La ministre de la main-d’œuvre, Aïcha Abdel-Hadi, évoque la politique du gouvernement face à la multiplication des mouvements de protestation ouvrière, ainsi que les plans d’emploi des jeunes.

« Nous avons résolu 80 % des litiges ouvriers »

Al-Ahram Hebdo : L’Egypte connaît un mouvement politique sans précédent, accompagné d’une vague de protestations et de sit-in ouvriers. Que faites-vous pour y faire face ?

Aïcha Abdel-Hadi : Certains courants politiques tentent de pousser tous les jours les ouvriers au sit-in devant le Parlement. Ce qui influe sur le marché du travail et la production nationale. En effet, les protestations ouvrières depuis le début de l’année ont atteint près de 26 cas effectués par 9 000 ouvriers dans 5 gouvernorats Le Caire, Charqiya, Gharbiya, Ménoufiya et Alexandrie, à cause de la présence d’un grand nombre d’usines à forte densité ouvrière. 15 cas ont eu lieu dans le secteur privé et 5 dans le secteur des affaires. Ces affaires ont compris 10 cas d’absence de travail qui n’ont pas atteint le niveau de grève organisée, en vertu de la loi du travail de 2003. Neuf cas dans le secteur privé, ce qui représente un taux de 0,0003 %. Il y a eu 10 cas de sit-in sur les lieux de travail après les horaires de travail, 6 cas dans le secteur privé, soit 0,0002 % de l’ensemble des usines dans ce secteur sur tout le territoire et 4 cas dans les institutions du secteur des affaires, avec un taux de 0,001 % du total des institutions dont le nombre s’élève à 2 2502. Le ministère a réussi à résoudre 80 % de ces litiges grâce au dialogue et à l’application des mécanismes de négociations collectifs entre les ouvriers et les administrations de ces sociétés. Les accords, qui ont été conclus sous le parrainage du ministère, ont réalisé la majorité des demandes des ouvriers qui se sont axés sur le versement des salaires en retard, ou concernant la part des ouvriers dans les profits et des primes réguliers, l’augmentation du fonds des assurances médicales et l’amélioration des soins médicaux.

— Le gouvernement est accusé de ne pas faire assez pour défendre les droits des ouvriers. Qu’en dites-vous ?

— Le gouvernement, représenté par le ministère de la Main-d’œuvre, soutient les ouvriers et leurs demandes et œuvre à préserver leurs droits. Les derniers mois ont témoigné de larges mouvements au sein des ouvriers. Le ministère est intervenu pour résoudre de nombreux conflits à travers l’ouverture de canaux de dialogue entre les ouvriers et les patrons en prenant les mesures juridiques, en présentant des plaintes auprès du procureur général contre un nombre limité de patrons pour résoudre les problèmes qu’il a été impossible de résoudre par les moyens pacifiques et le dialogue, comme ce fut le cas dans les compagnies Tanta pour le lin, celle des équipements téléphoniques, Al-Noubariya pour les machines agricoles … Des courants politiques se trouvent derrière les ouvriers qui font grève sur les trottoirs de l’Assemblée du peuple. En effet, certains courants politiques se trouvent derrière le refus des ouvriers de la Compagnie des équipements téléphoniques de l’offre présentée par le gouvernement, consistant à nommer 300 ouvriers dans la Compagnie des communications et 300 autres dans la production militaire. Une somme sera également allouée à la retraite anticipée. Je pense que toutes ces manifestations ne dureront pas longtemps, car les ouvriers découvriront que ceux qui sont derrière eux ne réaliseront rien et que c’est le gouvernement qui répondra à leurs demandes en vertu de la loi et des demandes légitimes.

— Y a-t-il une coordination avec d’autres ministères et organismes pour résoudre les problèmes des ouvriers ?

— Il existe une étroite coopération entre nous. L’investissement dans tous les pays est lié à la stabilité des conjonctures ouvrière. Les problèmes ouvriers aujourd’hui sont totalement différents de ceux existant dans le passé. Ils sont axés autour de deux sujets fondamentaux, les primes et les conditions de travail. Le gouvernement a toujours tenu à préserver les droits des ouvriers d’Egypte et résoudre les problèmes qu’ils rencontrent.

— Le ministère tente d’ouvrir de nouveaux horizons pour la main-d’œuvre égyptienne à l’étranger. Avez-vous réussi dans cette entreprise ?

