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 Semaine du 25 au 31 mai 2011, numéro 872

 

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Egyptologie . A travers une conférence tenue à la médiathèque de l’Institut français d’Héliopolis, la spécialiste Gihane Zaki nous fait revivre l’art de se maquiller dans l’Egypte ancienne.

De grâce et de beauté

« Plus de 160 recettes décrivant l’élaboration des palettes à fard, prenant parfois plusieurs mois, nous sont parvenues », affirme l’égyptologue Gihane Zaki, conseiller pour la coopération internationale du ministre d’Etat pour les Affaires des antiquités. Cette quantité de recettes reflète l’intérêt prêté à la beauté dans l’Egypte ancienne, une beauté dont les origines et les raisons diffèrent de celles de notre époque. Le soin du corps humain a commencé depuis la préhistoire. Les Anciens Egyptiens recherchaient à protéger la peau humaine du climat chaud et sec ainsi que des effets néfastes de la crue du Nil. L’eau couvrait alors toute la terre arable pendant les quatre mois de la crue. Cette atmosphère était alors propice à la reproduction des insectes et des bactéries.

Dans ces conditions, la peau perdait sa souplesse et devenait rigide, voire envenimée, notamment les yeux qui étaient attaqués et infectés par les maladies. Pour se protéger, les Egyptiens devaient prendre leurs précautions et soigner leur propreté. « Ils entouraient leurs yeux du khôl qui soigne les conjonctivites. Ils mettaient des huiles parfumées qui servaient à réhydrater la peau et à lui rendre sa souplesse et des fards qui étaient utilisés pour blanchir la peau du visage », explique Gihane Zaki.

La beauté ou le fard avait un troisième volet d’importance, outre la protection et la guérison : c’est aussi une manifestation religieuse qui est apparue suite au mythe de l’œil d’Horus. Lors de son combat contre son oncle Seth, Horus a perdu son œil. Sa mère, Isis, a-t-elle inventé des produits cosmétiques et, avec sa force magique, elle avait restitué l’œil et l’a remis à sa place. « Ainsi a-t-elle restauré l’intégrité de son fils en rétablissant la perfection de sa beauté », explique l’égyptologue. Cette croyance religieuse a incité les Egyptiens, notamment les femmes, à perfectionner l’utilisation des matières cosmiques qui protégeaient, soignaient et rajeunissaient en effaçant les effets du temps.

Thérapie et esthétique

Pendant la IVe dynastie, les yeux sont ornés de khôl vert, fabriqué à partir de la malachite. Au Nouvel Empire, ils étaient embellis de khôl noir. Chaque époque avait ses propres normes esthétiques. Mais le plus surprenant, c’est l’utilisation du plomb à très faible dose dans la préparation du khôl, voire du fard en général. Selon Zaki, cette fine dose protégeait les yeux des conjonctivites. Elle accentue aussi la beauté de l’œil. Les yeux des femmes sont toujours représentés à travers un regard ferme, explicite et attirant. Pour Zaki, les femmes les plus renommées par leur beauté étaient Néfertiti, Nefertari, Miret-Amon et Tiy. « A cette époque, l’art cosmétique a atteint son apogée. Ces femmes n’étaient pas les plus belles femmes, mais elles se distinguaient par leur charme et leur séduction ». Selon l’experte, le secret de la beauté reste la simplicité et l’élégance spontanée.

On essayait avec les matières cosmétiques de combattre le temps. La femme doit être toujours jeune. Mais elle ne perd jamais ni son attraction ni sa séduction. Ceci se reflète par la diversité des matières qui composent le poudrage et le fard. Le poudrage est à base de calcaire. Si la femme veut blanchir sa peau, le calcaire est remplacé par de la farine. Mais lorsqu’elle cherche un teint bronzé, la femme de l’époque ancienne utilise l’ocre rouge. Quant au fard, il était composé de graisse d’oie réduite à l’état de poudre et mélangée avec un minéral. Il en existait deux genres : un très beau et de très bonne qualité qui était fabriqué avec de la malachite verte issue du Sinaï, appelé oudjou, et un second produit à base de sulfure d’antimoine ou de galène, nommé le mesdemet. Ainsi sont obtenues les différentes couleurs de maquillage. Chacune d’elles avait un symbole. Le noir est kemet, c’est la couleur de la terre foisonnante, le vert reflète la fertilité, et le rouge rappelle le désert. Le bleu exprime l’éternité, quant à l’or, il symbolise la chaire divine du soleil.

Par cette variété de matières cosmétiques et de couleurs, la femme avait la liberté de changer d’apparence tout en respectant les normes de l’époque. Cet ornement exige « la présence d’un miroir, un des instruments les plus précieux de la trousse de toilette », explique Gihane Zaki. Il a la forme d’une tige de papyrus où s’orne la tête de Hathor, la déesse de l’amour à tête de vache. Le manche peut être en bois ou en ivoire.

Un art complet

Le perfectionnement de la parure de la femme ne s’arrête pas là. Restent la perruque et le parfum. La perruque est l’un des éléments indispensables de l’attraction féminine. Des mèches nattées ou ondulées parées de fleurs, de bijoux, de rubans ... La coiffure peut être volumineuse et descendre en deux larges mèches jusqu’aux seins. Elle peut être courte ou encore tressée. La perruque est ensuite maintenue sur la tête de la femme par un serre-tête frontal caché par une fleur de lotus. Pour les fêtes ou grands événements, le serre-tête est un ruban d’or décoré.

Quant au parfum, il reste jusqu’à nos jours une inspiration infinie pour les grandes maisons de mode. Bien que les Egyptiens aient ignoré la distillation, ils avaient une réputation renommée dans la parfumerie. Ils cultivaient les fleurs et les broyaient pour en tirer des produits parfumés. Les différents éléments des fleurs, triés par tamisage, étaient réduits en pâtes et en gommes parfumées. « La femme parfumée est représentée avec un cône de graisse d’oie sur sa tête. Ce cône n’est qu’un symbole du parfum émané. Mais personne ne le porte dans la réalité », reprend l’égyptologue.

Khôl, fard, poudre à base et parfum ne sont pas les seuls outils que la femme utilisait pour s’embellir dans l’Egypte ancienne. Sa beauté réelle émane de sa splendeur acquise de l’Egypte elle-même.

Doaa Elhami

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Les nageuses éternelles 

Une jeune femme nue, aux formes gracieuses, simplement parée d’un collier et d’une ceinture et coiffée d’une perruque à pans triangulaires : l’évocation de toute l’élégance de la civilisation raffinée. Elle est allongée, ses deux bras tendus tiennent un cuilleron en forme de cartouche, orné d’un motif aquatique de poissons et de fleurs de lotus. Sur le corps étiré sur une ligne parfaite, le cou et la tête, sculptés dans un morceau de bois distinct, sont placés à angle droit, d’une façon étonnamment peu naturelle. La tête n’est pas placée entre les deux bras, au sommet des épaules, mais en arrière, en haut du dos, de sorte que, vu de face, elle est, avec son collier qui lui sert de socle, dans le même plan que le bassin. La tête est un peu grosse par rapport au corps. La coiffure, les yeux et le collier sont soulignés de peinture noire.

Cependant, ces bizarreries n’apparaissent pas d’emblée, et l’œil est charmé au premier abord par une figure féminine agréable. L’artisan a rehaussé par la gravure et la peinture la délicatesse du modelé. L’œuvre est conçue selon deux points de vue distincts : d’une part le corps nageant à l’horizontal et, d’autre part, l’ensemble du buste, de la tête et du bassin, que l’on peut regarder selon un autre point de vue, depuis l’avant. Pour ce groupe, une échelle supérieure à celle du corps a été adoptée. Les Egyptiens concevaient ainsi leurs statues et leurs dessins, en les composant selon plusieurs points de vue accumulés en une seule et même œuvre. Peu leur importait que la réalité ne soit pas fidèlement reproduite. Pour eux, l’essentiel était le message, le sens donné à leurs créations. La signification de cette petite sculpture est double : d’une part, la figure d’un jeune corps féminin, évocatrice dans toutes les cultures du monde de l’amour et, par la suite, promesse de continuation de la vie ; d’autre part, l’apport d’un bassin en « cartouche » égyptien, cette forme allongée encadrée par une corde nouée de façon très stylisée.

Le cartouche de corde entoure habituellement le nom du roi et symbolise l’espace que son pouvoir encercle, à la façon d’un lasso. Ici, il forme le cadre de la cuillère où sont gravés trois poissons du genre Tilapia, appelé aussi carpe du Nil, qui mordent des tiges de nénuphar. Ce poisson, qui fait incuber ses œufs fertilisés dans sa bouche, était pour les Egyptiens symbole de sexualité et de régénération. Ces motifs aquatiques évoquent la fraîcheur vivifiante de l’eau et de la végétation et peuvent être les garants d’une éternelle jeunesse. Cette « cuillère à fard » ou « cuillère de nageuse » faisait partie de la trousse de toilette des femmes dans l’Egypte Ancienne. Les jeunes filles servaient des onguents divers à leurs maîtresses à l’aide de ces cuillerons.

Doaa Elhami

 




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