Al-Ahram Hebdo, Enquête | L’enquête accablante

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 Semaine du 27 avril au 3 mai 2011, numéro 868

 

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Enquête

Justice . La commission d’enquête sur la révolution du 25 janvier a publié son rapport définitif sur les abus policiers. La responsabilité de Moubarak et de l’ancien ministre de l’Intérieur est mise en avant.

L’enquête accablante

« L’entière responsabilité de la mort des manifestants pendant le soulèvement pacifique du 25 janvier, dont le but était de renverser le régime, est imputée à Hosni Moubarak ». C’est la conclusion du rapport final de la commission d’enquête sur la révolution rendu public cette semaine. Après deux mois d’investigations, la commission, formée par l’ancien premier ministre Ahmad Chafiq, pour faire la lumière sur les agressions dont les manifestants de la place Tahrir ont fait l’objet, dresse le bilan définitif des manifestations : 864 morts et 6 460 blessés recensés jusqu’au 16 février dernier. Ceci sans compter 26 officiers et agents de police tués. « Ces policiers ont été tués hors de la place Tahrir, devant des commissariats ou dans les prisons », lance Omar Marwan, secrétaire général de la commission et président de la Cour d’appel du Caire.

La commission comprenant un panel de magistrats comme Adel Qoura, ancien président de la Cour de cassation, Mohamad Amin Al-Mahdi, ancien président du Conseil d’Etat, Iskandar Ghattas, ancien ministre adjoint de la Justice, Mohamad Badran, professeur de droit à l’Université du Caire, et Nagwa Khalil, présidente du Conseil national des recherches sociologiques et criminelles, a présenté son rapport définitif au ministère de la Justice. La commission s’est basée sur l’analyse des témoignages et des preuves relatifs aux affrontements entre policiers et manifestants au cours de la période comprise entre le 25 janvier et le 11 février.

Le rapport, qui souligne aussi la responsabilité de l’ancien ministre de l’Intérieur, Habib Al-Adely, note que les forces de sécurité ont eu recours à la force excessive et aux tirs à balles réelles contre les manifestants pacifiques. De même, des véhicules de police ont renversé et tué intentionnellement des civils. « Des tireurs d’élite d’une unité de lutte anti-terrorisme appartenant au ministère de l’Intérieur se sont positionnés sur les toits de certains bâtiments autour de la place Tahrir comme celui de l’Université américaine du Caire pour tirer sur les gens », explique Marwan. Il ajoute que ces fusillades ont duré plusieurs jours et Moubarak n’a pas ordonné l’arrêt des tirs à balles réelles, ce qui confirme son implication et sa responsabilité dans ce carnage. Selon le rapport, les tireurs ont visé les manifestants à la tête et à la poitrine. Les hôpitaux ont signalé un grand nombre de blessures par balles au niveau des yeux. « Des balles perdues ont également tué de nombreux civils qui regardaient les manifestations depuis les fenêtres de leurs immeubles », explique Marwan.

La publication du rapport intervient au moment où l’ancien président Hosni Moubarak est placé en garde à vue pendant 15 jours suite à des accusations sur l’utilisation de la violence contre les manifestants. L’ex-ministre de l’Intérieur de l’ancien régime, Habib Al-Adely, est lui aussi emprisonné, accusé d’avoir tué les manifestants. En outre, les deux fils de l’ex-président, Alaa et Gamal, ainsi que plusieurs autres figures de l’ancien régime sont détenus eux aussi ou jugés pour répression et corruption.

Le rapport de la commission d’enquête, établi sur la base de rapports médicaux officiels, de témoignages et de vidéos, a révélé que certains symboles du Parti national démocrate dissous, des membres du Parlement dissous et des agents de police avaient planifié les marches pro-Moubarak lors desquelles les manifestants pacifiques de la place Tahrir ont été agressés par des mercenaires, qui ont utilisé des chameaux, des charrettes tirées par des chevaux, des blocs de pierre, des matraques, des armes et des cocktails molotov. Le rapport maintient cependant la confidentialité des noms des instigateurs de cette bataille connue dans les médias sous le nom de bataille des chameaux mais le juge Omar Marwan indique que la commission a remis au procureur général une liste d’une dizaine de noms de responsables accusés d’être impliqués dans la répression. « Nous ne sommes pas un tribunal, notre travail est de collecter les informations et les faits et de les remettre aux responsables de la justice ».

Le rapport évoque un autre épisode troublant de la révolution, l’ouverture des prisons. « Un certain nombre de prisons comme celle de Wadi Al-Natroun et d’Abou-Zaabal, qui abritaient des prisonniers de la cellule terroriste du Hezbollah, ont été intentionnellement ouvertes pour faire sortir les prisonniers et effrayer l’opinion publique », explique encore Marwan.

Le rapport énumère les raisons qui ont déclenché la révolution du 25 janvier. Parmi celles-ci le projet de transmission héréditaire du pouvoir. Bien que ce projet ait été accepté par la majorité parlementaire et même par l’opinion publique mondiale, le peuple égyptien le rejetait complètement, notamment l’élite intellectuelle et l’institution militaire.

La commission recommande, dans son rapport composé de 500 pages, l’établissement d’une nouvelle Constitution et la suppression de toutes les lois restreignant la liberté, y compris la loi sur les droits politiques, pour garantir des élections justes et honnêtes supervisées par les magistrats. La comission recommande également une mise à jour du système de sécurité pour faire respecter les droits de l’homme.

Ce rapport final de la commission d’enquête est une condamnation claire et franche de l’ancien régime. Où ira ce rapport à présent et que peut-il changer ? Hicham Serag, vice-procureur, explique : « Le rapport sera remis au procureur général et traité avec le plus grand sérieux. C’est un élément important dans les procès qui sont en cours contre les figures de l’ancien régime ». L’avocat et le militant politique Adel Mekki explique, lui, que dans les procès ordinaires, le Parquet demande une enquête minutieuse sur l’incident. Cette enquête est obligatoire pour le juge qui examine le procès. Mais dans une affaire importante qui touche tout le pays, l’enquête faite par un groupe des juges, de professeurs de droit, prend une importance particulière. « A mon avis, le procureur général et le tribunal prendront ce rapport comme une preuve et pas à titre indicatif seulement », exprime Adel Mekki. Il ajoute que si la Cour accepte tous les faits cités dans le rapport, l’ex-président Hosni Moubarak et l’ex-ministre de l’Intérieur, Habib Al-Adely, risquent la peine de mort en vertu de la loi égyptienne pour meurtre et tentative de meurtre avec préméditation. Une dizaine de responsables sont condamnés dans le rapport avec des faits et des preuves, soit directes ou indirectes. Mais Mekki pense que le rapport a omis une question très importante, c’est la décision de l’ancien régime de faire voler deux avions de chasse au-dessus de la place Tahrir pour effrayer les manifestants. C’est un acte contraire à toutes les conventions internationales signées par l’Egypte. En fait, le procureur général, Abdel-Méguid Mahmoud, a renouvelé de 15 jours la détention provisoire de Moubarak en attendant l’achèvement de l’enquête sur son implication dans des affaires de corruption et de gaspillage de fonds publics.

Ola Hamdi

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