Somalie. Les rebelles
islamistes ont lancé une nouvelle offensive anti-gouvernementale. Les combats
se poursuivent depuis plus d’une semaine et promettent de traîner en longueur.
Scénario à répétition
La
violence a repris de plus belle cette semaine en Somalie entre les insurgés
Shebab et les forces gouvernementales soutenues par les troupes de l’Union
africaine (Amisom). Un scénario à répétition à l’origine de l’instabilité et
l’insécurité chronique de ce pays ravagé d’une longue guerre civile et des
conflits ethniques toujours sans issue. « En Somalie, ce genre d’affrontements
reprend périodiquement pour plusieurs raisons. Les rebelles (les insurgés
Shebab) veulent avoir leur place au sein du gouvernement. Et tant que les
autorités ne répondent pas à leurs revendications, la guerre se poursuivra. Ils
ont un but et ils insistent à l’atteindre », explique le Dr Ibrahim
Abdel-Razaq, analyste au Centre des études africaines au Caire. Et d’ajouter :
« En plus, ils se sont soutenus par des mouvements étrangers. A chaque fois
qu’ils stoppent les combats, ils ont un seul objectif : prendre haleine,
récolter des aides financières, des équipements, recevoir des entraînements et
recruter de nouveaux membres et ce pour reprendre leur mission ».
Ce qui
se passe sur le terrain confirme cette analyse. Cette fois-ci, les Shebab,
faisant usage d’armes lourdes et de batteries antiaériennes en tirs tendus,
tentent notamment de prendre le contrôle d’une route stratégique dans
Mogadiscio. Les combats actuels entre les rebelles islamistes et les forces
gouvernementales somaliennes, qui ont éclaté depuis lundi 23 août, ont provoqué
la mort de plus de 80 personnes, dont des civils. D’où la fuite d’une centaine
de Somaliens qui ont quitté Mogadiscio ces derniers jours, essayant de trouver
un refuge.
Les
Shebab, qui se réclament d’Al-Qaëda et contrôlent une grande partie de la
Somalie, concentrent leurs attaques sur le dernier axe stratégique tenu à
Mogadiscio par les gouvernementaux et l’Amisom. La route Maka Al-Mukarrama est
la seule voie de circulation et d’approvisionnement reliant l’aéroport
international à Villa Somalie, le palais présidentiel. « Des militants soufis
pro-gouvernementaux se sont retirés de leurs positions, mais nous avons
renforcé le secteur avec des unités lourdement armées et la situation est
maintenant sous notre contrôle », a déclaré à l’AFP Mohamad Adan, un
responsable gouvernemental de la sécurité. « Les tirs se sont poursuivis
sporadiquement et les militants islamistes essaient ardemment d’atteindre la
route Maka Al-Mukarrama, mais je peux vous assurer qu’ils n’y arriveront jamais
», a-t-il poursuivi.
En
revanche, les Shebab ont revendiqué des avancées sur le terrain. « Nous avons
avancé dans les lignes ennemies et pris le contrôle de leurs casernes près de
Maka Al-Mukarrama. Je veux vous dire, aujourd’hui, que cette guerre va en finir
avec le régime apostat et les envahisseurs africains », a déclaré samedi à la
presse le porte-parole des insurgés, Sheikh Ali Mohamoud Rage. « Nous les avons
affaiblis et forcés à reculer, l’unique route qu’ils contrôlaient est devenue
notre ligne de front. Nous l’avons coupée et nos combattants vont continuer à
avancer », a-t-il ajouté. Affirmant les mêmes déclarations, le porte-parole
militaire des Shebab, Sheikh Abdiaziz Abu-Muscab, a expliqué qu’ils ont lancé
cette vaste offensive, baptisée « opération éliminer les apostats », pour
occuper des points importants et limiter de plus en plus le contrôle des
autorités gouvernementales.
Depuis
le lancement de leur offensive contre le Gouvernement fédéral de transition
(TFG) en mai 2009, les Shebab ont considérablement réduit la zone contrôlée par
le TFG, qui bénéficie du soutien des Nations-Unies, à quelques quartiers du sud
de Mogadiscio. Les Shebab tiennent l’essentiel du centre-sud de la Somalie. A
Mogadiscio, les 6 000 soldats ougandais et burundais de l’Amisom, déployés dans
des secteurs stratégiques comme l’aéroport, le port, la présidence et
d’importants carrefours, sont le dernier rempart empêchant les Shebab de
prendre le contrôle total de la capitale somalienne. Pour les aider,
l’Ethiopie, dont les troupes avaient occupé la Somalie de 2006 à 2009, a évoqué
début août un possible retour dans « l’hypothèse improbable » où l’Amisom
aurait besoin d’être secouru pour la stabilité dans la région, l’Ethiopie a
appelé à la « destruction des Shebab et de leurs combattants étrangers qui ne
cessent de semer la mort et le chaos ».
En
première réaction à ces paroles, le gouverneur Shebab de la capitale, Ali
Mohamad Hussein, a appelé la population à soutenir le « djihad en cours et à
fournir armes et argent aux moudjahidin » annonçant par ailleurs l’arrivée sur
le champ de bataille de 500 nouveaux volontaires. Les Shebab, qui se réclament
d’Al-Qaëda et de son idéologie du djihad mondial, lancent régulièrement des
attaques contre le TFG et l’Amisom à Mogadiscio. Ces attaques modifient
rarement le rapport de forces, presque inchangé depuis la mise en place en
janvier 2009 du TFG du président Sheikh Sharif Ahmed, soutenu à bout de bras
par la communauté internationale.
Maha Salem