Al-Ahram Hebdo, Economie | Option ou obligation ?

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 Semaine du 18 au 24 mai 2011, numéro 871

 

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Economie

Dette Extérieure . L’économie égyptienne a connu un ralentissement vu la chute des revenus du tourisme, des exportations et de la production. L’endettement paraît obligatoire, mais est-ce le meilleur choix au bon moment ? La question suscite un débat.

Option ou obligation ?

S’endetter à l’étranger pour relancer l’économie mise à mal par la révolution. Ce choix du gouvernement égyptien ne fait pas l’unanimité chez les experts. « Emprunter à l’étranger est un moyen d’affronter la crise actuelle. Ce n’est pas une mesure habituelle. Mais nous vivons une crise exceptionnelle. Que les experts qui s’opposent à l’idée d’emprunter aux institutions internationales me donnent une autre solution efficace pour résoudre nos difficultés et je la proposerai tout de suite ». C’est ainsi que se défend Samir Radwane, ministre des Finances, contre les accusations adressées suite à sa décision d’emprunter à l’étranger.

Radwane a annoncé, à maintes reprises, ces dernières semaines la nécessité de se procurer des ressources extérieures, afin de surmonter la fragile phase économique actuelle. Il s’agit au moins d’une somme variant entre 10 et 12 milliards de dollars nécessaires d’ici 2012. C’est ainsi que l’Egypte s’adresse actuellement aux institutions internationales, comme la Banque Mondiale (BM) et le Fonds Monétaire International (FMI), pour obtenir les sommes nécessaires à combler le fossé financier auquel le pays doit faire face actuellement.

Le ministre des Finances avait, en fait, déclaré le mois dernier que l’économie avait régressé de 7 % au cours du premier trimestre de l’année, en raison de la chute des revenus du tourisme et des exportations. Il a également annoncé que le taux de croissance enregistrera au maximum 2 % à la fin de l’année fiscale en cours (juillet), alors que le déficit budgétaire est estimé à environ 9 %.

Une situation dangereuse qui impose l’endettement. Mais s’endetter est-il le meilleur choix au bon moment ? Les points de vue et recommandations à cet égard divergent. Le gouvernement assure « qu’emprunter à l’étranger n’est plus un choix, voire c’est une obligation », estime Radwane à l’Hebdo. Il ajoute que la récession économique que l’Egypte affronte suite à la révolution impose au gouvernement un tel choix, afin de redresser la barre et entreprendre les réformes nécessaires. Et de poursuivre : « Nous étudions tous les choix possibles pour retenir le meilleur. La Banque islamique, la Banque africaine, la Banque mondiale, etc. Les négociations avec les pays arabes sont en cours. L’Arabie saoudite, le Qatar et le Koweït ont exprimé leur intérêt à présenter des soutiens financiers à l’Egypte. Mais à ce jour, il nous faut des sommes concrètes. La BM était une option, en raison des conditions de remboursement et des conditions politiques. La BM n’intervient pas dans les dépenses des sommes allouées », dit-il.

De plus, l’Egypte avait reçu, au cours des deux dernières semaines, un prêt de la BM d’une valeur de 2,2 milliards de L.E. remboursables sur 18 ans avec un taux d’intérêt de 3 %. Ainsi, une délégation auprès du FMI visitera l’Egypte cette semaine afin de discuter de la possibilité d’octroyer un autre prêt au pays. « Le FMI est un dernier choix, car les conditions d’octroi sont un peu plus strictes et compliquées », précise Radwane.

Même si les conditions de remboursement du FMI ne diffèrent, en fait, pas vraiment de la BM. « Il s’agit de rembourser la somme allouée sur 15 ans avec un taux d’intérêt de 4 %. Le problème est que Le FMI exige que les sommes soient utilisées dans des domaines précis et ceux-ci ne sont pas dans nos priorités actuelles », explique Radwane.

Or, comme le ministre l’assure, la révolution a donné du poids à l’Egypte au sein de la communauté internationale, « ainsi, nous croyons à un changement d’attitude de la part de ces institutions ».

Une opinion partagée par Ahmad Ghoneim, professeur d’économie à l’Université du Caire. Il assure que les pertes de la crise actuelle sont énormes et l’instabilité qui l’a suivie a augmenté la facture. Le gouvernement est donc obligé d’emprunter. « C’est une mesure inévitable vu les pressions exercées sur l’économie en ce moment. Et le plus important, ceci est un choix à ne pas craindre, car il s’agit cette fois-ci de crédits obtenus pour des raisons politiques et non à cause de mauvaises orientations économiques », dit Ghoneim.

« Solutions rapides et faciles »

Mais l’option choisie par le gouvernement n’a pas trouvé le même écho chez d’autres experts. Ces derniers mettent en avant le danger de se soumettre aux institutions internationales. « La mendicité auprès de ces institutions fera sombrer l’Egypte dans des engagements supplémentaires, ce qui impliquera une intervention étrangère dans la formulation de nos programmes à venir », dit un professeur d’économie qui a préféré garder l’anonymat. Il ajoute : « Rien n’a changé. L’Egypte continue à choisir les solutions rapides et faciles. Et avec de telles tendances, nous ne pourrons jamais créer une économie solide et indépendante ».

C’est que l’Egypte a une longue histoire avec les institutions internationales, surtout la BM et le FMI. Elle a toujours dû accepter de se soumettre aux exigences libérales de ces institutions afin de recevoir de l’aide. Privatisation, marché libre, libéralisation des services ... autant de mesures qui ont porté atteinte à l’économie nationale à cause d’une application forcée et non progressive. « Je ne comprends pas pourquoi le ministre des Finances insiste à se tourner vers la BM et le FMI alors que nous savons bien que ces prêts sont conditionnés par des règles qui protègent les intérêts des pays étrangers, surtout que ces derniers souffrent actuellement d’une récession économique. Toute concession aura donc un prix », martèle Ibrahim Al-Issawi, expert économique. Il ajoute : « L’Egypte ne devrait avoir recours à cette option qu’après avoir exploité toutes les ressources internes, surtout que la dette du pays est déjà gonflée ». Même son de cloche chez Doha Abdel-Hamid, professeur d’économie financière à l’Université américaine du Caire, qui assure que le gouvernement devrait en premier lieu rééchelonner ses dépenses. « Il existe plusieurs articles, tels que les subventions à l’exportation et les organismes économiques qui s’emparent d’une bonne part du budget. Le gouvernement pourrait se servir de ces fonds pour au moins réduire la facture de l’endettement », dit-elle. Car « l’image n’est pas encore claire. C’est pourquoi nous devrions ne pas nous précipiter vers une telle étape. Les ressources du pays comme le tourisme et les activités industrielles ne procureront pas au gouvernement des sommes supplémentaires. Le secteur privé pourrait avoir un rôle », estime-t-elle.

La dette extérieure du pays est de 33 milliards de dollars alors que la dette intérieure se chiffre à 888 milliards de L.E., soit au total 1,1 trillion de L.E., ce qui représente 90 % du PIB. Le taux international tourne autour des 60 %. De plus, l’instabilité politique dont souffre le pays actuellement a augmenté la facture des crédits de l’Egypte de quelque 7 %, et la valeur de la L.E. a atteint son niveau le plus bas vis-à-vis du dollar. « Tous ces facteurs font que la décision de s’endetter est un mauvais choix. Il faut penser à plus tard. Il ne faut pas détruire l’avenir des prochaines générations par des décisions économiques injustes. Le gouvernement actuel n’est que transitoire. Il faut donc être plus prudent dans les décisions », conclut l’expert qui garde l’anonymat.

Névine Kamel

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