Du
sérieux de
Baradei
Abdel-Moneim
Saïd
Nombre
de mes
confrères et
lecteurs et
même le public présent
à une
conférence
que j’ai
dernièrement
donnée à
Alexandrie
m’ont posé la question
sur la signification de la
nécessité de
parler
sérieusement de et avec Dr
Mohamad ElBaradei.
Certains
pensent
peut-être que
c’était une
accusation adressée
à autrui
de ne pas
prendre la question avec assez
de sérieux.
De mon point de
vue, le
sérieux dont
je parle
signifie
qu’il faut commencer
à traiter
avec Baradei
comme étant
l’un de
nous, puis en
tant
qu’homme politique
monté sur
la scène avec une
pensée
nécessitant une
discussion et un jugement, et un
comportement qui
doit être
évalué. Et
ce, en se
basant premièrement
sur sa
pensée
libérale, et deuxièmement,
sur
l’intérêt du pays.
Jusqu’à
maintenant, Dr Baradei
est
traité
d’une manière
particulière en
tant que
personnalité célèbre,
lauréat du
prix Nobel de la paix et de la
décoration
du Nil. Puis
quand
il a
décidé de s’engager
sur la scène
politique avec un slogan
important, qui est le
changement,
il continue à
être traité
comme
quelqu’un de très
spécial. Ce
slogan suscite
souvent de
grands espoirs,
surtout
quand il
est lié
à la
réalisation d’une
démocratie
complète. Donc, aux
niveaux personnel
et objectif,
la situation du Dr
Baradei
nous rappelle
une pièce de
théâtre
dans laquelle, un bon
matin, un
héros vient en
ville et
veut tout changer, abstraction
faite du fait
que la
ville a besoin de
ce
changement ou non,
ou que
le peuple aspire
à ce
genre de changement
ou non.
Dr
Baradei a
été pris
au sérieux
depuis le début, depuis
qu’il a
annoncé qu’il
était prêt
à déposer
sa candidature aux
prochaines
élections présidentielles.
A condition que le
peuple lui
réclame de le faire,
et si
ce peuple
est prêt à
effectuer les
amendements
constitutionnels pour qu’il
puisse
déposer sa candidature en
tant
qu’indépendant, sans passer par les
procédures
actuellement requises par
la Constitution. Or, cette
logique
implique beaucoup de confusion et
d’équivoque.
Il est
vraiment
étonnant qu’aucun des
partisans ni des
adversaires de
Baradei ne
les ont
découvertes. Ces
réclamations
sont
anticonstitutionnelles,
puisqu’il réclame des
amendements
sur des articles de façon
qui est
elle-même
anticonstitutionnelle. D’un
autre côté,
il
appelle les institutions
actuelles qui se
basent sur
la Constitution à
effectuer
cet amendement
alors qu’il
est
l’unique à le
désirer. Là,
il
devient
difficile de comprendre
si notre
homme
désire faire partie
du régime
ou en sortir
ou bien
le changer. Il n’est pas
ici question de la Constitution
dans les
îles Comores,
mais de la Constitution de 1971,
amendée en 1980, 2005 et 2007,
et d’articles
bien
déterminés qui sont les
articles 76, 77 et 88. Et en
même temps,
ElBaradei ne
parle pas des institutions déjà
existant en
Egypte, au contraire, il
ne
reconnaît pas la légitimité
des lois
actuelles puisque le
pouvoir
lui-même n’est pas
légitime. Comment
donc est-il
possible d’effectuer des
amendements
sur des articles
constitutionnels par
l’intermédiaire d’institutions
qui ne sont
elles-mêmes pas
légitimes,
selon Dr Baradei et
compagnie
?
Pour
être
vraiment sérieux
envers
cette affaire,
il
faut tenter par
tous les
moyens de résoudre
l’équivoque
suscitée par Baradei.
Dès que
celui-ci
était monté
sur la scène
politique,
il
avait proposé
une méthode
par laquelle
il serait
possible d’appliquer un
changement. Et
ce, en
disant que
si par
exemple 10 000 membres de
l’ordre des
Médecins envoyaient des
réclamations pour des
amendements
constitutionnels, et aussi
d’autres
syndicats comme
celui des
Journalistes, des Avocats
et des Ouvriers, etc., le régime
sera obligé de
satisfaire
ces doléances.
