Ordre
des Avocats.
Un
amendement de la
loi soulève
l’indignation d’un grand
nombre
d’avocats.
Ils dénoncent un
complot du
Parti National Démocrate
(PND, au pouvoir) pour faire
main basse
sur leur corporation.
Les
robes noires en
ébullition
Le
torchon
brûle au niveau de
l’ordre des
Avocats.
Samedi, ils
étaient 500
avocats dirigés par
Montasser Al-Zayat
et le député
Mohamad Al-Omda
à observer un sit-in
ouvert au
siège de l’ordre au
centre du
Caire. Des accrochages
ont lieu avec les forces de
l’ordre qui
voulaient empêcher les
avocats de
sortir dans la rue
afin de faire
une
marche
vers le
Parlement. Les manifestants
scandaient des slogans hostiles
à Ahmad Ezz,
responsable de
l’organisation au PND, et
contre le
bâtonnier Hamdi
Khalifa
ainsi que
contre Omar
Haridi, accusé d’être
l’homme du
PND, à
travers lequel le
parti au
pouvoir veut
mener à
bien son complot pour
monopoliser
l’ordre.
Tout
commence lorsque la commission
des lois
de l’Assemblée
du peuple
approuve un
amendement de la loi
relative à
l’ordre des Avocats.
Cet
amendement, présenté par
des députés
du PND, dont Omar
Haridi, propose de faire passer
le quorum requis pour
retirer la
confiance au bâtonnier
ou au
conseil de l’Ordre de 500
à 5 000
membres. Il
faudra
désormais au moins la
présence de 10 000
membres pour
que les
décisions de l’assemblée
générale
soient valides.
Des mesures
qui visent,
selon les avocats,
à assurer
l’arrivée à
la tête de
l’ordre de Omar Haridi
dans les
meilleures conditions possibles.
Le projet de
loi soulève
une
controverse. D’autant
qu’il
est passé
à la commission des
lois en
catimini et sans que les
avocats ne
soient
consultés. Au
sein de
l’ordre, les réactions
fusent. Le front de
défense de
l’indépendance de l’ordre
dénonce,
dans un communiqué, la
tentative du PND de faire main
basse sur
l’ordre. «
Personne
n’a pris
l’avis des
avocats sur
cet
amendement suspicieux »,
affirme le communiqué.
Plusieurs
milliers d’avocats
menacent
d’organiser un sit-in
ouvert et de marcher
jusqu’au
Parlement si
cet
amendement n’est pas
retiré. «
Cet amendement
transformera
l’ordre des
Avocats en une
véritable
coopérative gérée par le
PND. Il faut
se mobiliser pour
lutter
fermement contre
ce projet
de loi », lance
l’ancien
bâtonnier nassérien
Sameh
Achour. Même son
de cloche chez l’avocat
islamiste
Montasser Al-Zayat, pour
qui cet
amendement
est fait sur
mesure pour
servir les intérêts de
Omar Haridi et des cadres
du PND. « Le PND
veut-il
nationaliser notre
ordre qui a
gardé son indépendance
pendant des
décennies ?
Pourquoi ce
projet a-t-il
été
présenté à la
hâte
? »,
s’interroge Al-Zayat.
Un
complot du PND
Les
avocats
dénoncent donc
un complot
fomenté par le PND sous
la houlette
d’Ahmad Ezz pour
s’accaparer
l’ordre et réduire
l’influence des
Frères
musulmans.
L’actuel
bâtonnier,
Hamdi Khalifa,
également
membre du PND, se
présente aux
élections
du Conseil
consultatif.
Il aurait
reçu le
soutien d’Ahmad
Ezz pour un
siège au Conseil
consultatif.
Mais en
échange, Khalifa
doit
soutenir Omar Haridi,
l’autre
homme du PND,
et œuvrer
pour réduire
l’influence des
Frères
musulmans qui dominent le
Conseil de
l’ordre. Pour les avocats,
cet
amendement
est injustifié.
C’est
ce
qu’estime Tareq Al-Awadi,
avocat
nassérien. Il
s’interroge
: « Pourquoi augmenter le
quorum nécessaire au
retrait de
confiance du
président
ou du
conseil
d’administration ? Si le
législateur a
fixé ce
quorum à 500
membres,
c’est qu’il
a estimé
que ce
nombre
garantit le sérieux de la
procédure ». Pour
Sameh
Achour, cet
amendement vise en premier lieu
à protéger
le bâtonnier
actuel, qui fait
l’objet de critiques de la part
de l’assemblée
générale. «
C’est un complot de
l’Etat
visant à
nationaliser
l’ordre des
Avocats et à le
soumettre au
contrôle du
PND », affirme
Achour. Et
d’ajouter
: « Est-ce par
hasard
qu’on veuille augmenter
ce quorum
alors que des
procédures et
une
campagne de collecte de
signatures se déroulent pour
retirer la
confiance au bâtonnier
actuel ? ». Au contraire,
Hamdi
Khalifa, qui soutient
cet
amendement,
trouve qu’il
est naturel
d’augmenter le quorum
étant donné
l’augmentation
du nombre
d’adhérents
à l’ordre qui
s’élève
désormais à 450 000
membres. « La
loi en
vigueur a
été
promulguée en 1983. A
l’époque,
l’ordre ne
comptait
que 25 000 membres ».
L’amendement
:
le quorum et les critères
Outre
le quorum, l’amendement
modifie les
critères de candidature pour
le poste de
bâtonnier. Selon la
loi en
vigueur, tout candidat
à
ce
poste doit
avoir
exercé le métier d’avocat
pendant au moins 20
années
successives dans
une institution
ou un cabinet non
gouvernemental. Or,
l’amendement
annule
cette condition et
ouvre la
porte aux avocats
travaillant
dans le secteur
gouvernemental pour se
présenter au
poste de
bâtonnier.
Une
mesure qui sied,
selon les
avocats, à Omar
Haridi, qui
ne répond pas aux
critères de la
loi
actuelle. Une
autre
mesure dangereuse
prévue par
l’amendement
: la réduction
du nombre
de sièges
du Conseil de
l’Ordre.
Celui-ci
passera de 46
à 31 sièges.
En effet, les
élections de
l’ordre se
déroulent à
deux
niveaux
: le niveau des
cours
d’appel, où
chaque cour
présente
deux candidats, et le
niveau
général, où des
candidats
indépendants peuvent se
présenter.
L’amendement a annulé les
15 sièges
du niveau
général,
mesure qui vise en premier lieu
à éliminer les
islamistes
et les Nassériens qui
siègent au
conseil. « La plupart de
nos
candidats n’obtiennent
des sièges
qu’au niveau
général,
parce que le
choix des
candidats au niveau des
cours
d’appel est
souvent
dominé par d’autres
calculs. Les
services de sécurité
jouent un grand
rôle dans
le choix des
candidats »,
explique
Mohamad Tosson,
avocat des
Frères musulmans.
Face
à la grogne
des avocats,
Hamdi
Khalifa a
affirmé
dans un communiqué que la
discussion du
projet de
loi sera suspendue
jusqu’à ce
que
l’assemblée générale des
avocats le
discute. « Le but de
ce
projet de loi
c’est
l’intérêt de l’ensemble
des avocats. Il
ne sera pas
discuté au Parlement
avant que
la majorité des
avocats ne
soient
d’accord », a
affirmé
Khalifa.
Mais
ces tentatives
d’apaisement
n’ont pas
réussi à calmer les
esprits. Les
avocats ont
décidé de
poursuivre leur sit-in
jusqu’à
ce
que le projet de
loi soit
entièrement
retiré du
Parlement.
May
Al-Maghrabi