La révolution de janvier encercle
Israël
Mohamed Salmawy
Voilà
des années qu’Israël n’a pas été encerclée de cette
manière sur le plan international, et jamais l’intransigeance de son
gouvernement n’a été dévoilée au grand jour comme il en fut récemment. Le
mérite de ceci ne revient ni aux efforts de la diplomatie, ni à une campagne
politique, mais surtout à la révolution populaire du 25 janvier.
Bien
qu’à ses débuts, la révolution n’avait pas ciblé Israël, ni n’a brandi de
slogans sur la Palestine ou la politique étrangère en général, il n’en demeure
pas moins que son appartenance arabe était évidente dès le départ. Les foules
qui sont sorties de la plupart des villes arabes ont affiché leur soutien
inébranlable à la révolution égyptienne dès ses premiers jours critiques, en
lui apportant un soutien arabe et international.
Dès
que la révolution a réussi à faire chuter l’ancien régime, elle s’est mise
aussitôt à s’élever contre ses politiques odieuses. Elle a alors levé haut les
pancartes de la Palestine en pleine place Tahrir et
devant l’ambassade d’Israël. A ses premiers jours, la révolution a focalisé ses
revendications sur la chute du régime, qu’elle a posée comme une condition sine
qua non à la réalisation de la liberté et de la démocratie et à l’ancrage des
bases de l’Etat civil. Tout de suite après, nous avons vu cet intérêt se
tourner à la cause palestinienne, qui est, selon toute logique et toute
perspicacité, une partie intégrante de la cause de la sécurité nationale
égyptienne, même si la diplomatie égyptienne sous l’ancien régime avait essayé
de se convaincre du contraire. Le rôle de l’Egypte s’était alors transformé
d’un défenseur du droit palestinien à un intermédiaire entre lui et l’ennemi
israélien que je qualifie comme tel, malgré la signature par l’Egypte du traité
de paix. Bien que le conflit arabo-israélien n’ait pas pris fin par la
signature de ce traité, à un moment, l’Egypte, qui était le défenseur
incontesté du droit arabe, vu son poids régional et son prestige international,
est l’ennemi n°1, comme le dit Israël. L’ennemi n°1 de l’Egypte dans la région
demeurera l’Etat occupant, dont l’activité expansionniste ne cesse de prendre
de l’ampleur, faisant fi des traités qui n’interviendront jamais pour stopper
ses plans illégitimes, ses tentatives d’imposer sa mainmise et sa suprématie
militaire et nucléaire sur les peuples de la région, à l’encontre de tous les
traités internationaux et des résolutions onusiennes.
Dans
ce contexte, le rôle de l’Egypte s’est affaibli et sa force s’est amoindrie
avec son alignement jour après jour sur le côté israélien. En fin de compte,
elle s’est trouvée en train d’encercler le peuple palestinien, à Gaza, voire
même en train de resserrer l’étau sur ses accès naturels. Une politique qui a
été exposée à une protestation populaire élargie qui s’est exprimée par le
biais des manifestations à répétition et par les tentatives successives du
peuple égyptien de briser cet embargo auquel a participé l’Egypte. Les
Egyptiens avaient, en effet, effectué, un point de passage verrouillé de Rafah,
des tentatives de transporter les munitions et les aides médicales qui étaient
à maintes reprises arrêtées par les forces israéliennes et égyptiennes. Ceci a
non seulement porté préjudice à l’image arabe et internationale de l’Egypte,
mais aussi à ses intérêts stratégiques.
Il
était donc tout à fait normal que la révolution, qui est sortie pour rectifier
le tir et pour restituer à l’Egypte son prestige naturel, rouvre le dossier
palestinien, affichant son refus des anciennes politiques et appelant à
l’adoption d’une nouvelle politique plus élargie dans le contexte du rôle
naturel de l’Egypte dans la région. Lorsque le ministre des Affaires
étrangères, Nabil Al-Arabi, a pris la décision
historique de rouvrir le point de passage de Rafah, il appliquait les
politiques de la révolution de janvier revendiquées par les foules ayant
manifesté les dernières années. Ainsi, cette décision fut l’une des plus
populaires du gouvernement de l’après-révolution.
Probablement
l’un des résultats les plus importants de cette nouvelle politique déclenchée
par la révolution est cet embargo international lancé contre Israël, à plus
d’un niveau. La révolution, qui a réussi avec son large impact moral à combler
la fissure palestinienne longuement qualifiée d’incurable par l’ancien régime,
est parvenue au même titre à ouvrir les points de passage. Elle a alors mis
Tel-Aviv dans une position de défense devant l’opinion internationale. Le
résultat a été que le leadership palestinien a finalement décidé de recourir
aux Nations-Unies pour proclamer la création de l’Etat palestinien longuement
attendu. En conséquence, les voix officielles et populaires se sont élevées de
par le monde réclamant une solution juste à la cause palestinienne. Plus d’une
déclaration et communiqué officiels se sont alors multipliés à ce propos, dont
le dernier discours du président américain Barack Obama au siège du secrétariat d’Etat américain, qu’il a
consacré au thème du Moyen-Orient.
Barack Obama
s’est trouvé dans l’obligation de présenter une vision pour le règlement de la
cause, surtout après les événements de janvier dernier et ses retombées dans
les 4 coins des pays arabes, à savoir les révolutions arabes successives qui se
rangeront du côté de la révolution égyptienne dans la défense du droit
palestinien.
Israël fut le premier à pressentir le danger provenant de
la place Tahrir. Il a alors défendu l’ancien régime
et a essayé d’influencer les grandes puissances pour entreprendre la même
position. Et lorsque les pays n’ont pu que suivre le cours de l’Histoire,
Israël a gagné en intransigeance et le discours de son premier ministre
Benyamin Netanyahu au Congrès était un exemple d’intransigeance et une
affirmation de l’isolement international que lui a
imposé la révolution de janvier et ses retombées. En dépit du consentement du
lobby sioniste aux Etats-Unis à ce discours, il reste que l’attaque
internationale aux deux niveaux, officiel et populaire, a persisté, atteignant
même des cercles à l’intérieur d’Israël. Les revendications de retrait des
territoires occupés sont montés d’un cran et
dernièrement, un communiqué a été promulgué secouant Israël, signé par 100
éminentes personnalités culturelles, littéraires et politiques, appelant aux
mêmes revendications de Tahrir, à savoir la création
d’un Etat palestinien. Ainsi, la révolution du 25 janvier a-t-elle réussi, non
pas uniquement à briser l’embargo imposé à Gaza, mais à le remplacer par un
autre étouffant Israël, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur .