Twitter .
Formidable outil pour rassembler et orienter les foules en
Egypte pendant la révolution du 25 janvier, devenu une école
de journalisme citoyen, ce réseau social est aujourd’hui un
monde à part avec ses codes, ses règles et bien sûr ses
vedettes.
Un réseau pour tous les militants
«
J’ai été l’une des premières personnes à avoir appris la
mort de Bin Laden, avant même que la nouvelle ne soit
diffusée sur les écrans de télévision ou publiée dans les
journaux », note Nadia Al-Awady, journaliste de 42 ans.
C’est par le biais du célèbre réseau social Twitter que
Nadia apprend que le terroriste a succombé à une attaque de
commandos américains. Grâce aux tweets d’un citoyen
pakistanais qui relatait cette opération, la nouvelle de
l’attaque s’est répandue comme une traînée de poudre. « Ce
citoyen pakistanais a été suivi par plus de 88 000 abonnés
dans le monde », ajoute Nadia.
Sur Twitter, le plus important est que la personne dise la
vérité et la transmette telle qu’elle est, en un temps
record. C’est cette crédibilité qui fait que le nombre
d’abonnés à ce réseau augmente.
Pendant la révolution égyptienne, Nadia était connue pour la
véracité des ses tweets. Résultat : le nombre d’abonnés qui
la suivent sur le site a doublé. Elle rassemblait les faits,
les infos et les mettait sur le site avec des photos pour
être accessibles à tout le monde sur Twitter. La veille de
la manifestation du 25 janvier, les jeunes ont eu recours à
Twitter. A travers le réseau social, ils se mettaient
d’accord pour se répartir en groupes et donnaient des
instructions sur les différents lieux de rencontre avant de
se réunir tous ensemble à la place Tahrir. Un moyen qui a
prouvé son efficacité car la sécurité n’y avait pas accès.
Autre particularité, de nombreux manifestants ont pu
utiliser leurs portables sophistiqués pour accéder à Twitter
et communiquer avec les autres abonnés.
Si au début de la révolution du 25 janvier, Nadia n’avait
que 3 000 abonnés qui la suivaient, aujourd’hui, quatre mois
plus tard, ils sont 26 400. Cette jeune militante divorcée a
dû envoyer ses quatre enfants en Arabie saoudite chez leur
père pour pouvoir se consacrer à la révolution. « Si mes
enfants avaient été avec moi, je n’aurais pas été aussi
active et efficace », note-t-elle.
De nombreuses personnes ont utilisé Twitter pendant la
révolution et continuent de l’utiliser jusqu’à maintenant.
Ils ont compris l’importance du réseau social. Twitter est
devenu
« Nawara est un soleil qui n’a cessé de briller dans le ciel
de Twitter. Durant la révolution du 25 janvier, l’avis de
Nawara était l’un des plus importants pour les jeunes. Place
Tahrir lors des manifs ou des sit-in, après chaque discours
de Moubarak, une question circulait : qu’en pense Nawara ?
Comment va-t-elle réagir sur Twitter ? C’est notre guide
d’opinion sur le site », assure Mohamad, un abonné de Nawara.
Avec ses tweets, Nawara réunit un grand nombre de fidèles.
Avec audace et courage, les tweets de Nawara sont téméraires
et sincères. Un langage familier, parfois même blessant en
cas de révolte, distingue ses tweets et reflète aussi le
pouls de la rue. « Nawara est très active et toujours
présente sur le terrain. On peut le ressentir clairement car
ses propos montrent qu’il s’agit d’une personne qui vit avec
les gens. Et c’est parfois un point faible dans ses tweets
car parfois elle émet des avis trop impulsifs », confie
Moustafa, l’un de ses abonnés.
Fille du poète populaire de gauche Ahmad Fouad Negm et de
l’écrivaine à tendance islamique Safinaz Kazim, Nawara a
toujours mené une vie de militante. Un foulard couvrant ses
cheveux, cette jeune femme est à la fois une farouche
activiste sur son blog ou Twitter. Son travail de
traductrice lui a donné aussi l’occasion de s’ouvrir à
d’autres cultures sans perdre son identité. Elle a été
dernièrement sous les feux des projecteurs, ce qui a poussé
le Conseil suprême des forces armées à s’adresser à elle
lorsqu’il voulait transmettre un message aux jeunes. Elle a
donc dû subir la colère de certains tweets qui ont mené
campagne contre elle pour critiquer sa participation aux
sessions tenues par le Conseil militaire. Elle est aussi
critiquée lorsqu’elle assiste en tant que blogueuse à un
atelier financé par un fonds étranger. Les tweets ne l’ont
pas épargnée avec leurs insultes. Ce qui poussa la jeune
femme à supprimer ses abonnés qui dépassaient les limites.
Mais Nawara se soucie peu de ces critiques : pour elle, la
seule chose qui compte, c’est d’être sincère avec elle-même.
Nawara rejette le terme « al-waqiaa », utilisé par l’armée
dans son communiqué pour désigner les tentatives de
certaines personnes voulant semer la zizanie au sein de la
population. Alors ses fans restent fidèles à ses tweets. «
Personnellement, j’ai opté pour Nawara car c’est une
personne sincère, spontanée et aimant par-dessus tout son
pays », précise l’un des ses fans .
Dina
Darwich