Religion .
« Le salafisme en Egypte » a été le sujet d’une table ronde
du Conseil suprême de la culture pour tenter de répondre aux
questions soulevées par ce courant rigoriste aux signaux
contradictoires.
Ces nouveaux venus en politique
La
table ronde a essayé d’expliquer l’ampleur de ce phénomène
dans l’Egypte actuelle, à la lumière des derniers événements
du contexte sociopolitique, où les salafistes se sont
montrés plus visibles dans la société depuis la révolution
de 25 janvier 2011. Selon le professeur Mohamad Hafez Diab,
« les salafistes en Egypte seraient entre un million et un
million et demi de personnes, ils contrôlent 6 000 mosquées
et lieux de prière, et aujourd’hui profitant de la liberté
télévisée sur les chaînes de la parabole et sur les
satellites, les différents courants salafistes disposent de
36 chaînes ». Ce qui divise la société égyptienne à leur
propos, c’est que théoriquement les salafistes ne devraient
pas se mêler selon les traditions musulmanes de la vie
terrestre, donc ils devraient être sages, posés et
non-violents. Ainsi, ils devraient dans l’absolu représenter
un portrait similaire à celui qu’ils ont désigné eux-mêmes
comme ennemi, à savoir le soufisme, mais avec beaucoup de
pratiques en accord strict avec les textes religieux. Au
cœur du problème de la représentativité des groupes
salafistes, se trouve une différence essentielle dans
l’islam qui reste une religion sans clergé. Les grandes
figures du salafisme en Egypte tentent en vain d’installer
ce patriarcat hiérarque, dont l’absence ne leur garantit pas
le statut qu’ils désirent. Leurs apparitions médiatiques
frôlent souvent les catastrophes pour leur image. Nombreux
se sont montrés tout simplement menteurs, en allant
contredire et nier leurs propres propos ! Ce qui donne une
image peu sérieuse de ceux qui prétendent être des fidèles
du prophète de l’islam, connu et reconnu pour son dire vrai.
Maintes diversités
La diversité des groupes salafistes n’aide pas à élaborer
une vision claire de ce courant peu connu. Le salafisme
mudkhali faisait allégeance à l’ex-président Moubarak en le
désignant comme commandant des fidèles ! Et la palette se
complète par maintes diversités jusqu’au plus extrême, qui
est le salafisme djihadiste, violent et responsable à
l’échelle mondiale de nombreuses crimes terroristes visant
des innocents civils. La figure emblématique de ce courant
est Oussama bin Laden, qui vient d’être abattu au Pakistan
par les Américains. « Le salafisme djihadiste est en déclin
depuis l’effondrement de l’Union soviétique », explique
Farid Ibrahim, journaliste à Al-Gomhouriya, qui assure « que
le salafisme djihadiste est une fabrication américaine avant
d’être un produit saoudien ». En effet, le salafisme reste
dans la lignée et sur les bases du wahabisme saoudien. Les
sources du salafisme rigoureux et islamiste se trouvent dans
les textes d’Ibn Taymiya, « qui a eu un problème dans son
rapport avec l’autre, puisqu’à son époque les Tatars et les
tribus d’Asie centrale ont attaqué, détruit et ruiné le
califat abbasside et ont brûlé Bagdad la capitale »,
explique Farid Ibrahim, qui argumentait que cela était un
cas à part dans l’histoire musulmane, qui devrait être placé
dans son contexte. Il ajoute : « En Arabie saoudite, il
n’existe pas de coptes ou d’autres communautés à une grande
échelle, ce qui rend le contexte de création et d’usage du
wahabisme particulier et ne concernant que l’Arabie saoudite
».
Il faut signaler que les salafistes sont complètement
différents de leurs Frères musulmans. Ils ne sont pas donc
les seuls sur la scène religieuse politique en Egypte. Mais
on note pour les salafistes qui se sont engagés dans le cas
« Camélia Chéhata », une femme supposée convertie et
réclamée par les salafistes, leur disposition des moyens
financiers pour des questions en marge de ce qui préoccupe
vraiment le pays, comme par exemple faire tourner l’économie
ou affronter l’insécurité.
Un consensus a régné dans les discussions de tous les
cercles de la société et non seulement lors de cette table
ronde, que la responsabilité principale pour affronter,
réguler et maîtriser ces flots repose sur Al-Azhar. Cette
institution est la seule responsable pour valider ou non la
véracité ou même classifier les nombreux prêcheurs du
salafisme qui occupent les chaînes de télévision satellite.
Al-Azhar est la seule institution apte, crédible et
autorisée à représenter l’islam sunnite. Aujourd’hui après
la révolution du 25 janvier, Al-Azhar peut se libérer du
pouvoir et reprendre son rôle académique et religieux pour
couper la route à toute dérive étrangère au peuple égyptien.
La question est soulevée, mais la réponse reste en suspens
pour découvrir ces nouveaux venants sur la scène politique
égyptienne.
Amr
Zoheiri