Prix des Aliments. La hausse
internationale pourrait être inquiétante pour l’Egypte comme pour d’autres
pays. A ce jour, les effets ne se font pas encore ressentir, mais les risques
pour l’avenir sont importants.
Pas de danger immédiat
L’inflation annuelle pour le mois
d’août, publiée il y a quelques jours, est
restée pratiquement stable avec 6,3 %. L’inflation en milieu urbain a,
quant à elle, enregistré une légère hausse pour se chiffrer à 6,5 %. C’est
l’inflation mensuelle qui a augmenté le plus, enregistrant 1,2 % de
hausse. Les produits alimentaires sont derrière cette hausse, puisqu’ils ont
enregistré une hausse de 2,4 % en un mois. « Etant donné que
l’inflation annuelle était élevée au cours de la même période l’année passée,
il est normal que le chiffre général ne soit pas élevé. C’est sur l’inflation
mensuelle que la hausse des prix internationaux s’est reflétée »,
explique Hani Guéneina, à la tête du département de
recherches chez Pharaos Securities Brokerage.
La hausse des prix des produits alimentaires sur le
marché local est la conséquence de la hausse des prix mondiaux. Après trois
mois de baisse, les prix des denrées alimentaires, surtout ceux des céréales,
ont augmenté en juillet. Selon l’édition d’août du Food Price Watch de
la Banque mondiale, l’indice mondial des prix alimentaires a augmenté de
10 % en juillet après deux mois de baisse consécutifs, en mai et juin.
Le 4 septembre dernier, trois agences des
Nations-Unies ont tiré, dans un communiqué conjoint, la sonnette d’alarme
contre une reproduction d’une crise alimentaire semblable à celle de 2007/2008.
A l’époque, les cours mondiaux des céréales avaient grimpé de 190 % en un
an pour le blé et de 125 % pour le maïs. L’effet sur l’Egypte ne s’était
pas fait attendre, l’inflation annuelle avait enregistré un record de
23,6 % en août 2008, et le gouvernement avait dû revoir à la hausse les
subventions sur le pain et les produits alimentaires.
Jusqu’à présent, les échos de la récente hausse
mondiale des prix ne sont ressentis que très légèrement en Egypte. Des effets
ont été notés sur le prix des volailles, touchées par la hausse des prix du
maïs. Celui-ci a augmenté de 23 % sur le marché international.
Hani Guéneina note que
l’industrie locale de la volaille a déjà partiellement répercuté la hausse des
prix du maïs sur les consommateurs. « Mais la hausse des prix a été
limitée grâce entre autres à la concurrence des produits saoudiens moins chers,
ce qui s’est traduit par une baisse des profits des sociétés locales »,
souligne-t-il.
L’autre effet à craindre serait sur le budget de l’Etat,
en raison des subventions aux produits alimentaires dans un pays importateur de
produits alimentaires, notamment premier importateur mondial de blé. Pour
l’instant, le gouvernement assure qu’il n’y a rien à craindre, notamment grâce
à la stabilisation des cours mondiaux en août.
Noamani Noamani, vice-président de
l’Autorité générale des produits d’approvisionnement qui réalise des achats en
blé et huiles subventionnés, assure que les besoins du pays en blé sont
couverts pour 6 mois. « On a aussi nos techniques pour réduire nos
coûts. Lors de fluctuations, on essaye de réaliser plus d’achats lorsque les
prix fléchissent », dit-il.
Il explique qu’en plus, les importations de l’Egypte en blé vont diminuer
de 1,1 million de tonnes en 2012/2013 en raison d’une hausse équivalente de la
production locale. Ainsi, l’Egypte importera seulement 4,6 millions de tonnes
de blé cette année.
Nouvelle apaisante
La situation actuelle de la récolte mondiale de céréales n’est pas aussi
alarmante qu’en 2007/2008. La FAO (Organisation des Nations-Unies pour
l’alimentation et l’agriculture) a annoncé que l’indice FAO des prix
alimentaires en août 2012 est resté inchangé par rapport à juillet, ce qui est
une nouvelle apaisante. Mais à 213 points, l’indice est toujours à un niveau
élevé à seulement 25 points en dessous du maximum atteint en février 2011.
L’effet néfaste sur les prix locaux ne sera probablement pas pour cette
année. Mais une nouvelle vague de sécheresse l’année prochaine représenterait
une menace dangereuse. Avec la baisse des réserves de change du pays de
quasiment 50 % depuis le déclenchement de la révolution du 25 janvier
2011, une hausse soudaine des produits de première nécessité ne fera
qu’aggraver la fragile situation des finances publiques ainsi que la situation
monétaire du pays.
La Banque mondiale, dans son rapport, a par ailleurs souligné une crainte
particulière sur l’effet probable de la crise sur les pays de la région :
« Les pays du Moyen-Orient et ceux d’Afrique du Nord et d’Afrique
subsaharienne sont les plus vulnérables au choc actuel. Ils acquittent, en
effet, de lourdes factures pour les importations alimentaires, et
l’alimentation représente une part importante des dépenses moyennes de leurs
ménages ; ils ont, en outre, une marge de manœuvre budgétaire limitée et
des systèmes de protection comparativement plus faibles ».
Marwa Hussein