Libye .
Kadhafi s’accroche bec et ongle au pouvoir tandis que la
situation sur le terrain bascule dans un engrenage sanglant
et que l’Otan intensifie ses bombardements.
La
crise
perdure
La
main tendue de Kadhafi aux révolutionnaires n’a pas
convaincu. Au contraire, une dégradation sur le terrain
s’est traduite par des attaques impliquant les civils et des
attaques contre les ambassades à Tripoli. Une escalade
causant la mort d’un de ses fils, Saif
Al-Arab Mouammar Kadhafi, 29
ans. « Une opération visant à assassiner directement le
dirigeant de ce pays, Kadhafi et sa femme étaient dans la
maison, mais n’ont pas été blessés », a dénoncé Moussa
Ibrahim, porte-parole du gouvernement.
L’Otan a maintenu ses frappes sur Tripoli dans la nuit de
dimanche, en dépit des accusations du régime libyen d’avoir
tenté d’assassiner Mouammar Kadhafi la veille, lors d’un
bombardement aérien qui a aussi tué trois de ses
petits-enfants.
L’Otan a assuré ne pas viser des individus dans ses frappes.
« L’Otan a poursuivi ses frappes de précision contre les
installations militaires du régime Kadhafi à Tripoli cette
nuit, y compris des frappes sur un bâtiment de commandement
et de contrôle connu dans le secteur de
Bab Al-Aziziya, samedi
soir », a indiqué l’Alliance atlantique dans un communiqué.
« Je suis au courant d’informations non confirmées des
médias, selon lesquelles certains membres de la famille
Kadhafi pourraient avoir été tués », a déclaré le général
Charles Bouchard, commandant en chef de l’opération «
Protecteur unifié », dans ce communiqué. « Nous regrettons
toute perte de vie, particulièrement celle de civils
innocents. Cependant, toutes les cibles de l’Otan sont de
nature militaire et ont été clairement liées aux attaques
systématiques du régime Kadhafi sur la population libyenne
et les zones peuplées. Nous ne visons pas les individus », a
souligné le général Bouchard.
Dans une première apparition publique depuis le 9 avril, M.
Kadhafi, le plus ancien dirigeant arabe au pouvoir depuis
1969, a réaffirmé qu’il ne partirait pas malgré la pression
militaire de l’Otan, les
sanctions financières internationales, l’embargo sur les
armes et le gel de ses avoirs. « L’Otan doit abandonner tout
espoir d’un départ de Mouammar Kadhafi. Je ne quitterai pas
mon pays et je m’y battrai jusqu’à la mort », a-t-il dit à
la télévision, qualifiant les rebelles de terroristes. «
Nous sommes prêts à négocier avec la France et les
Etats-Unis, mais sans condition. Nous ne nous rendrons pas,
mais je vous appelle à négocier. Nous pouvons régler nos
problèmes entre Libyens sans nous battre : Retirez vos
flottes et vos avions », a lancé M. Kadhafi. L’Otan, qui a
pris fin mars le commandement des opérations de la coalition
internationale, a rejeté cet appel, soulignant qu’il
revenait avant tout à Kadhafi de cesser ses attaques contre
des civils.
De son côté, le CNT a lui aussi refusé toute négociation,
affirmant que Kadhafi n’avait plus aucun rôle à jouer à
l’avenir. Le régime a appelé néanmoins les rebelles de
Misrata, à 200 km à l’est de
Tripoli, à disposer les armes en échange d’une amnistie,
après avoir averti que tout navire tentant d’entrer au port
de Misrata serait frappé avec
force. L’Alliance atlantique a assuré qu’elle poursuivrait
ses opérations jusqu’à ce que toutes les attaques et les
menaces contre les civils aient cessé, jusqu’à ce que toutes
les forces pro-Kadhafi, y compris les tireurs embusqués,
mercenaires et forces paramilitaires, soient rentrées dans
leurs bases.
Depuis le début de l’intervention militaire internationale
le 19 mars, nombre de responsables politiques des pays
engagés, tout en réclamant le départ de M. Kadhafi, ont
répété que le mandat de l’Onu prévoyait de protéger les
civils libyens, pas de tuer le dirigeant libyen. Mais
certains sont restés plus ambigus. Le 20 mars, le ministre
britannique de la Défense, Liam Fox, avait ainsi estimé
qu’il y avait une possibilité que le colonel Kadhafi soit
directement visé.
Jouer les intermédiaires
Quelques heures après les frappes, les ambassades d’Italie
et de la Grande-Bretagne à Tripoli ont été la cible
d’attaques. Selon le ministère italien des Affaires
étrangères, des « actes de vandalisme » ont été commis. De
son côté, Londres a décidé d’expulser l’ambassadeur de Libye
à la suite d’attaques contre l’ambassade britannique à
Tripoli et d’autres missions diplomatiques étrangères.
La Turquie, qui a de gros intérêts économiques en Libye,
s’efforce de jouer les intermédiaires dans ce pays. Elle a
temporairement évacué son ambassade à Tripoli après des
troubles dimanche dans cette ville visant des ambassades, a
annoncé lundi le chef de la diplomatie turque,
Davutoglo. « Nous avons décidé
la nuit dernière (dimanche), au vu de la situation
sécuritaire, d’évacuer pour un certain temps notre
représentation à Tripoli ». De sa part, le vice-ministre
libyen des Affaires étrangères, Khaled
Kaom, a qualifié les attaques contre les ambassades
d’incident regrettable et assuré que la Libye prendrait à sa
charge les réparations. Parmi les missions attaquées
figurent celles du Royaume-Uni et de l’Italie, ainsi que le
département américain des affaires commerciales et
consulaires, a-t-il précisé. Etant donné l’insécurité dans
la capitale, les Nations-Unies ont décidé de retirer
l’ensemble de leur personnel de Tripoli, a annoncé de son
côté une porte-parole de l’Onu.
Inès
Eissa