Nubie.
A
Assouan, de
l’autre côté
du Nil,
Gharb Soheil
est un village d’un esprit et
d’une population tout
particuliers. Avec
ses
spécificités naturelles
et culturelles,
il devient
un ami des
touristes qui jouissent
de sa
beauté et de la vie quotidienne
sous les
toits des maisons qui
semblent
sortir de l’Histoire.
Au
cœur de la nature
et des traditions
Malika,
Al-Beit
beitak, ou
ana kato,
qui veut dire en
nubien «
c’est notre
maison », des
noms
affichés en couleurs
vives sur
les façades des maisons de
ce village,
Gharb Soheil,
à 15 km de la
ville
d’Assouan. A l’autre
bord du
Nil, au nord
du Barrage
d’Assouan et en face de
l’île de
Soheil, se situe
ce lieu
authentique qui vous
donne
l’impression de vous
être
introduit au cœur de
l’ancienne
Nubie. Le Nil, le
soleil, des
maisons d’archétypes
nubiens, des
étalages
multicolores exposant des
épices, des
accessoires, des paniers,
des tapis,
d’encens ou des
fabrications en ivoire,
spécialité
nubienne ou
soudanaise, constituent le décor
d’un des plus anciens villages
nubiens qui
garde toujours
une forte
identité culturelle.
Ici, loin des
voitures et
du brouhaha de la
ville
d’Assouan, des hommes et
femmes aux visages qui semblent
brûlés par le
soleil sont
à l’accueil
des visiteurs avec un
sourire et
une générosité
fascinante.
Ils
ont réalisé
que les
touristes admirent
leur
patrimoine, leur vie
quotidienne et
leur culture,
alors, ils
ont fait de
leur accueil un
gagne-pain et un
moyen
d’améliorer leurs
conditions de vie.
Dans les maisons
bien aérées,
d’une architecture et
couleurs
très riches prises de la
nature, les visiteurs
jouissent de
ce décor
authentique qui s’approfondit
dans
l’Histoire. Le tableau est
splendide
: un amalgame de
couleurs, le
jaune du
désert, le bleu
du ciel
et le marron,
couleur du
limon du
Nil. Des plafonds à la
forme des
voûtes, des sols en sable, des
cours très
vastes dont
les murs
sont recouverts de motifs
colorés ou
de dessins
reflétant le quotidien
nubien et des
scènes de la vie
auprès du
Nil, 7 ou 8
pièces ornées de tableaux
confectionnés de
tiges des
palmiers ou de
noyaux de
dattes, un chef-d’œuvre
artistique qui
sert de lieu de vivre. A la
maison de
Malika, qui porte le nom
de la mère de
famille
morte, laissant au monde
5 filles qui
prennent
soin de
préserver leur
patrimoine et les
présenter aux
visiteurs
du pays, la scène est
impressionnante. Mona fait le
tour de la maison aux
touristes, le temps
que Wessam
leur
prépare du
thé à
la menthe ou
du karkadé
(boisson
fraîche composé de
fleurs
d’hibiscus bouillis),
Malika
dessine du
henné à
celles qui le
demandent.
Qamar, elle,
prend soin
des crocodiles ... et fait
sortir le plus petit de son
coffre pour le
montrer aux
visiteurs qui sont
éblouis par
cette relation entre les
Nubiens et les crocodiles.
Liés
toujours à la nature
et à
la vie auprès
du Nil, les
Nubiens cohabitent avec
les crocodiles, les élèvent et
même les
enfants savent
bien les
traiter, en évitant
leur colère
ou danger.
Ils
leur présentent des
poissons ou
de la viande pour manger et
n’oublient pas de
ne pas presser
leurs corps pour
ne pas les
énerver.
Un flash-back réel
Une
visite au
cœur du
patrimoine et de la culture
nubienne où
l’on invite
aussi les touristes
à assister
à une scène de
danse
nubienne aux rythmes de
l’artiste
du village Mohamad Al-Yazbi,
qui présente des
extraits de chansons de la
culture de ses
ancêtres. Un
festival artistique et
culturel où
les traditions des célébrations
des noces se
mêlent aux
odeurs des narguilés
ou des
boissons et repas
nubiens pour former
une ambiance extraordinaire et
tant de
saveurs.
