Archéologie.
Les récentes découvertes archéologiques faites par la
mission italienne de l’Université de Sienne à Qasr Qaroun,
dans le gouvernorat du Fayoum, ont mis en relief la place
qu’occupait cette ville pendant la période gréco-romaine.
Un
temple énigmatique
« C’est
l’unique temple ptolémaïque complet », déclare avec fierté
le professeur Emanuele Papi, directeur de la mission
italienne de l’Université de Sienne. Selon lui, c’est pour
cette raison que l’on a choisi ce site afin d’y opérer. Ce
temple avait été soumis aux travaux de restauration plus de
cinq fois pendant l’époque moderne. « Les différentes
missions n’ont pas pu résoudre toutes les énigmes du site »,
explique le Dr Stefano Camporeale, professeur des provinces
romaines et membre de la mission italienne. Pour lui, le
visiteur du temple peut distinguer les endroits restaurés de
ceux intacts. Tandis que les murs opérés se composent de
blocs de calcaire blanc, ceux d’origine sont noircis. Mais
les yeux des experts sont plus précis. Ils trouvent que le
temple de Dionysias occupe une importance majeure dans
l’histoire égyptienne et ce, grâce à son intégralité. Ainsi,
« nous pouvons connaître la planification des autres temples
gréco-romains des autres sites », commente le Dr Stefano.
Alors, les membres de la mission doivent restaurer et
nettoyer, consolider et préserver, mesurer et relever
l’architecture du temple et surtout mener des fouilles
archéologiques et étudier tous les relevés archéologiques.
En effet,
le temple a été bâti vers la fin du IIIe siècle av. J.-C.
par les Ptolémées. Dédié au dieu Sobek, divinité locale du
Fayoum, le temple se compose de trois étages et ce sans
oublier les annexes dont les vestiges existent encore entre
l’édifice et la muraille l’encerclant. Le rez-de-chaussée se
divise en trois parties : une grande salle, suivie d’une
deuxième plus étroite, et enfin le saint des saints. Cette
planification est en principe préservée dans le reste des
étages, et ce, en conservant leur importance liturgique.
Ainsi, le saint des saints est le lieu le plus petit et le
plus saint du temple puisqu’il renfermait une momie du
crocodile ainsi que sa statue. Selon les archéologues, le
saint des saints, comme les autres temples gréco-romains,
était exclusif au haut clergé du temple, notamment le grand
prêtre. Mais les caractéristiques du temple de Dionysias
sont vraiment inédites, les parties hautes des murs et les
plafonds sont noircis et inscrits de caractères arabes et
latins. Quant au reste, il est plus clair et propre. Selon
le professeur, la plupart du temple était sous le sable
jusqu’aux années cinquante du siècle dernier sauf les
parties hautes des murs. De leur part, les visiteurs de la
région, que ce soit des orientalistes ou des voyagistes,
menaient une vie normale sur ce tiers paru du sable. « Ils
inscrivaient alors leurs noms sur les murs et allumaient du
feu dont les cendres ont noirci les murs et le plafond, afin
de cuisiner leurs aliments », explique le professeur.
Lors de
leurs travaux de fouille, les membres de la mission ont
dégagé le puits du temple. D’après le professeur, ce puits,
lors de son utilisation, était toujours nettoyé. Ainsi les
prêtres pouvaient-ils l’atteindre de tous les étages à
travers une dalle mobile au sol. D’ailleurs, la mission a
mis au jour d’innombrables couloirs qui donnaient aux salles
étroites. Selon Camporeale, ces salles avaient une fonction
liturgique. Mais « il est difficile de l’affirmer pour
l’instant », explique-t-il.
En
outre, sur les murs de certaines salles se trouve la croix,
« indiquant l’utilisation du temple à l’époque copte,
peut-être par des citoyens. Ces symboles n’ont pas empêché
l’existence des scènes représentatives du culte païen qui
régnait avant l’apparition du christianisme. Il s’agit d’une
scène ptolémaïque inédite qui incarne le dieu Sobek, le
crocodile personnifié, debout devant le gouverneur en tenue
pharaonique. Aux murs des côtés sont incises deux colonnes,
donnant en fait l’impression d’être présent au saint des
saints d’un temple pharaonique », raconte-t-il. Toute cette
scène est mise au jour au troisième étage et sur la même
ligne du saint des Saints, du rez-de-chaussée. Selon le
professeur, cette scène met en évidence la forte influence
de l’architecture et la religion pharaonique sur les époques
ultérieures.
Malgré
toutes ces découvertes, les experts trouvent que leurs
opérations sont encore préliminaires. « Outre les couloirs
et les étroites salles énigmatiques, le temple comprend plus
que 50 pièces et blocs de pierre à étudier pour les remettre
à leurs endroits d’origine. Ces objets contiennent autant de
secrets à dévoiler », reprend le professeur tout en espérant
que les futures saisons donneront de bonnes nouvelles
inattendues.
Doaa
Elhami