Energies renouvelables . Une initiative de coopération entre la France et l’Afrique vise à mettre ces énergies au service du développement. L’Egypte ambitionne de répandre leur emploi sur son territoire.

Des richesses à exploiter

Les énergies solaires et éoliennes peuvent résoudre les problèmes de développement dans les pays africains pauvres. Telle est la conclusion d’une réunion tenue le 21 avril à Paris et qui a rassemblé 30 pays africains, en plus de la France. Objectif affiché : rassembler les points de vue sur le développement des énergies renouvelables et lancer « L’initiative Paris-Naïrobi, de l’énergie propre pour l’Afrique ».

L’Afrique du Nord, du Centre et du Sud, qui souffrent d’un déficit énergétique, parient sur les énergies « vertes ». Selon les instances internationales, plus de deux milliards d’êtres humains n’ont toujours pas accès à l’électricité. Le recours aux énergies renouvelables devrait permettre de réduire ce déficit énergétique qui empêche les pays africains de se développer. L’Afrique du Nord, notamment le Maroc et l’Algérie, a mis en place depuis quelque temps déjà plusieurs projets pour la production de l’énergie éolienne. Les deux pays produisent de l’électricité à partir de centrales thermo-solaires, de panneaux solaires et photovoltaïques en coopération avec des pays européens. L’Afrique de l’Ouest dispose d’un vaste potentiel hydraulique, solaire et éolien mais il est encore largement inexploité. Ces richesses, si elles sont bien exploitées, permettraient de fournir 10 à 20 % de l’approvisionnement en électricité dans la région. L’Afrique de l’Est est la région la mieux lotie. En Ouganda et au Kenya, les besoins nationaux sont loin d’être satisfaits. Ces deux pays ont de plus en plus recours aux énergies propres pour compléter la production d’électricité issue du charbon.

La réunion de Paris n’a pas porté seulement sur le développement des pays africains, mais il était question aussi d’exporter cette énergie aux pays européens. « Le désert en Afrique n’est pas exploité. Il est temps d’exploiter le désert pour produire de l’énergie solaire et l’exporter en Europe. Après la catastrophe naturelle au Japon et les rejets radioactifs de la centrale nucléaire de Fukushima, endommagée par le séisme et le tsunami, plusieurs pays ont commencé à revoir leur politique en matière d’énergie nucléaire comme l’Allemagne. Les pays européens veulent tirer profit des énergies renouvelables et en faire profiter les pays africains », explique Galal Osman, président de l’Association égyptienne de l’énergie éolienne et vice-président de l’Association internationale de l’énergie éolienne. Il explique que l’Egypte ambitionne de développer les énergies renouvelables sur son territoire.

Dans ce contexte, des spécialistes de l’énergie propre en Egypte ont eu récemment des pourparlers avec des responsables européens afin de réaliser des progrès dans ce domaine. Avec les inquiétudes d’une diminution probable des eaux du Nil et l’assèchement progressif des nappes de pétrole et de gaz, l’Egypte devait, depuis plusieurs décennies déjà, se lancer dans l’exploitation des énergies solaire et éolienne. Ainsi pensaient les spécialistes égyptiens de l’énergie, réunis avec leurs homologues français, allemands et espagnols. Les discussions avec le côté français ont porté sur la tenue d’une conférence en juin sur les énergies renouvelables. Objectif : présenter le savoir-faire français dans les domaines de l’énergie solaire et éolienne et examiner la possibilité de créer un partenariat technique entre l’Egypte et la France dans le domaine de l’énergie renouvelable.

Le nucléaire : un danger ?

Ces réunions entre responsables égyptiens et français interviennent au moment où le débat sur les dangers des centrales nucléaires est à son comble. Cela coïncide également avec une activité remarquable de l’Autorité Egyptienne des Energies Renouvelables (AEER) relevant du ministère de l’Energie et de l’Electricité. « Bien que les stations d’énergies renouvelables en Egypte, qui dans leur grande majorité sont des stations d’énergie éolienne, contribuent seulement à hauteur de 1 % dans la production de l’électricité, l’AEER veut atteindre le taux de 20 % d’ici l’an 2020. Dans ce contexte, nous avons commencé à nous servir de l’énergie solaire pour produire l’électricité dans les petites agglomérations. Aujourd’hui, l’oasis d’Al-Gara dans le gouvernorat de Marsa Matrouh, au nord-ouest de l’Egypte, est entièrement éclairée grâce à cette énergie propre », assure Réda Abdel-Azim, spécialiste de l’énergie solaire à l’AEER.

Il ajoute : « Au cours des prochains mois, d’autres villages en Egypte vont se servir également de l’énergie solaire pour produire de l’électricité. Une nouvelle station de production de l’électricité sera inaugurée à Koraymatt, à 92 kilomètres au sud du Caire. Elle aura une capacité de 140 mégawatts dont 20 provenant de l’énergie solaire. Ce genre d’énergie propre est l’espoir de l’Egypte. L’énergie solaire, à titre d’exemple, produit 3 000 kwh/m2 par an, soit 7 kwh/m2 par jour. Un chauffe-eau de 150 litres consomme 3,25 kwh par jour. Cette énergie est beaucoup plus utile pour l’Egypte que l’énergie nucléaire ».

Non polluantes, les énergies solaire et éolienne sont plus sûres que l’énergie nucléaire. Après la catastrophe naturelle au Japon, des voix en Egypte ont appelé à renoncer au projet nucléaire. D’autres pensent que les deux énergies sont importantes pour le pays. « L’Egypte a besoin de l’énergie nucléaire. Il est important de voir les expériences des autres pays pour apprendre. Beaucoup de pays dans le monde se servent de cette énergie. Même après le séisme au Japon. Mais parallèlement, il est important d’exploiter les énergies propres, notamment l’énergie solaire. Il suffit de savoir que le volume de cette énergie sur une surface comme le Lac Nasser suffit pour éclairer la France tout entière », témoigne Samer Al-Moufti, ancien secrétaire général du Centre de Recherches sur le Désert (CRD) relevant du ministère de l’Agriculture et de la Bonification des terres.

Selon lui, il est temps d’exploiter durablement les énergies propres pour résoudre certains problèmes comme la désalinisation de l’eau de mer. Al-Moufti est favorable à ce que les investissements dans les énergies renouvelables soient un véritable projet national, non seulement en Egypte mais aussi dans l’ensemble du monde arabe. La Ligue arabe tiendra une conférence en décembre sur l’exploitation des énergies renouvelables.

Racha Hanafy