Là,
il
n’a fait aucune allusion
aux institutions actuelles. Or,
les syndicats
n’ont pas
répondu à
l’appel et
n’ont
envoyé aucune
pétition
munie de milliers de
signatures à
n’importe
quelle institution chargée
d’effectuer des
amendements. Dr
Baradei est
alors passé
à une
autre
méthode qui est de
réclamer à
ses partisans de
collecter 5 millions de
signatures d’Egyptiens
désirant
effectuer des amendements
constitutionnels pour
qu’il
puisse répondre
à l’appel
des foules et
déposer sa
candidature aux prochaines
présidentielles.
Et selon
des sources proches de
Baradei, les signatures
collectées
n’ont pas dépassé les 2
millions. Et
ce, en sachant
qu’il avait
insisté, et
il en a tout à fait
raison, pour que les signatures
ne soient
pas envoyées par Internet,
mais que
les noms et les
numéros de la pièce
d’identité des
citoyens
soient écrits par le
citoyen
lui-même, comme
une sorte
de procuration
ou de vote. Or, les millions de
citoyens
attendus ne
sont pas
venus et
n’ont pas
signé, et les partisans de
Baradei n’ont
collecté
que 10 000 signatures ou
un peu plus.
Et ce,
malgré le
nombre énorme
d’interviews
effectuées
dans les chaînes
satellites égyptiennes et
étrangères et
l’intérêt
médiatique accordé
à chaque
mouvement
effectué par les partisans de
Baradei, qui se sont
trouvés incapables de
réunir plus de 1 000
personnes
dans toutes les
réunions.
Pour
continuer à
être sérieux
envers Dr
Baradei, il
faut lui
dire que ce
qui importe
n’est pas la légitimité
des institutions égyptiennes,
mais sa
propre
légitimité et celle de
sa
réclamation appelant les
dirigeants
du changement
à se
joindre à
lui.
Partant de la logique
libérale et
nationale, le changement
doit être
effectué à
travers un
processus institutionnel
effectué
dans le pays concerné et
non à
travers une
seule
personne ou un
groupe de
personnes qui prennent
des décisions sans
travailler
sur le sujet avec les
institutions chargées
d’effectuer les
changements,
juste pour
répondre aux demandes
d’un nombre
limité d’individus
alors que
rien ne
prouve que
ceux-ci
représentent le peuple.
Et là,
il est
incorrect de dire que les
citoyens
n’ont pas signé
parce
qu’ils ont
peur ou
que les forces de
sécurité les
ont retenus.
Chaque jour, des manifestations
sont
organisées face à
l’Assemblée
du peuple
et au siège
du
gouvernement. Des chaînes
satellites spécialisées
dans la critique
du régime, des
ministres et
même du
président de la
République
sont légion
maintenant.
Il
y a donc un
problème dans la
légitimité
du Dr Baradei, et un
libéraliste
comme lui
doit en
être conscient.
Si en
Egypte tout peut
être réglé
par les messages et les
signatures, donc les
Frères
musulmans ou
n’importe
quel autre
groupe
fondamentaliste peut
rassembler des signatures
pareilles,
surtout que
certains de
ces groupes
jouissent
d’une grande
popularité au
sein des
Egyptiens.
Ils peuvent
ainsi
appliquer un système
religieux
ou n’importe
quelle
autre pensée
fondamentaliste
actuellement
répandue
dans le pays. Ceci
ne signifie
pas que
Baradei n’a pas le
droit
d’exprimer son avis en
ce qui
concerne les questions
qu’il a
suscitées, au contraire, il
est dans
son devoir de le faire. La différence
ici
est
que le travail à
travers des institutions
reste le
moyen le plus sûr pour
effectuer des
changements,
même si
cela
nécessite plus de temps que
ne le
désire tout le monde.
De plus
qu’il est
évident que
Dr Baradei a tout
à fait le
droit de suivre le
chemin
qu’il désire pour
réaliser
ses objectifs,
que ce
soit par amender la Constitution
ou parvenir
au poste de
président de la République.
Mais en
avançant sur son
chemin,
il
doit tenir aux
principes
libéraux et démocratiques
auxquels il
appelle. Il
ne faut
pas qu’il
reste silencieux
ou qu’il
se contente
du soutien de
quelques
dizaines de personnes qui
veulent
nuire au régime en manifestant
à la place
Tahrir.