Egypte . Un de nos
fidèles lecteurs exprime ses sentiments envers les événements actuels en Egypte
et la chute de l’ex-président.
Le jugement de Moubarak
Les
nouvelles publiées ces jours-ci dans les différents journaux prouvent que la
politique menée par les médias égyptiens n’a pas beaucoup changé, même après la
révolution. La chute du régime et les bouleversements dans la vie politique ne
sont pas nécessairement signe d’un changement de mentalité. Juste après que le
Parquet eut décidé de mettre en détention Gamal et Alaa Moubarak, des articles
furent publiés dans les journaux concernant leur vie privée. Cette affaire liée
à la vie privée des symboles de l’ancien régime a dépassé les limites lorsqu’un
quotidien s’est habitué à publier des nouvelles telles que : « Le président
souffre de dépression sévère mais continue à se teindre les cheveux en noir ! L’ex-président
et sa femme sont très déprimés mais ils n’ont pas perdu de poids. Alaa
Moubarak, fils aîné de l’ex-président, avait accusé son frère d’être
responsable de toutes ces catastrophes et c’est à cause de lui que leur père a
quitté le pouvoir de manière humiliante ». J’aimerais savoir, en tant que
lecteur, quel profit peut-on tirer d’un article qui parle de la teinture de
Moubarak ou même de son menu au petit-déjeuner ? Est-ce que de telles nouvelles
concernant des faits sans intérêt sont compatibles avec les principes du code
de déontologie des journalistes sur lequel se reposent ceux qui ont écrit ces
articles ? Personnellement, ce qui m’intéresse ce sont les informations liées
au parcours de l’enquête et aux détails qu’elle dévoile au fur et à mesure. Je
suis pour le jugement de l’ex-président, mais je refuse absolument qu’on se
réjouisse des malheurs de la famille Moubarak et de tous les responsables de
l’ex-régime, à la prison de Tora actuellement.
Youssef Ghanem,
Le Caire.
Liberté sans frontières
L’Egypte
vit actuellement une période de liberté : Qui parmi nous ne touche pas de près
les changements positifs ? Notre révolution a tout changé autour de nous : nos
visages, nos idées, nos mœurs et même nos personnalités. Après la pluie, le
beau temps. Pour la première fois, je souhaiterais être derrière les barreaux
de la prison de Torah, devenue un lieu très célèbre dans le monde. J’aimerais
vivre avec l’équipe des corrompus : avec le coach Safouat Al-Chérif,
l’entraîneur Zakariya Azmi, l’arbitre Ahmad Nazif, les juges Al-Maghrabi et
Garana, l’attaquant Ahmad Ezz, le défenseur Fathi Sourour et le gardien de but
Atef Ebeid, les deux avants-centres Gamal et Alaa Moubarak et prochainement le
capitaine de cette équipe le père Moubarak qui est la cause de cette sélection
corrompue.
Quelques
questions à cette équipe célèbre : Qu’est-ce que l’Egypte vous a fait pour
toute cette haine ? Pourquoi croyez-vous que votre sang est plus cher que le
nôtre ? Quels égoïsme et injustice coulent dans votre sang ? Où êtes-vous
maintenant ? Personne n’est loin de la loi et de la justice d’Allah. Qui parmi
vous a souffert de nos maux ? Comment vivez-vous loin de votre autorité et de
vos châteaux ? Sentez-vous la saveur de la liberté ? Combien coûte la vie sans
dignité ?
Pas de
pitié, pas de pardon pour les criminels qui ont volé nos richesses, tué nos
souhaits, étouffé nos rêves et déchiré nos ambitions. C’est pourquoi on doit
appliquer la plus sévère punition sur ces criminels afin de pouvoir récupérer
nos richesses volées au lieu de demander des bourses et des aides financières
aux autres pays qui augmentent à leur tour nos dettes. Notre Egypte doit
renaître de nouveau. Vive la justice, vive l’Egypte !
Abdallah Abdel-Aal,
Mansoura.
Un peu de civisme
Dans
une société qui connaît des contradictions comme la nôtre, il est tout à fait
possible de voir sans cesse des gens faire une chose et son contraire. Je parle
d’une situation que j’ai vécue il y a quelques semaines. Bien sûr, vous savez
tous qu’après la révolution, il y a eu un réveil national et une effervescence
des bons principes qui avaient disparu de notre société. Nous avons tous vu les
publicités qui appelaient les gens à ne pas payer des pots-de-vin, à ne pas
faire de discrimination entre les gens selon leur identité religieuse, à ne pas
gaspiller l’eau potable … elles émanent de la volonté sincère des Egyptiens de
vivre un changement culturel, civilisé et humain. Mais retournons à la
situation que j’ai vécue ! Il s’agit d’un jeune qui, conduisant sa voiture
juste devant moi, avait accroché une feuille portant le message suivant : «
Maintenant, le pays est le nôtre. Il est temps d’arrêter de jeter les ordures
par terre ». Mais malheureusement, par habitude, l’un des passagers de cette
voiture a jeté un papier par la fenêtre. Un dernier mot : rêver d’un changement
est une chose et travailler pour le changement en est une autre. Si on rêve de
vivre dans un pays civilisé, commençons à agir comme des citoyens civilisés !
