Al-Ahram Hebdo, Idées | Imposer des règles et laisser faire

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 Semaine du 20 au 26 avril 2011, numéro 867

 

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Idées

Conférence . Economiste et éditorialiste, Guy Sorman estime que l’Egypte doit sortir de l’économie informelle et planifiée. Des points de vue parfois contradictoires et souvent détachés de la réalité.

Imposer des règles et laisser faire

Guy Sorman est spécialiste économique des pays en développement. Invité à s’exprimer sur les « événements » qui ont secoué l’Egypte — c’est ainsi que l’Institut Français qualifie la révolution du 25 janvier —, il n’a pas cherché à l’expliquer ou à se lancer dans des pronostics sur l’avenir de l’Egypte. Si pour lui un pas non négligeable a été franchi et qu’aucun retour en arrière n’est possible, il estime qu’il ne peut « qu’interpréter ce qui s’est passé, cette révolution n’est pas la mienne, je n’apporte qu’un regard extérieur », une position appréciée par l’audience, lasse des théories grandiloquentes sur « le printemps arabe ».

Auteur de Les Enfants de Rifaa sur les « restes » de la pensée de Tahtawi, Sorman est souvent qualifié d’ultra-libéral. L’expression est probablement un peu forte et bien que ses points de vue soient quelque peu décalés de la réalité économique égyptienne, son analyse est pertinente. Qualifiant l’économie égyptienne de « décolonisation égyptienne », Sorman regrette que Le Caire n’ait pas suivi la voie du Brésil ou de l’Inde. L’Egypte, en effet, « a gardé son système d’économie planifiée hérité des années Nasser ». C’est une des raisons, selon lui, pour lesquelles le taux de croissance égyptien est bien loin des 8 à 10 % de certains autres pays en développement de par le monde. En libéral, il ajoute que « l’espoir d’un peuple réside dans le taux de croissance ». Et en dessous de 4 %, pas d’espoir ! Et c’est ce qui mène à la révolution …

Deuxième nuisance inhérente à l’économie égyptienne : le poids des paperasses et de la bureaucratie. Une étude a ainsi montré que pour ouvrir une boulangerie en Egypte, il fallait compter à peu près deux ans de formalité administrative : un frein majeur à l’entreprenariat. Certes, les formalités doivent être allégées et se faire de manière plus transparente. Mais l’exemple du pain est mal choisi. Il fait partie de ces produits possédant un statut particulier dû, notamment, à la faiblesse de la production de blé en Egypte en comparaison à la demande. Sans subventions et sans contrôle étatique sur le pain, personne n’est en mesure de prévoir les conséquences sociales provoquées par la flambée des prix ainsi soumis aux lois de l’offre et la demande. Le pain est l’exemple même de produits qui doivent rester sous le giron de l’Etat, simplement pour des questions d’intérêt public.

Sorman a achevé sa vision de l’économie égyptienne en souhaitant voir disparaître l’économie informelle. « C’est parce que Mohamed Bouazizi n’avait pas de papier l’autorisant à exercer son métier que la révolution tunisienne a commencé », dit-il. Il ajoute que si Bouazizi avait été en règle, rien ne se serait passé. Pour éviter ce genre d’épisode tragique, il faut supprimer l’économie informelle. L’analyse n’est pas fausse mais elle est simpliste. Bouazizi s’est suicidé car on lui avait confisqué son outil de travail. C’est justement que l’Etat tunisien lui reprochait de ne pas avoir de papiers pour son commerce. Si la police l’avait laissé tranquille dans son « informalité » il n’aurait peut-être pas commis son dernier geste tragique. C’est en souhaitant imposer à cet homme des papiers — et donc des règles formelles — que la police tunisienne a provoqué l’irréparable. C’est en souhaitant supprimer l’informel que la révolution tunisienne a commencé et il serait une erreur de considérer que la cause est l’informalité et non la volonté de la supprimer.

« La sortie de l’économie informelle est une nécessité en Egypte », affirme Sorman. C’est bien mal connaître les opportunités de commerce qu’a fait naître l’absence de règle. Le cas des chiffonniers est ici un exemple flagrant, tout comme l’étaient leurs élevages « informels » de porcs. Le libéralisme c’est le laisser-faire, les règles sont ses limites. Les deux sont, pour Sorman, nécessaires. Pourtant, seule une analyse détaillée d’une économie nationale peut permettre de fixer une frontière adéquate entre les deux.

Alban de Ménonville

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