Guinée.
Le second tour de l’élection présidentielle, initialement
prévu le 18 juillet, a été reporté à une date indéterminée,
menaçant le pays de se plonger dans l’instabilité et
l’insécurité.
Le
second tour reporté
Après
l’euphorie suscitée par la présidentielle du 27 juin, perçue
comme un premier pas important vers une démocratisation de
la Guinée, les espoirs semblent, à l’heure actuelle, se
dissiper, et l’instabilité plane sur la vie politique
guinéenne. En effet, le second tour de l’élection
présidentielle, initialement prévu le 18 juillet, a été
reporté à une date indéterminée, repoussant de facto la
remise du pouvoir des militaires aux civils, après un demi-siècle
de dictature. Ce report, annoncé vendredi dernier par un
responsable de la Commission Electorale Nationale
Indépendante (CENI), intervient quelques jours après la
menace de démission du président de la transition, le
général Sékouba Konaté. « Cela ne sera plus le 18 juillet
maintenant (que sera organisé le second tour, ndlr). On est
en train de voir, d’approcher la Cour suprême, pour fixer
une nouvelle date », a déclaré à l’AFP Pathé Dieng,
directeur des opérations à la Céni. M. Dieng n’a pas donné
de raisons officielles pour justifier ce délai. Recours des
partis politiques.
La Cour suprême reçoit
actuellement les recours des partis politiques sur lesquels
elle doit statuer. Elle annoncera, la semaine prochaine, les
résultats définitifs et fixera une date pour le second tour.
D’abord, la Cour suprême a huit jours pour recevoir les
recours des partis politiques engagés dans la course pour la
magistrature suprême. Ensuite, la Cour suprême a trois jours
pour statuer. Selon la loi électorale, le second tour de la
présidentielle doit avoir lieu 14 jours après la
proclamation des résultats définitifs du premier tour. C’est
au vu de ces résultats que la Céni va saisir le président de
la transition pour que ce dernier prenne un décret de
convocation des électeurs. Et ce scrutin devra être précédé
de 14 jours de campagne électorale. Les élections étant
traditionnellement organisées un dimanche, le second tour ne
pourra donc pas avoir lieu avant le dimanche 1er août, soit
au cœur de la saison des pluies. Les fortes pluies devraient
compliquer, en raison du mauvais état des infrastructures
routières, les déplacements lors de la campagne et le jour
du scrutin ainsi que l’acheminement des résultats. Le 27
juin, plus de 3 millions de Guinéens avaient participé au
premier tour de ce scrutin historique, considéré comme la
toute première élection présidentielle libre depuis
l’indépendance du pays en 1958, après une alternance de
dictatures, civiles puis militaires.
Le second tour devrait
opposer l’ex-premier ministre Cellou Dalein Diallo et
l’opposant de toujours Alpha Condé si la Cour suprême
confirmait les résultats provisoires publiés le 3 juillet.
Sydia Touré, le président de l’Union des Forces
Républicaines (UFR), arrivé 3e lors du scrutin du 27 juin
dernier avec 15,6 % des voix, revendique la deuxième place
d’Alpha Condé (20,67 % des suffrages). Son objectif :
affronter le candidat de l’Union des Forces Démocratiques de
Guinée (UFDG) victorieux Cellou Dalein Diallo (39,72 %) lors
du second tour prévu le 18 juillet prochain. « Des
irrégularités de toutes formes et les résultats de plusieurs
bureaux de vote et circonscriptions électorales ont été
manipulés en faveur du Rassemblement du Peuple de Guinée
(RPG) d’Alpha Condé », s’insurge Sydia Touré dans un
communiqué.
Le candidat accuse la Céni
d’avoir œuvré en sous-main « pour éviter de mettre en colère
les deux plus grandes tendances ethniques du pays (les Peuls
et les Malinkés) ». Ces résultats sont cependant contestés,
notamment par des partisans de l’ex-premier ministre Sidya
Touré, arrivé en troisième position. M. Touré a affirmé
qu’il y avait eu « bourrage d’urnes » et a accusé la Céni
d’avoir fait en sorte qu’Alpha Condé obtienne la seconde
place, en connivence avec le général Konaté qui préside la
transition vers un régime civil. Le général avait menacé de
démissionner, se disant très « peiné » par des propos «
offensants » de manifestants l’associant à des fraudes.
Depuis, il a reçu successivement les visites à Conakry du
président de la Commission de l’Union Africaine (UA), Jean
Ping, et du président malien, Amadou Toumani Touré, qui lui
ont instamment demandé de rester jusqu’à la fin de la
transition. Le président Touré a notamment déclaré, à
l’attention du général Konaté, que « la meilleure manière de
partir », c’était « de finir la mission » qui lui avait été
confiée. « L’Afrique et l’Histoire nous regardent, et nous
faisons en sorte qu’au-delà de nos intérêts propres, ce soit
une partie qui gagne, et cette partie, c’est la démocratie
», a-t-il conclu. La communauté internationale suit avec
attention ces élections. La France a appelé les « acteurs de
la vie politique guinéenne à préparer le second tour » de la
présidentielle « dans le respect des règles démocratiques ».
Avis partagé par le président américain Barack Obama, qui a
appelé « toutes les parties en présence à continuer à
privilégier les règles du droit et de la participation
politique pacifique plutôt que les divisions et les
violences ethniques ».
Maha
Salem