liberté et
justice ou issue des sœurs musulmanes est une manière
d’imposer un point de vue unique à la vie sociale en Egypte
et entache l’idée selon laquelle le président est le
président de tous les Egyptiens. Ce qui est avancé comme
propos au sein de l’assemblée constituante concernant les
droits des femmes sur des questions de l’excision, du
mariage précoce ou du droit des hommes d’épouser quatre
femmes sans que la femme le sache, est une tendance visant à
imposer sa vision de la société en usant de la religion ».
Dans Al-Watan, le Dr
Khaled Montasser écrit sur le
même sujet : « La conseillère du président pour les
affaires de la femme a dit que l’excision des filles était
une intervention plastique et qu’elle conseillerait le
président de la pratiquer après la puberté pour que la fille
puisse prendre la décision car c’est une habitude enracinée.
Ces propos sont une catastrophe, d’abord parce que la
conseillère est médecin et ensuite parce qu’elle est en
charge du dossier des femmes pour une période de quatre ans
qui seront des années noires pour la femme. On peut laisser
passer des propos de la conseillère en matière de religion,
mais on ne peut pas laisser passer le fait qu’elle est
médecin. On ne peut pas lui pardonner quand elle donne de
fausses informations en matière de médecine. Elle sait très
bien que dans les dictionnaires de la médecine le mot
excision n’existe pas. Le fait qu’elle jette toutes ces
références à la poubelle est une trahison de la fonction et
du serment que nous, médecins, avons tous fait, à savoir
respecter le corps humain. Comment un médecin en charge du
dossier de la femme peut-il accepter une telle boucherie
humiliante ? Comment un médecin, comme elle, sacrifie-t-il
tout ce qu’elle a étudié comme sciences pour s’aligner sur
les ordres d’une confrérie ? ».
La confrérie va-t-elle ainsi faire main basse sur les droits
des femmes ? Dans Al-Watan,
Mohamad Choumane avance que les
choses ne seront pas aisées pour les Frères musulmans. Il
prédit que la bureaucratie égyptienne va engloutir les
Frères musulmans. « Cette hypothèse peut paraître
étrange, car beaucoup de décisions de la présidence et du
Conseil consultatif sont dans l’intérêt des Frères
musulmans. Mais ces décisions se font selon la logique et
les mécanismes de l’Etat bureaucratique et selon les outils
utilisés par Moubarak. Les grandes lignes de la politique
intérieure n’ont pas changé, idem pour la politique
étrangère, il n’y a pas eu de changement en ce qui concerne
le budget, etc. ».
Najet
Belhatem