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Musée Gréco-Romain D’Alexandrie .
Fermé depuis plus de six ans pour restauration, ses
archéologues veulent lancer une campagne internationale afin
de dénoncer des malversations qui entravent sa réouverture.
Explications.
Des rénovations interminables
Le
musée gréco-romain d’alexandrie, le plus important musée
consacré à l’archéologie gréco-romaine dans le monde,
reflète une civilisation et un passé florissant d’une ville
qui était non seulement la capitale de l’Egypte, mais aussi
un important centre culturel et commercial.
Son projet de restauration et de rénovation, entamé il y a
plus de sept ans avec un budget de 120 millions de L.E.,
avait pour objectif de restaurer les objets et le bâtiment
et d’agrandir le musée, afin d’y conserver ce qui en résulte
des fouilles alexandrines qui ne cessent de croître.
Tout avait bien commencé. D’abord, la moitié du musée a été
fermée en 2002 et les travaux devaient prendre fin en 2004.
Plus tard, tout le musée a fermé ses portes aux visiteurs et
depuis, les travaux censés durer deux ans n’ont jamais été
achevés. Certains prétendent que le plafond du premier étage
du musée risquait de s’effondrer et que cela était l’une des
causes du retard. Depuis plus de six ans, les objets du
musée sont dans les dépôts.
Mais
il semble en réalité que les problèmes de réorganisation au
sein du Conseil Suprême des Antiquités (CSA) et le déficit
budgétaire dont il souffre sont la raison principale de sa
fermeture pendant toutes ces années. Après la révolution du
25 janvier 2011, un des employés du musée, Mohamad Ibrahim,
a informé le procureur général que les travaux de
restauration avaient été achevés en 2004. Mais le CSA, sous
la tutelle de Zahi Hawas à l’époque, a décidé de recommencer
les travaux après avoir attribué le projet à une autre
société sans recourir à un appel d’offres. « La ville
d’Alexandrie et l’économie de l’Egypte en général ont perdu
des millions de L.E. à cause de la fermeture du plus
important musée consacré à l’archéologie gréco-romaine dans
le monde. De belles pièces sont entassées dans les dépôts
depuis des années. Ce fait est devenu inacceptable pour les
archéologues non seulement en Egypte mais aussi dans le
monde entier, sans oublier les 300 archéologues et
trésoriers qui travaillent au musée », estime Ibrahim.
Situé non loin de l’amphithéâtre romain de Kom Al-Dekka, de
la colonne Pompée, du Serapeum et des catacombes de Kom Al-Choqafa,
ce musée comprend plus de 40 000 pièces de valeur. Les
collections du musée datent principalement du IIIe siècle
av. J.-C. au IIIe siècle ap. J.-C., couvrant de la sorte la
période ptolémaïque et romaine. Le musée abritait, entre
autres, des milliers de reliques datant du IIIe siècle av.
J.-C., notamment des momies, des sarcophages, des
tapisseries, objets offrant un panorama aussi fidèle que
varié de la civilisation gréco-romaine sous la forme qu’elle
a revêtue au contact avec l’Egypte. Il contient aussi des
pièces provenant du Fayoum, de Behnassa et autres.
Le musée est également réputé pour sa collection de statues
appelées Tanagra. La mot Tanagra vient du nom d’un village
de la Grèce antique, célèbre par sa nécropole ouverte pour
la première fois en 1874 et qui contenait une quantité
considérable de figurines. Ces gracieuses figurines, faites
en terre cuite par des artisans alexandrins et ayant
conservé jusqu’à présent leur couleur, donnent des indices
précieux sur le mode de vie des Alexandrines de l’époque,
sur leur manière de s’habiller et de se coiffer. La
collection du musée provient des nécropoles d’Alexandrie,
ces statuettes accompagnaient les défunts dans le monde
souterrain.
Le musée gréco-romain d’Alexandrie a été officiellement
inauguré le 17 octobre 1892 par le khédive Abbass Helmi II.
Le bâtiment du musée est donc lui aussi un monument.
Comportant une façade néoclassique reposant sur six
colonnes, il est situé dans la rue Al-Mathaf (la rue du
musée), à quelques pas du centre-ville et près du
gouvernorat d’Alexandrie.
Pour clore le chapitre de sa fermeture, des archéologues
égyptiens envisagent aujourd’hui de lancer une campagne
internationale pour sa réouverture. Une initiative qui
devrait être soutenue par l’Organisation des Nations-Unies
pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) et le
Conseil international des musées (ICOM).
