Faits
divers .
La tuerie provoquée
par un chauffeur de l’entreprise
Arab Contractors, qui a tué 6 de
ses
collègues de travail et en a
blessé 16 autres,
alimente des interrogations
sur la violence
sociale en
Egypte.
L’acte
fou d’un
homme sans histoires
Comme
à son habitude,
Mahmoud
Taha Soweilam, chauffeur
à
l’entreprise Arab Contractors
depuis 25 ans,
effectue sa
tournée
matinale pour le ramassage
des employés de
l’entreprise
vers leur
lieu de travail à la
cité du
6 Octobre,
où se trouve un des
locaux de
l’entreprise. Arrivé
à 200
mètres des locaux de
l’entreprise,
Mahmoud
arrête soudainement son
véhicule, sort
un fusil
automatique et se met à
tirer
anarchiquement sur les
occupants du bus en
hurlant.
L’incident survenu le 6
juillet a fait 6
morts et
16 blessés. Le
reste de
l’histoire
est digne d’un
film de Hollywood. L’homme se
met à hurler avec
frénésie. «
On ne se
fout pas de la gueule
d’un Saïdi ».
L’un des occupants
du bus se rue
sur lui
et tente
de le maîtriser.
Heureusement,
il
n’y avait
plus de balles
dans le fusil.
L’homme
est
maîtrisé et enfermé
dans un lieu
proche en attendant
l’arrivée de la police.
A
l’intérieur du bus, six
corps gisaient
dans un
bain de sang. L’auteur
du drame
affirmera à
la police : «
J’ai
défendu ma dignité.
Ils
se sont
payés ma tête.
Je
ne regrette
pas ce que
j’ai fait et
j’attends la mort sans
crainte ».
Vengeance ou coup de
folie
?
Ce
drame
alimente bien
évidemment les interrogations. D’autant
plus que
Mahmoud
Taha Soweilam
était un
employé sans histoires. «
On le connaît
depuis très
longtemps,
il
était toujours
assidu dans
son travail et n’a
jamais
manifesté de signe
d’instabilité »,
explique
Mohamad Al-Nomeiri, qui
se trouvait
dans le bus au moment de
l’incident. Et
d’ajouter
: « Le jour du
drame, et
contrairement à son
habitude, il
était en retard de 10 minutes.
Son visage était
tendu.
Avant
d’entamer son acte
fou,
il a
appelé 3 employés,
puis il
a commencé
à tirer au
hasard dans
toutes les directions ». Les
responsables de
l’entreprise Arab Contractors
affirment
que Soweilam
avait une
bonne
réputation et
n’a jamais
eu de
problèmes avec qui que
ce soit.
La direction de l’entreprise a
décidé
d’indemniser les familles
des victimes en versant 20 000
L.E. à
chaque famille qui
compte un
mort dans
ses rangs et 5 000 L.E.
pour les blessés.
Lors
de l’enquête,
Soweilam a
déclaré que
certains de
ses
collègues se moquaient de
lui et du
fait qu’il
était un Saïdi (habitant
de la Haute-Egypte).
« J’en
avais marre
que l’on
se moque de
moi », a-t-il
dit lors
de l’enquête. Et
d’expliquer
que le quartier
dans lequel
il
habite
était réputé pour
contenir des
antiquités.
Des ingénieurs de la
compagnie Arab Contractors, en
accord avec les habitants, effectuaient
des fouilles
clandestinement
dans le
quartier. « Les
murs de ma
maison ont
été
fissurés à cause de
ces
fouilles.
J’ai
décidé
alors de porter plainte.
Une commission
est
venue et les fouilles
clandestines
ont cessé.
Mais
quelque temps après,
elles ont
repris. Les
ingénieurs d’Arab
Contarctors,
ils
étaient
trois, ont mal
pris le fait
que j’ai
porté
plainte. Ils
se sont mis
à se moquer
de moi.
Ils
disaient la maison
du Saïdi
va
s’écrouler. Je
n’ai pas
supporté », a
affirmé
Soweilam au Parquet. Il
s’agit donc,
a priori, d’un acte de vengeance
qui a pris des dimensions
disproportionnées.
Le « facteur explosion »
Azza
Korayem,
sociologue au Centre national des
recherches
sociales et
criminelles, place
cet acte
dans le
contexte plus large de la violence
sociale qui
s’exprime de manière plus
prononcée en
Egypte
depuis quelques
années. « Le
phénomène de la violence
s’est
propagé dans la
société
égyptienne dans les
récentes
années en raison des pressions
économiques
et des injustices sociales,
ce qui
donne lieu à des
frustrations », affirme
Korayem. Et
d’ajouter que la
corruption et
l’absence de justice
étatique
sont d’autres raisons de
ce
phénomène. « Cette
frustration se manifeste par des
actes
violents comme les
meurtres,
mais aussi les suicides
dont le
taux a
augmenté en
Egypte », lance la sociologue.
Et de
rappeler cet
homme
d’affaires, qui avait
tué il
y a quelques
mois sa
femme et ses
deux
enfants après avoir
perdu de
l’argent à la Bourse.
Mahmoud
Soweilam a décidé de se
faire justice lui-même, car
il
avait
visiblement perdu tout
espoir. Si
l’incident de
l’entreprise
d’Arab Contractors
n’a pas encore
livré tous
ses
détails, il
y a un trait commun
entre cet
incident et d’autres
actes
traumatisants qui ont
eu lieu au
cours des récentes
années,
c’est le facteur
explosion. « Un
nombre croissant d’Egyptiens
sont
frustrés mais
retiennent
leur colère pendant
longtemps, et tout d’un coup,
ça explose
», pense le
sociologue Mohamad Al-Mahdi.
Un
autre point important se
rapporte à
l’arme
utilisée. D’où
Soweilam a-t-il
pu se procurer
une arme
automatique
? L’intéressé a
dit que
les gens de Haute-Egypte
ne trouvent
aucune
difficulté à se procurer
des armes.
C’est là encore
un autre
dossier à
étudier.
Ola Hamdi