Terrorisme .
Les talibans ont doublé leurs attentats suicide cette
semaine en Afghanistan et au Pakistan, au lendemain d’une
rencontre Karzaï-Zardari, où les deux présidents ont décidé
de travailler ensemble pour lutter contre ce fléau.
Les
talibans défient
Après
des nouvelles successives sur l’arrestation et la mort de
plusieurs chefs talibans ces dernières semaines, les
rebelles du Pakistan et de l’Afghanistan ont décidé de s’en
venger, en ensanglantant les deux pays à la fois par leurs
attentats mortels. A commencer par l’Afghanistan, quatre
violentes explosions suivies d’une fusillade ont retenti
samedi dernier dans le centre de Kandahar, berceau des
talibans dans le sud afghan, faisant vingt-sept morts et une
cinquantaine de blessés. Selon les autorités afghanes, cette
série d’attentats est la plus meurtrière depuis le début de
l’année. Dimanche, les talibans ont revendiqué ce quadruple
attentat dans une déclaration publiée sur le site
Internet, indiquant que ces attaques sont « un message »
ferme pour le commandant de l’Otan, le général Stanley
McChrystal, qui avait annoncé une prochaine offensive à
Kandahar. Or, cette tentative d’intimidation n’a pas jeté
l’effroi dans le cœur de l’Otan. Cette semaine, Robert
Gates, secrétaire américain à la Défense, a annoncé qu’une
opération de nettoyage visant à reprendre le contrôle total
de Kandahar allait être lancée très prochainement et
constituera la « phase décisive de la guerre contre les
talibans afghans ». Déjà, des milliers de soldats afghans et
étrangers procèdent actuellement à une vaste opération à
Helmand, autre fief taliban. N’oublions pas que le président
américain, Barack Obama, a fait de la lutte contre le
terrorisme une priorité par excellence, au moins pour venger
les attentats du 11 septembre 2001.
De
l’autre côté de la frontière, la situation n’était pas
meilleure. Cette semaine, cinq attentats majeurs ont fait au
moins une centaine de morts au Pakistan. Un attentat suicide
a secoué la vallée de Swat, faisant au moins 13 morts et 52
blessés. Il est intervenu au lendemain d’un double attentat
suicide visant des militaires à Lahore. Bilan : 57 morts et
134 blessés. Et ce, quatre jours après une attaque similaire
des talibans alliés à Al-Qaëda qui avait fait quinze tués.
Un porte-parole du Mouvement des talibans du Pakistan (TTP)
a revendiqué ces attentats, avertissant que d’autres plus
graves se produiraient tant que l’armée pakistanaise
poursuit ses opérations dans les zones tribales. Or, les
autorités pakistanaises ont pourtant paru cette semaine plus
décidées que jamais à déraciner les rebelles. « De tels
actes ne parviendront pas à nous démoraliser », a assuré un
général pakistanais. « Je veux assurer les habitants de Swat
que nous continuerons à nous battre jusqu’à ce que soit
éliminé le dernier des talibans ».
Front
commun
Selon
certains analystes, cette vague de violence pourrait aussi
être une sorte de défi lancé par les talibans aux présidents
des deux pays qui avaient décidé, lors de leur réunion la
semaine dernière, de travailler main dans la main pour
combattre le terrorisme et l’extrémisme qu’ils ont qualifié
de « défi commun ». Lors de sa visite la semaine dernière à
Islamabad, le président afghan, Hamid Karzaï, a affirmé
changer de politique à l’égard du Pakistan, tentant
d’améliorer ses relations avec son voisin confronté à la
même menace terroriste. MM. Karzaï et Zardari ont tous deux
exprimé leur détermination de dissiper les incompréhensions
du passé et d’œuvrer ensemble dans la lutte contre les
talibans, qui, selon le président afghan, trouvent refuge au
Pakistan. Selon les experts, Karzaï est venu à Islamabad
pour chercher l’aide du Pakistan dans le dialogue avec les
rebelles. D’aucuns pensent, en revanche, que la visite de
Hamid Karzaï à Islamabad coïncide avec un moment important :
ces dernières semaines, plusieurs chefs du mouvement des
talibans afghans ont été arrêtés au Pakistan dont le mollah
Baradar, bras droit du mollah Omar. Depuis, Kaboul demande
que ces grands chefs talibans lui soient livrés, ce
qu’Islamabad refuse.
Mais, il
semble que la rencontre entre les présidents afghan et
pakistanais, placée sous le signe de la coopération
régionale, n’a pas permis d’adoucir les nouvelles tensions
entre les deux pays, car le Pakistan a refusé l’extradition
des rebelles arrêtés comme le demande l’Afghanistan.
Soucieux
malgré tout de manifester leur unité face à un ennemi commun,
les deux chefs d’Etat ont exprimé leur volonté de mettre en
place une jirga entre les deux pays, c’est-à-dire une grande
réunion pour élaborer des solutions régionales sur les
menaces qui pèsent sur le Pakistan et sur l’Afghanistan. Ils
ont aussi appelé à un partenariat permettant d’explorer le
plein potentiel des ressources humaines et naturelles des
deux pays et de renforcer la coopération économique et
commerciale. Désormais, une chose semble sûre et certaine,
toute coopération entre les deux pays confrontés au défi
taliban ne ferait qu’affaiblir les rebelles et casser leur
épine avec les jours.
Maha
Al-Cherbini