Révolte .
Deux de nos fidèles lecteurs comparent la révolte arabe à un
tsunami et s’interrogent si les dictateurs d’hier seront les
démocrates de demain.
Un tsunami déferle sur le monde arabe
Tous les rois et chefs d’Etat arabes ont perdu leur sommeil
en voyant le raz-de-marée qui a emporté Ben Ali et Moubarak.
Tous ces régimes qui gouvernent d’une main de fer et qui se
croient propriétaires éternels de leur pays, alors qu’ils ne
sont que des « tigres en papier », pour reprendre le terme
de Mao Tsé-Toung, sont
aujourd’hui sur des charbons ardents. Dans tous ces pays
arabes où les peuples veulent en finir avec leurs
tortionnaires, l’on assiste à un changement à bâtons rompus
dans les discours des dirigeants. Chaque dirigeant au
pouvoir espère être épargné par le tsunami et prend
l’initiative de faire des réformes. Il a fallu donc des
centaines de morts et des milliers de blessés (en Tunisie et
en Egypte) pour que ces « tortionnaires » acceptent
d’instaurer la démocratie, alors qu’ils étaient sourds aux
appels de détresse de leur peuple qui souffre depuis des
années. De qui se moque-t-on ? Peut-on croire que les
dictateurs d’hier puissent devenir des démocrates
aujourd’hui ou demain ?
Après les Tunisiens et les Egyptiens, les Yéménites et les
Syriens sont en train de changer leur système politique,
voire de leurs sociétés. A qui sera le tour dans les jours,
les semaines ou les mois à venir ? C’est difficile de
répondre à cette question puisque le tsunami est
généralement imprévisible et prend de court toutes les
prévisions. Mais on peut imaginer que tous les dictateurs
sont en train de préparer leurs valises, car al-rahil
(le départ) est inéluctable pour eux tôt ou tard. Les
peuples veulent s’émanciper et pouvoir choisir
démocratiquement ceux qui les gouvernent. Ils veulent vivre
librement et dignement. Ils veulent un pouvoir qui instaure
la justice pour tous. Ils ne veulent plus que leurs
richesses soient dilapidées par des voleurs au pouvoir qui
n’ont aucune gêne à vivre dans l’opulence, alors que la
majorité du peuple vit en dessous du seuil de pauvreté.
Enfin, ils veulent vivre dans un système politique et social
juste, où les richesses nationales sont réparties
équitablement sur l’ensemble des citoyens.
L’Histoire nous a appris que la lutte des peuples gagne à la
fin et que la victoire des peuples est irréversible. Que le
combat pour l’émancipation des peuples arabes continue
jusqu’à la victoire finale, car les droits ne se donnent pas
mais s’arrachent !
Chérif Boudelal,
France.
Kadhafi, néron de la Libye
Je n’arrive plus à comprendre ce qui se passe en Libye.
Comment un président peut-il devenir l’ennemi de son peuple
? C’est vrai qu’il s’agit de Mouammar Al-Kadhafi, considéré
longtemps comme une personne controversée et dotée d’un
caractère incompréhensible, et surtout instable. Mais la
stratégie qu’il mène avec les Libyens est inadmissible. Deux
jours après le début de la « guerre » entre l’opposition et
l’armée loyaliste libyenne, soutenue par des mercenaires
venus d’Afrique, une anecdote a été lancée selon laquelle
Kadhafi aurait dit à ses partisans que le jour où il fut
président, la population libyenne était de 2 millions
d’habitants et le jour où il quittera le pouvoir, la
population sera aussi de 2 millions d’habitants (ndlr : la
Libye compte aujourd’hui 7 millions d’habitants). Une
plaisanterie qui, malgré sa banalité, décrit parfaitement
l’esprit de Kadhafi. Malgré mes soucis, quant à une
ingérence de certains pays dans les affaires internes de la
Libye, je pense que c’est la seule solution logique pour
mettre fin à cet enfer. Je pense que la tyrannie de Kadhafi
a dépassé celle de Néron qui, prisonnier de sa folie, a
incendié Rome.
C’est vrai autant pour Kadhafi que pour tout autre tyran, le
pouvoir procure un certain éclat, mais l’injustice ne dure
jamais longtemps.
Nermine
Zaki,
Alexandrie.
Une vidéo inouïe
L’une des vidéos sur YouTube a
récemment eu un succès incomparable. Raison : on y voit un
comité national tunisien en train d’évaluer la fortune de
l’ex-président Ben Ali.
Lorsque mes amis m’ont parlé de cette vidéo, je ne les ai
pas crus. je n’ai jamais imaginé
qu’il pouvait y avoir une incarnation de l’histoire de Ali
Baba et les 40 voleurs, seulement que cette fois-ci, Ali
Baba était lui-même le voleur.
La vidéo commence par une présentation de quelques meubles
très chics ; quelques secondes plus tard, on voit que ces
meubles et ces armoires contiennent des liasses de billets
qui portent le cachet de la Banque Centrale de Tunisie.
Personne n’y a touché sauf monsieur le président.
Comme dans les films américains de mafieux, M. Ben Ali
possédait une bibliothèque qui, à première vue, paraît
pleine de livres et de documents. Mais il s’avère que ce
n’est qu’un coffre-fort de plusieurs milliers de billets de
dollars et d’euros. Un des membres du comité, tenant à la
main un paquet d’euros, l’a estimé à un million de dinars
tunisiens.
Tout cela sans compter les bijoux appartenant à
l’ex-première dame tunisienne et les cadeaux fastidieux
offerts à la famille de Ben Ali durant ses mandats de
président.
Pendant quelques nuits, j’ai souffert d’une certaine
insomnie causée par cette vidéo, non pas à cause des choses
incroyables que j’ai vues, mais parce que je n’arrivais plus
à comprendre comment des responsables et des chefs d’Etat de
ce monde pouvaient vivre dans une telle aisance pendant que
leurs peuples sont plongés dans les souffrances ! En fait,
le président est en premier lieu un serviteur de l’Etat et
du peuple. Ainsi étaient les principes de la révolution
française. Mais peu à peu, tout cela a été oublié et
aujourd’hui, c’est surtout pour faire fortune que l’on
cherche à devenir président.
Mona Hassan,
Le Caire.
Que les corrompus soient jugés
J’aimerais remercier toute l’équipe d’Al-Ahram
Hebdo qui a fait une couverture remarquable de la révolution
du 25 janvier. Mais permettez-moi de débattre avec tous les
lecteurs de cette question restée sans réponse : Pourquoi
tout ce retard dans la réalisation des revendications de la
révolution, notamment celles ayant un rapport avec le
jugement des grands corrompus ? Pourquoi provoquer de
nouveau la colère du peuple qui a offert la vie de ses
enfants, morts en martyrs sur la place
Tahrir, pour retrouver sa liberté et sa dignité ?
Pourquoi donner le temps aux grands voleurs et aux éléments
corrompus de la Sécurité de l’Etat de s’organiser de nouveau
et constituer un vrai danger pour l’Egypte ? Notre peuple
égyptien est connu pour sa bonté, mais « Il faut se méfier
de l’eau qui dort », comme dit le proverbe. Je voudrais
lancer un appel au Conseil suprême des forces armées, le
priant de traduire en justice les grands voleurs qui ont
acquis leurs fortunes de manière illégale, afin que le
peuple sente véritablement que l’Egypte est au seuil d’un
tournant historique après la révolution bénie du 25 janvier.
Mohammad Achraf,
Mansoura.