Nous accordons un grand intérêt à ce sujet. En effet, pendant les trois premiers mois de cette année, nous avons assuré 127 000 offres d’emploi dans 16 pays. L’Arabie saoudite a accueilli le plus grand nombre d’ouvriers. Le système du tuteur appliqué dans de nombreux pays arabes sera annulé bientôt. De plus, l’immigration illégale a beaucoup diminué grâce au renforcement des mesures de sécurité dans les régions à travers lesquelles les jeunes s’évadaient vers la Libye et la Jordanie, avant de passer en Europe.

— Le ministère a-t-il terminé les arrangements nécessaires à l’envoi d’une main-d’œuvre égyptienne en Italie ?

Oui, nous avons effectivement l’intention d’envoyer 2 500 ouvriers égyptiens en Italie pendant les 4 mois prochains dans le cadre du programme d’emploi de la main-d’œuvre saisonnière en Italie. Le comité envoyé par le ministère en Italie a tenu des rencontres avec des responsables d’institutions agricoles et touristiques. Il ont pu connaître les besoins du marché du travail italien en main-d’œuvre saisonnière dans ces deux domaines. J’ai également rencontré des responsables du ministère italien du Travail pour discuter des conditions de travail, des rémunérations proposées, des papiers requis, des heures de travail et des services sociaux et médicaux qui leur seront présentés. Le ministère recevra les demandes des ouvriers désireux de travailler dans ces deux domaines à travers l’enregistrement des coordonnées sur le site électronique. Un comité italien viendra conclure des contacts avec les ouvriers sélectionnés. La durée maximale de travail sera de 9 mois.

Quels sont les mécanismes mis en place par le ministère pour régulariser la main-d’œuvre étrangère en Egypte ?

Franchement, il y a une bataille entre le ministère et les hommes d’affaires qui veulent apporter une main-d’œuvre étrangère plus compétente et plus efficace que celle égyptienne. Il y a 25 000 étrangers qui travaillent en Egypte dans les secteurs du textile, du pétrole et du tourisme. Nous continuons à effectuer des visites surprises dans les institutions pour nous assurer qu’elles appliquent la loi du travail nº12 pour l’année 2003, de sorte que le taux de la main-d’œuvre étrangère ne dépasse pas les 10 % de l’ensemble du personnel.

  Que fait le ministère pour résorber le problème du chômage en Egypte ?

— De grands efforts sont déployés dans ce domaine. En coopération avec les autres organismes d’emploi, nous œuvrons à assurer des centaines de milliers d’emplois. Il y a de nombreuses offres d’emploi que les jeunes n’acceptent pas. Par exemple, la compagnie Cristal Asfour a présenté 10 000 offres d’emploi dans tous les gouvernorats avec un salaire minimum de 1 000 L.E. Mais personne ne s’est présenté à ces emplois. Il est vraiment décevant que les jeunes veuillent travailler à l’étranger alors qu’il existe de nombreuses offres d’emploi dans les zones industrielles et dans les usines de prêt-à-porter avec des salaires minimums de 800 L.E.

— Et quel est le plan national du ministère pour l’emploi dans les années à venir ?

L’Egypte a commencé cette année à exécuter le plan national de l’emploi des jeunes qui vise à assurer 3,01 millions d’offres de travail pendant les 5 prochaines années avec un coût atteignant 17 milliards de L.E. Ce plan vise à créer des offres d’emploi dans les petits et micro-projets.

Que pensez-vous du niveau de la formation technique et des moyens de la rendre plus performante ?

— Il y a un accord de coopération entre le ministère et le programme de réforme de l’enseignement technique. Cet accord stipule une formation technique continue dans le cadre du rôle du ministère de formuler une politique nationale de formation technique et d’élaborer des projets et des plans de financement de la formation technique. Tout ceci a été effectué en se basant sur un accord de coopération conclu entre l’Union Européenne (UE) et le gouvernement égyptien à Bruxelles le 29 avril 2003 concernant une aide pour la réforme de l’enseignement et de la formation techniques en Egypte. Le but étant d’effectuer un transfert du système central de formation à un autre décentralisé qui prend en considération les besoins du marché du travail dans les secteurs de l’industrie, du bâtiment et du tourisme, afin d’améliorer la compétitivité des industries et productions égyptiennes sur les marchés égyptiens et mondiaux.

Propos recueillis par Magda Barsoum