La
grande prison
Les jours se suivent et se
ressemblent, dit-on. Pour la question palestinienne et
l’aspect inhumain que réservent les Israéliens à la
population en Cisjordanie et Gaza, les faits se
ressemblent certes, mais gagnent en ampleur jour après
jour. Il suffit de relever les plus récentes
informations pour s’en rendre compte. L’allégement du
blocus de Gaza n’est qu’une formalité, juste des paroles
pour tenter d’apaiser la tempête née de l’affaire de la
flottille. Pour la Cisjordanie et Jérusalem-Est, la
poursuite de la colonisation est un fait en dépit du
moratoire, toujours d’ailleurs pas réel, une fiction en
quelque sorte, puisqu’il maintient le principe même de
la colonisation qui est en lui-même illégal. Un des
derniers exemples est celui d’un village, Al-Walajah,
dans le sud de la Cisjordanie promis à l’encerclement
total par le mur israélien. Un des propriétaires
palestiniens cités, Omar Hajaj, montre le futur tracé de
la barrière qui transformera sa maison en « cage de zoo
». Il ne s’agit pas d’image, mais une des réalités des
comportements israéliens et de l’idéologie sioniste,
surtout l’extrême droite pour laquelle il faudrait soit
se débarrasser des Palestiniens soit les enfermer dans
des sortes de bantoustans. Les travaux sur cette partie
inachevée de la barrière israélienne ont repris en avril
après plusieurs années d’interruption.
Hajaj raconte qu’il a reçu
un appel des ministères de l’Intérieur et de la Défense
pour leur fixer un rendez-vous chez lui. Le jour même,
Hajaj, dont la terrasse offre une vue unique sur
Jérusalem et le quartier de colonisation de Gilo, a été
informé qu’il y aurait une barrière électronique de 15
mètres de long et 5 mètres de haut entre le mur et sa
maison qui se situera du côté « israélien », coupée du
village. « Ils lui ont dit qu’on autorisera les visites
de famille et des amis, mais qu’il devrait répondre
d’eux. Il y aura deux portes pour sortir, mais elles ne
devront jamais être ouvertes en même temps ». Le
témoignage recueilli par l’AFP fait penser plutôt à un
film sur le totalitarisme qu’à un fait réel. Mais c’est
la réalité pure et dure de la mentalité coloniale
israélienne que rien ne semble pouvoir arrêter. La
barrière sépare les vivants, mais aussi les morts. Ahmad
Saleh Barghouth, agriculteur sexagénaire, attend le 25
juillet une décision de la justice israélienne sur son
recours pour que la barrière contourne la partie de son
verger où reposent ses parents et sa grand-mère. Al-Walajah
se targue d’abriter le plus vieil olivier de Palestine,
un arbre noueux de 5 000 à 7 000 ans. Mais la
perspective de la construction du mur menace l’existence
même de la localité. « Le mur est l’une des
manifestations les plus laides de la colonisation », a
affirmé le principal négociateur palestinien Saëb Erakat
dans un communiqué publié à l’occasion de l’anniversaire
de l’avis de la Cour Internationale de Justice (CIJ) du
9 juillet 2004, jugeant sa construction illégale et
exigeant son démantèlement. Mais Israël lui défie toutes
les formes de justice et il continuera de le faire face
aux molles réactions de l’Occident.