Histoire .
L’échec de la monarchie égyptienne (1942-1952) est un
intéressant ouvrage de deux volumes qui vient d’être publié
par l’Institut Français d’Archéologie Orientale (IFAO) du
Caire.
Le renversement de la monarchie
La décennie 1942-1952 est une partie très importante de
l’histoire moderne de l’Egypte. C’est le moment de la prise
de conscience, par la fraction en mutation du corps social,
de l’inadéquation du pouvoir avec la société. L’explosion
démographique, le développement du phénomène urbain et la
modernisation de l’Egypte engagée au XIXe siècle ont fait
émerger de nouvelles catégories sociales (classe ouvrière et
classe moyenne formée à l’occidentale) qui remettent en
cause l’ordre social traditionnel, fondé sur la propriété de
la terre. Le pouvoir politique est, par contrecoup, atteint
par ces évolutions : élément et expression de l’organisation
sociale, il est interpellé et affronté.
Le premier volume de ce livre d’Anne-Claire de
Gayffier-Bonneville traite cette
partie importante de l’histoire égyptienne en appuyant sur
la prise en conscience des inégalités sociales, d’une part,
et le pouvoir politique égyptien qui ne répond pas aux
aspirations de la société d’autre part. On pensait à
l’époque que la classe politique était éloignée du reste de
la société. La personne du souverain ne s’est pas, seule,
attiré la défaveur populaire ; le pouvoir politique, dans
toutes ses composantes, pâtit de n’avoir pas su emporter
l’adhésion de la société égyptienne. Les nouvelles
catégories sociales urbaines contestent le pouvoir politique
qui est l’expression d’un ordre social très inégalitaire, en
corrélation avec les structures foncières du pays. Comme les
élections, faussées par le clientélisme dans les campagnes,
voire truquées, ne leur permettent pas d’exprimer leur
mécontentement, elles pratiquent l’abstention, adhèrent à
des mouvements contestataires et parfois recourent à la
violence. « La politique menée depuis la fin de la seconde
guerre mondiale n’a pas satisfait les attentes du peuple
égyptien ; la classe dirigeante est très souvent apparue
comme plus dévouée à ses intérêts propres qu’à ceux du pays
; les institutions démocratiques,
enfin, sont rendues responsables de l’accession à la
direction du pays de personnalités décevantes politiquement
et de moralité équivoque », explique l’auteur. Agrégée,
docteur en histoire et diplômée d’arabe, l’auteur du livre,
Anne-Claire de Gayffier-Bonneville,
est maître de conférences en histoire contemporaine. Ses
travaux portent surtout sur l’Egypte et le Soudan au XXe
siècle.
Le deuxième volume du livre aborde le mécontentement social
du pouvoir, les scandales et la corruption de la classe
dirigeante, ce qui a causé des
affrontements violents entre le pouvoir et le mouvement
communiste. La conséquence était donc le rejet du pouvoir,
la fuite du roi, l’incendie du Caire et la Révolution.
Le 26 juillet 1952, le roi Farouq
quittait l’Egypte à bord de son yacht après avoir abdiqué en
faveur de son fils. L’irruption, trois jours auparavant, des
officiers libres sur la scène politique égyptienne l’avait
contraint à cette extrémité. L’abdication de
Farouq scellait l’échec de la
première expérience de démocratie parlementaire de type
occidental en Egypte.
Amira
Samir