Nano Hicham,
Héliopolis.
Qui est Hisham Gad ?
Permettez-moi,
chers lecteurs, de parler d’un artiste pluridisciplinaire doué d’un talent hors
pair : Hisham Gad. Il s’est fait connaître dès son arrivée à Paris par sa
manière d’interpréter les chansons populaires de Sayed Darwich, celles
révolutionnaires de Fouad Negm et de cheikh Imam, mais aussi les grands
classiques de la chanson arabe comme Abdel-Wahab, Abdel-Halim et Farid. C’est
son héritage qu’il continue à faire vivre en le revisitant dans une progression
musicale réussie. Il vit sa passion en France où il s’est installé, allant à la
rencontre des artistes français, jouant avec Allain Leprest notamment. Il
chante aujourd’hui la révolution, la célèbre avec d’autres artistes, dans de
nombreux concerts de soutien au peuple égyptien. Ainsi, en plein printemps
arabe, il chante un hommage à Ahmad Fouad Negm, rendu lors d’une soirée
inoubliable à l’Institut du monde arabe à Paris. Le public reprenait en chœur
les chansons dans une ferveur enthousiaste ce soir-là, dans la grande salle de
spectacle.
Il est
particulièrement bouleversant quand il chante « ô Sidi Bouzid », œuvre de son
ami l’auteur-compositeur Ossama Khalil. En découvrant les marionnettes dans son
quartier natal de Choubra au Caire, il a suivi des cours d’art dramatique, de
théâtre, de mise en scène, de cinéma, de musique et de chanson. C’est donc un
artiste accompli complet, touche-à-tout, avide de se nourrir d’art. Avant de se
faire un nom, Hisham Gad a fait preuve de beaucoup de détermination, enchaînant
répétitions et représentations à un travail vocal exceptionnel. Son style
élégant autant en réinterprétation qu’avec des compositions originales a
conquis un large public passionné par des chants de rêve et d’espoir. Quel
plaisir que celui d’entendre aussi, durant cette soirée célébrant le premier
Cham Al-Nessim après la révolution égyptienne, un poème écrit pour le printemps
arabe par le poète et écrivain Khaled Roumo, sur une composition musicale au
piano de Ghaiss Jasser « Quand le peuple hume la brise ». Ce poème sera chanté
par Naziha Meftah, la merveilleuse interprète marocaine à la voix fairouzienne
au Festival de Fès, des musiques sacrées du monde. Un concert qui promet d’être
exceptionnel, comme ce printemps naissant.
Fatima Guemiah,
Paris.
La violence doit cesser
Pas un
jour qui passe sans que nous entendions parler de tel ou tel acte de violence
ou de brutalité. Même les hôpitaux et les écoles ne sont plus à l’abri de ces
actes, ce qui met la vie de plusieurs personnes en danger. Récemment, un
hôpital dans le quartier de Matariya a été attaqué par environ 400 voyous qui,
portant des armes blanches, cherchaient un blessé dans l’hôpital. Ne trouvant
pas la personne désirée, ils ont détruit les portes de l’hôpital, se sont
dispersés dans les couloirs, cherchant ici et là une personne blessée, qui
avait de sa part cruellement poignardé, lors d’une querelle, un membre de leur
part, causant la panique des médecins et des malades de l’hôpital. Ce qui m’a
surpris dans cet acte, c’est que tout s’est passé au vu et au su des agents de
police supposés garder l’hôpital. Je comprends très bien qu’avec le
déclenchement de la révolution, les forces de sécurité dépendant du ministère
de l’Intérieur ont été obligées de se retirer, puis avec la chute du régime et
les scandales révélés concernant le service de Sûreté d’Etat, elles furent
complètement absentes de la rue. Mais avec le gouvernement de Essam Charaf, qui
jouit d’une acceptation générale, nous espérons que les choses changeront. Par
exemple, nous avons besoin de sentir un véritable changement profond dans la
politique du ministère de l’Intérieur. Nous espérons voir prochainement un
nouveau pays qui vit en paix et en sécurité.
Michel Karam,
Guiza.