Amira Samir
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En quête d’espace
Une campagne a été lancée par des archéologues et des
intellectuels afin d’annexer le bâtiment du gouvernorat au
musée gréco-romain. L’ultime solution pour remédier à
l’entassement de collections rares et uniques.
Une superficie de 2 700 m2 est actuellement la seule
solution pour sauver le musée gréco-romain d’Alexandrie,
considéré comme le plus riche au monde en antiquités
gréco-romaines. Archéologues et intellectuels se battent
pour récupérer ce terrain qui abritait à l’origine le siège
du gouvernorat d’Alexandrie et qui a pris feu le 28 janvier
lors des événements politiques qui ont secoué le pays. Pour
cela, une importante campagne, organisée par les
archéologues et les intellectuels, a été lancée à Alexandrie
sous le slogan : « Non au gouvernorat d’Alexandrie, oui au
musée gréco-romain ». Le but de cette campagne est de cesser
les travaux de reconstruction et de rénovation du bâtiment
du gouvernorat afin d’attribuer le terrain au musée
gréco-romain mitoyen. « On a lancé un appel urgent au
Conseil suprême des forces armées et à
Essam Charaf, chef du
gouvernement, pour leur demander d’annexer le terrain au
musée gréco-romain. En compensation, utiliser le terrain
adjacent à l’ancien siège du Parti national dans le quartier
de Smouha pour la construction
d’un nouveau siège pour le gouvernorat », explique Khaled
Azab, conseiller de
l’information à la Bibliotheca
Alexandrina et coordinateur de la campagne, en ajoutant que
le musée gréco-romain est l’un des plus célèbres du monde et
le troisième musée égyptien, inauguré par le khédive
Abbass
Helmi II.
Il renferme environ plus de 50 000 pièces réparties dans 27
locaux seulement. Plusieurs de ces pièces se trouvent dans
un état déplorable. En fait, le musée gréco-romain souffre
du manque d’espace qui empêche l’exposition de sa collection
unique. Les dépôts font défaut aussi. Ainsi, les problèmes
de conservation s’imposent. Outre cela, il a aussi besoin,
comme tous les autres musées, d’une zone de services
renfermant des bazars pour vendre les souvenirs, une petite
cafétéria et une aire de stationnement pour les véhicules. «
Cet espace est notre dernière chance pour pouvoir agrandir
et sauver le musée, vu l’entassement des pièces antiques
rares et l’impossibilité d’y faire une autre expansion à
l’avenir », souligne Azab.
Une superficie supplémentaire pour une bonne muséologie
n’est pas le seul but de la campagne, mais ce terrain est
considéré par la majorité des archéologues comme un espace
encore vierge qui n’a pas été l’objet de fouilles. Il est
probable d’y faire de grandes découvertes. Des voix se sont
élevées demandant au CSA de commencer immédiatement les
travaux de fouilles, puisque ces travaux peuvent conduire
peut-être, selon eux, à la découverte de la tombe
d’Alexandre le Grand, le fondateur de la ville d’Alexandrie,
ou tout son cimetière.
Si certains prétendent pouvoir trouver la tombe d’Alexandre
le Grand, d’autres estiment que les fouilles sous les ruines
de ce bâtiment peuvent conduire à la découverte du temple de
Saturne, dieu de l’agriculture et du temps pendant l’époque
gréco-romaine. En tout cas, l’archéologue Ahmad
Abdel-Fattah, qui confirme cette
idée, assure encore qu’il est temps de prendre la question
du terrain du gouvernorat au sérieux puisque auparavant,
personne n’y accordait intérêt, surtout que nous avons
certaines sources antiques qui soulignent la présence
d’antiquités datant de l’époque gréco-romaine. « Nous
cherchons actuellement le soutien d’un certain nombre
d’organismes internationaux, comme le Conseil international
des musées, l’Unesco et les professeurs d’arts et
d’archéologie gréco-romains au niveau des universités
internationales pour que notre voix soit entendue. Ils
pourront nous aider à atteindre notre but », indique Mohamad
Al-Sayed, chercheur archéologique, en rappelant que la
reconstruction de la Bibliothèque d’Alexandrie, qui était un
rêve, est devenue une réalité dans la plus belle ville de la
Méditerranée et qui forme aujourd’hui une partie de son
patrimoine.
Samar
Zarée
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