D’autres
maisons se
transforment en de fabriques
des produits
artisanaux de
spécialité. Des
productions qui servent de beaux
cadeaux ou
souvenirs d’un peuple
ayant une
particularité
et qui
perdure à la
préserver. De la
maison de
Malika à
celle
de Nasser, passant par celle de
Yéhia, le sentiment de
creuser
dans l’Histoire
s’amplifie.
Ce dernier, d’une
quarantaine
d’années, guide touristique,
raconte aux
visiteurs des extraits de
l’histoire de
l’ancienne
Nubie tout en leur
montrant les
différentes
pièces et les ornements
de la maison de
sa famille
datant de plus de 100 ans.
Yéhia est
le premier à
emmener des
groupes de touristes
à son village.
Une
expérience qui a porté
ses
fruits dans le village,
devenu l’un
des importants sites
d’Assouan.
Fou
amoureux de
ses
racines et de sa
société
dont il admire la
particularité et le mode de vie,
il a
construit le premier hôtel
dans le village,
à
l’architecture nubienne.
D’une très
belle vue
sur le Nil et sur des
échelons
montagneux, le touriste
peut y
jouir quelques
jours, aux bras de la belle
nature vierge,
du paysage
splendide, et se
permettre de
goûter la vie
quotidienne des
Nubiens, amateurs de la nature.
Ana Kato est
le nom de l’hôtel qui
ouvre ses
portes aux
visiteurs du village qui
ne veulent
pas le faire en passage. De petites
embarcations et des
dromadaires
sont au service des touristes
pour se déplacer et
plonger au
cœur de la splendide
nature.
Un
nouveau genre de tourisme qui
attire de plus en plus des adeptes,
saturés de la
visite des monuments et
s’intéressent plus
à la nature et au
patrimoine
humain.
4 000
touristes fréquentent
quotidiennement
ce
village pas comme les
autres. Des
touristes traversent le
Nil aux bords des bateaux qui
les débarquent au sable de la
terre de
Barbar, où
ils
rendent
visite au village nubien
à dos de
dromadaires. Là
où habitent
10 000 et 750 personnes
dont 90 %
sont des Nubiens et 10 %
des Saïdis (habitants de la
Haute-Egypte) qui y
sont venus
lors de la construction
du Haut-Barrage et
du
réservoir d’Assouan et se
sont
intégrés dans la
société
nubienne. Un village qui
date de plus de 100 ans, au
moment de la construction du
réservoir
d’Assouan.
Ses premiers habitants
sont ceux des
îles
situées au sud
du
réservoir qui ont
été
déplacés pour s’installer
dans cette
région, en face de
l’île de
Soheil. Au début,
ils
étaient des commerçants
ou des
pêcheurs qui cherchent
leur gagne-pain
dans les
eaux du Nil,
jusqu’au jour
où ils
ont
découvert le tourisme qui
constitue
aujourd’hui le revenu
essentiel
du village.
Et
bien que
60 % des Nubiens
ouvrent
leurs portes aux
touristes et
que le village figure
aujourd’hui
dans les programmes de
visites de la
ville
d’Assouan comme un site
essentiel,
il souffre
du manque
d’un système de drainage
sanitaire.
Un problème qui
empoisonne la vie
paisible des habitants de
Gharb
Soheil. Plusieurs
projets ont
été prévus
pour intégrer le service au
sein du
village mais,
comme
l’explique Nasser,
ils
ne voient
jamais le jour. Des
promesses
du gouverneur
d’Assouan
d’introduire le système
des égouts et de
développer les routes
du village
touristique sont
toujours en
suspens.
Et
les habitants, qui tiennent
à présenter
aux touristes les
beautés et les
spécialités de
leur
quotidien, ressentent la
honte d’être
obligés,
parfois, de verser
l’eau usée
dans le
fleuve qu’ils
considèrent source de vie et de
prospérité.
Doaa
Khalifa