Palestine. Faute d’avancée dans le processus de paix en vue de
créer un véritable Etat, Mahmoud Abbas se tourne vers l’Assemblée générale de
l’Onu pour tenter d’obtenir le statut d’Etat non membre.
En quête de
reconnaissance
C’est
le 27 septembre prochain, le jour où il doit prendre la parole devant
l’Assemblée générale de l’Onu, que le président palestinien Mahmoud Abbas
lancera les démarches pour l’accession de la Palestine au statut d’Etat non
membre des Nations-Unies. « Nous allons à l’Onu pour dire que nous
sommes un Etat auquel s’applique la Quatrième Convention de Genève (sur la
protection des civils en temps de guerre, ndlr). Il y a 133 pays qui nous
reconnaissent comme un Etat avec Jérusalem-Est comme capitale et où nous avons
des ambassades qui arborent le drapeau palestinien », a-t-il plaidé
samedi dernier. Mahmoud Abbas a manifesté à plusieurs reprises son intention de
se tourner vers l’Assemblée générale, après avoir renoncé à demander un vote au
Conseil de sécurité sur la demande historique d’adhésion à part entière d’un
Etat de Palestine, déposée le 23 septembre 2011, en raison de la menace des
Etats-Unis de déposer leur veto.
Les Palestiniens escomptent recueillir le soutien de
« plus de la moitié » des 193 Etats membres de l’Onu. Dans sa
démarche, le président palestinien a déjà reçu le soutien des Arabes. Le
secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil Al-Arabi,
aspire toutefois à ce que ce ne soit pas un « statut définitif ».
« Nous espérons que les circonstances permettront que la Palestine
devienne membre à part entière », a-t-il insisté.
Pour être adoptée, la résolution élevant la
représentation de la Palestine au rang d’Etat non membre, comme le Vatican,
doit être votée par plus de la moitié des 194 Etats membres, où elle est assurée
d’une large majorité. Ainsi, Israël prépare déjà son offensive. « En
raison de la majorité automatique (à l’Assemblée générale), nous ne pourrons
pas empêcher cette décision », a reconnu le vice-ministre israélien
des Affaires étrangères, Danny Ayalon, interviewé à
la Radio publique israélienne. « Notre action est dirigée vers les pays
occidentaux démocratiques. Si nous réussissons à former un bloc de 50 à 60 pays
opposés (à l’initiative palestinienne), la décision sera prise, mais elle sera
privée de toute signification politique », a-t-il expliqué.
Une portée
symbolique
Ce qui est
malheureusement vrai. La requête palestinienne, en dépit du fait qu’elle sera
approuvée, n’aura qu’une portée symbolique. De là à créer un véritable Etat aux
frontières clairement établies, avec Jérusalem-Est pour capitale et
internationalement reconnu, le chemin est encore long et semé d’embûches.
Certes, les Accords d’Oslo, signés le 13 septembre 1993, étaient censés aboutir
à terme à la création d’un Etat palestinien. Mais, 19 ans plus tard, la
perspective de l’Etat indépendant n’a jamais semblé aussi lointaine, et le
processus de paix est au point mort depuis des années. En effet, depuis son
lancement, le processus de paix israélo-palestinien est soumis aux aléas des
négociations, des alternances politiques en Israël (parti travailliste, Likoud,
Kadima) et à la colonisation grandissante. On semble
même aujourd’hui oublier que la période d’autonomie palestinienne, prévue dans
la Déclaration de principes et censée aboutir à la proclamation de l’Etat
palestinien, a touché à sa fin le 4 mai 1999 !
Aujourd’hui,
c’est donc l’heure de la désillusion. Sur le terrain, les faits sont
désolants : l’emprise israélienne sur les territoires occupés n’a jamais
été aussi forte. Il n’y a dans les faits qu’un seul Etat entre la mer
Méditerranée et le Jourdain qui tolère en son sein quelques zones autonomes,
dans la mesure où celles-ci ne sont pas facteurs de déstabilisation. Les
quelques enclaves palestiniennes de Cisjordanie peuvent à tout moment subir le
même sort que la bande de Gaza : le bouclage total, voire le blocus.
A cela
s’ajoute un désengagement clair de la communauté internationale. Alors que l’on
est en pleine campagne électorale aux Etats-Unis — principaux
parrains du processus de paix —, les deux candidats tentent de courtiser
Israël et le lobby juif pour s’attirer davantage d’électeurs. Certes, le Parti démocrate américain ne fait
plus mention de Jérusalem, « capitale d’Israël », dans son
programme de gouvernement, mais le président Obama,
qui se bat pour sa réélection, avait demandé aux Démocrates qu’ils amendent
leur programme et réintroduisent la mention Jérusalem « capitale
d’Israël », comme c’était le cas en 2008. De son côté, le candidat
républicain Mitt Romney a sauté sur l’occasion pour
dénoncer l’attitude des Démocrates et se positionner aux côtés de l’Etat
hébreu. « En tant que président, je rétablirai notre relation avec
Israël et serai solidaire de notre allié proche », a dit M. Romney,
qui avait déjà qualifié Jérusalem de « capitale d’Israël »
lors d’une visite sur place début août.
Même la
France, traditionnellement plus « équilibrée », change de cap.
En effet, le président français, François Hollande, qui avait déclaré avant son
élection : « Je soutiendrai la reconnaissance internationale de
l’Etat palestinien », revient sur ses paroles. Durant un récent
discours sur sa politique étrangère, il n’a fait que reconnaître « le
droit à l’autodétermination des Palestiniens ». Il n’a pas en
conséquence reconnu l’existence d’un Etat palestinien et a suggéré aux
dirigeants israéliens la reprise des négociations « dès lors que
les Palestiniens auront levé bon nombre de leurs préalables ».
Avec un
tableau aussi sombre, une « mini-reconnaissance » d’Etat non
membre semble le maximum que les Palestiniens puissent obtenir à l’heure
actuelle. A moins d’un miracle.
Abir Taleb