Syrie .
Alors que Damas continue de préférer la manière forte au
dialogue, la mobilisation réclamant le départ du président
Al-Assad ne faiblit pas, avec
des manifestations qui se poursuivent dans tout le pays.
La répression continue
Les
manifestations ne cessent pas. Les forces de sécurité ont
une nouvelle fois ouvert le feu sur les manifestants, tuant
des personnes à Kessoua près de
Damas, à Barzi, un quartier de
Damas, et à Homs (centre). La répression a fait, depuis le
15 mars, plus de 1 300 morts parmi les civils et a entraîné
l’arrestation de plus de 10 000 personnes, selon des ONG
syriennes.
Sur le plan international et face à l’intransigeance de
Damas, l’Union européenne a décidé d’accentuer la pression,
jugeant « révoltante » la répression en cours et imposant
des sanctions contre des responsables des Gardiens de la
révolution iraniens, l’armée d’élite de la république
islamique, accusés d’aider Damas. « En faisant le choix de
la répression plutôt que de tenir les promesses de réformes
de grande ampleur qu’il a lui-même faites, le régime sape sa
légitimité », indiquent les dirigeants européens dans un
projet de déclaration commune qui doit être approuvé lors
d’un sommet à Bruxelles. Cette formulation marque une montée
en puissance de la condamnation de Damas par les
responsables européens. « Les responsables de crimes et
d’actes de violence commis contre des civils auront à
répondre de leurs actes », ajoute le texte. En exprimant
également « la vive préoccupation » des dirigeants européens
concernant des opérations militaires syriennes à proximité
de la frontière turque, dans la ville de
Khirbet Al-Jouz.
Les dirigeants y condamnent aussi, avec la plus grande
fermeté, la répression exercée par le régime syrien à
l’encontre de sa propre population et les violences
inacceptables et révoltantes dont elle continue de faire
l’objet.
En parallèle, un nouveau train de sanctions européennes, le
troisième, est entré en vigueur. Il vise 7 personnes, dont
trois responsables des Gardiens de la révolution, et 4
sociétés. Elles sont accusées
d’être impliquées dans la fourniture de matériel et
d’assistance pour aider le régime syrien à réprimer les
manifestations et visées par un gel de leurs avoirs en
Europe et une interdiction de visa. « Ceci envoie un message
très clair au gouvernement iranien, qu’il est inacceptable
qu’il fournisse des équipements et des conseils techniques
pour aider le régime syrien à mater les protestations », a
souligné un diplomate européen.
Les Etats-Unis ont aussi accusé l’Iran de soutenir la
répression des protestataires en Syrie. Mais le ministre
syrien des Affaires étrangères, Walid
Mouallem, a démenti toute aide de l’Iran ou du
Hezbollah libanais contre les manifestants qui contestent le
régime. Il a aussi assimilé les sanctions de l’Union
Européennne (UE) à une guerre
contre la Syrie. La nouvelle liste de sanctions européennes
comprend en outre quatre responsables syriens. Il s’agit de
deux cousins germains du président
Bachar Al-Assad, l’un
accusé d’être impliqué dans la répression des manifestants
et l’autre d’aider au financement du régime de Damas avec
les deux autres derniers. L’UE avait déjà imposé en mai des
sanctions contre 23 caciques du régime, dont le président
Assad.
Des relations sur le point de chavirer
La Turquie, alliée de Damas dans la région, perd patience
face à la répression en Syrie et pourrait renoncer à
soutenir le président Bachar Al-Assad,
malgré ses promesses de réformes, estiment des analystes.
Vendredi encore, le chef de la diplomatie turque, Ahmet
Davutoglu, s’est efforcé de
défendre la politique menée depuis une décennie par la
Turquie à l’égard de son voisin syrien : maintenir de bonnes
relations, mais encourager le régime à entreprendre les
réformes demandées par son peuple. « Le dernier discours du
président Assad renfermait des
éléments positifs en termes d’indications de réformes. Mais
il est très important que des pas concrets soient faits dans
la pratique. Nos contacts se poursuivent dans ce cadre », a
déclaré M. Davutoglu.
Mais l’inquiétude grandit en Turquie, où près de 12 000
Syriens ont déjà trouvé refuge alors que le régime de
Bachar Al-Assad
continue de déployer son infanterie et ses chars pour mater
la contestation.
Ankara craint que les troubles en Syrie fassent tache
d’huile, des rebelles kurdes étant présents des deux côtés
de la frontière. Une entrée massive de réfugiés syriens
pourrait favoriser l’infiltration sur le sol turc de
rebelles kurdes susceptibles de renforcer la guérilla du
Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans le sud-est de
l’Anatolie. « Nous arrivons à un point où le gouvernement
(turc) va dire au gouvernement syrien : Le temps est écoulé,
on vous a accordé assez de temps et vous n’en avez rien
fait. Désormais, si des acteurs internationaux décident
quelque chose, nous serons avec eux », estime
Osmane
Bahadir Dinger, de
l’institut de recherches stratégiques USAK. « Maintenant, il
devient évident que les réformes ne vont pas changer le
problème. Même s’ils en mettent en œuvre, cela ne suffira
pas », ajoute l’analyste.
« La chute du régime syrien est inéluctable. Je pense que le
gouvernement turc l’a compris », estime
Cengiz Aktar, spécialiste
des relations internationales à l’Université stambouliote de
Bahgesehir. « Il faut penser à
autre chose qu’à essayer de sauver ce régime. Il faut une
gestion de crise à l’échelle régionale », estime-t-il.
Inès
Eissa