Nigeria .
Face aux menaces de la secte extrémiste Boko Haram, auteur
d’une série d’attentats meurtriers, le président Goodluck
Jonathan a décrété l’état d’urgence et décidé la fermeture
des frontières avec les pays voisins.
Le pouvoir se mobilise contre l’extrémisme
«
La crise a pris une dimension terroriste lorsque les
institutions gouvernementales et les lieux de culte ont été
pris pour cibles », a déclaré à la télévision le président
nigérian Goodluck Jonathan, ceci à la suite des derniers
attentats meurtriers, attribués à la secte islamiste et
extrémiste Boko Haram, qui ont visé des lieux de culte. «
Boko Haram est un cancer qui veut tuer notre pays, mais
personne ne les laissera faire », a estimé le président
nigérian qui, face aux menaces de la secte islamiste, a
décrété, samedi dernier, l’état d’urgence dans plusieurs
régions du nord du Nigeria. Goodluck Jonathan a décidé aussi
la fermeture de certaines frontières avec les pays voisins.
En fait, ces décisions interviennent alors que le pays est
sous tension après une vague d’attentats meurtriers. Depuis
le 25 décembre, jour de Noël et date d’une série
d’explosions visant trois églises et ayant fait 48 morts, le
Nigeria n’a pas vu le calme. Des incendies ont éclaté dans
plusieurs magasins appartenant à des chrétiens. D’autres
explosions ont visé des lieux de culte islamique. Une bombe
artisanale jetée mardi 27 décembre contre une école
coranique à Sapele, une ville du delta du Niger (sud), a
fait sept blessés dont six enfants. De même, quatre
personnes ont été tuées suite à une explosion et des coups
de feu vendredi dernier, près d’une mosquée à Maiduguri
(nord-est), après la prière du vendredi, ont indiqué des
habitants. Cette information a été aussitôt démentie par
l’armée qui a affirmé que deux personnes avaient été tuées
par des voleurs. « Des voleurs ont fait irruption sur un
marché de Maiduguri, alors qu’ils tentaient de voler des
commerçants, ils ont tiré sur trois personnes parmi
lesquelles deux sont mortes, la troisième, grièvement
blessée, est à l’hôpital », a affirmé le lieutenant colonel
Hassan Mohammed. Se disant excédés par les violences
imputées à Boko Haram, des responsables de la communauté
chrétienne du Nigeria ont prévenu que les chrétiens
assureraient eux-mêmes leur défense et répliqueraient en cas
de nouvelles attaques. Mais les autorités ont jugé que même
ces attaques pouvaient appartenir à Boko Haram, la secte
particulièrement active dans la ville de Maiduguri.
En outre, les autorités au Nigeria sont sous pression et
essuient de vives critiques face aux violences répétées de
Boko Haram. Elles se sont montrées incapables d’empêcher la
secte de multiplier ses actions de plus en plus
sophistiquées et meurtrières en dépit de raids brutaux de
l’armée. Boko Haram, qui a revendiqué les attentats commis à
Noël, s’est aussi attribué la responsabilité, entre autres,
de l’attentat suicide d’août 2011 contre le siège de l’Onu à
Abuja, qui a fait 25 morts.
En effet, ce mouvement prône l’instauration d’un Etat
islamique dans le nord du Nigeria, le pays le plus peuplé
d’Afrique avec 160 millions d’habitants, répartis également
entre musulmans, majoritaires dans le nord, et chrétiens,
plus nombreux dans le sud.
Contre le groupe islamiste
Par ailleurs, face à la crainte d’une escalade des violences
interconfessionnelles au Nigeria, le pouvoir tente
d’intensifier sa lutte contre la secte qui représente un
vrai cauchemar. Le ministre nigérian en charge de la police
a déclaré que tous les moyens nécessaires seront mis en
place pour mettre un terme à cette « guerre intense »,
lancée par Boko Haram contre le pays. Goodluck Jonathan a
appelé l’ensemble de la population nigériane à se mobiliser
contre le groupe islamiste.
Mais selon certains analystes, la solution sécuritaire et
les mesures prises ne suffisent pas, il faut avoir recours
au dialogue pour résoudre cette crise. « Il faut qu’on se
voie face à face. Pour nous, intellectuels, si vraiment il y
a une franchise, s’il y a une sincérité de la part du
gouvernement, il faut qu’il accepte de dialoguer avec Boko
Haram comme il a dialogué avec les ex-militants de Niger
Delta (Mouvement pour l’émancipation du delta du Niger) »,
pense Khalifa Dikwa, politologue, professeur à l’Université
de Maiduguri. En fait, la demande d’ouvrir un dialogue avec
la secte Boko Haram a été refusée par le gouvernement
central, ce qui, selon Khalifa, complique l’affaire. « Le
refus du gouvernement dit quelque chose de louche. Les gens
sont entre le marteau et l’enclume, entre le gouvernement et
Boko Haram. La majorité de la population est d’avis que les
deux groupes doivent être forcés par l’opinion
internationale à s’asseoir autour d’une table pour résoudre
ce problème une fois pour toutes », conclut Dikwa.
Sabah
Sabet