ONG. Le gouvernement
est
accusé de vouloir
restreindre
leur champ d’activité par
une nouvelle
loi. Une
démarche susceptible de
neutraliser
leur rôle
lors de la supervision des
prochaines
élections législatives
et
présidentielles.
Un
projet de
loi jugé
liberticide
Un
projet de
loi sur les ONG
serait prêt
à être
adopté
durant la session parlementaire
en cours. Les
grandes
lignes de ce
texte ont
déjà exfiltré,
suscitant
l’inquiétude des activistes
concernés.
Le projet de
loi prévoit
la pénalisation de
toute ONG
opérant sans autorisation
officielle.
Du coup, les
quelque 25 000 ONG
que compte
le pays devront
adhérer à
une sorte
de fédération
contrôlée par le
gouvernement.
Dans
une lettre
de protestation, près de 60 ONG
ont dénoncé
une tentative de les
réduire au silence
à la veille
des élections
législatives
et présidentielles
prévues
respectivement en automne
2010 et 2011. «
Cette démarche
intervient après
l’annulation
du contrôle
judiciaire des
élections en
vertu des
amendements constitutionnels
et le refus
d’accueillir des observateurs
internationaux »,
constatent les
organisations
signataires
du communiqué.
Aujourd’hui,
ce
sont les
ministères de Solidarité
sociale et de
l’Intérieur qui
s’occupent des ONG.
Ils
peuvent
contrôler le choix de
leurs
conseils d’administration,
superviser
leurs sources de financement
ainsi que
leur
coopération avec les associations
étrangères et
s’immiscer
jusque dans les
détails de
leur travail quotidien. «
Dans tout
cela, c’est le
ministère de
l’Intérieur qui a le dernier
mot, celui de la
Solidarité
sociale n’est
qu’une façade », lit-on
dans
ce communiqué.
La
nouveauté que
veut
apporter le projet de
loi en question
c’est de
rendre obligatoire
l’adhésion aux unions
régionales
et générales des ONG, les
premières opérant au
niveau des
gouvernorats et les deuxièmes
englobant
toutes les associations de la
société civile
que compte
le pays. Deux
organismes «
bureaucratiques »
selon les ONG
protestataires.
Sous la loi
actuelle, le
président de la
République
nomme le président de
l’Union
générale (souvent
choisi
parmi les rangs des
anciens
militaires ou
ministres)
ainsi que le tiers de
ses
membres. Son
président
actuel est
l’ancien premier
ministre
Abdel-Aziz Hégazi.
L’implication
de cet
« encadrement »
n’a pas
échappé aux rédacteurs de
la lettre de protestation.
Les mouvements
politiques les plus
actifs qui
n’ont pas de statut
légal comme
Kéfaya, les
jeunes du 6
Avril (défendant
les droits des
ouvriers)
ou les multiples coalitions « pour le
changement
seront mis hors la
loi et
leurs activistes
risqueront la prison »,
indique le communiqué.
Environ
une
soixantaine d’ONG
ont signé
le communiqué, ce
qui est une
première. Les communiqués
du genre en
rassemblent rarement plus
d’une
vingtaine. «
C’est la
philosophie de ce
projet de
loi qui dérange, le
régime au pouvoir
considère la
société
civile comme un
ennemi
qu’il faut
subjuguer et non
comme un
partenaire », constate
Bahieddine
Hassan, de l’Institut
du Caire
pour les études des
droits de
l’homme. « En un
mot, l’objectif
escompté à
travers ce
projet de
loi c’est la
nationalisation pure et simple
des ONG, à
l’instar de la nationalisation
des syndicats
ouvriers qui a
eu lieu il
y a un demi-siècle
à travers
ladite Union
générale des
ouvriers »,
ajoute-t-il.
Tomber aux oubliettes
Jusque-là,
la réaction des ONG
sur
ce
projet n’a
suscité
aucune réponse
officielle.
« Nous
avons toujours
sollicité un dialogue avec le
gouvernement,
ce qui nous
a toujours
été refusé. Trop
conscient de
sa force, le
gouvernement
garde une
attitude hautaine
envers les ONG »,
estime
l’activiste. Il y a
deux ans,
certaines ONG
ont pris
l’initiative
d’élaborer
une loi
à la place de
celle en
vigueur. Ce
texte a été
débattu au
niveau des médias
et de
plusieurs partis
politiques,
il a été
envoyé au
Parlement et au ministère
de la Solidarité
sociale
avant de tomber aux
oubliettes. Negad Al-Boraï,
un autre
militant, dénonce
une «
régression » au niveau
des libertés. «
Je ne
sais
pas si nous
réussirons
à contrer
cette
tendance, notamment avec
l’insanité d’un
gouvernement qui
cherche à
tout prix à
contrôler la société
civile »,
dit-il. « On compte
sur les
médias et
l’opinion
publique locale et
internationale, les partis
de l’opposition,
certains
députés et les personnages
raisonnables au
sein du
gouvernement »,
affirme Al-Boraï.
Pessimiste,
il
s’attend malgré tout
à ce
que ce
projet de
loi soit
adopté
durant la session parlementaire
actuelle. «
On n’arrive pas
à clore
ce dossier,
comme beaucoup d’autres
d’ailleurs qui
restent
ouverts. Il y a 20
ans que
je milite
pour l’indépendance de la
société
civile. Si
ce projet
est adopté,
cela nous
ramènera à
la case de départ »,
regrette le militant.
Chérif
Albert