Le poème
en prose du jeune poète
Moëmen Samir
s’attarde sur les éléments de la nature et sur le
quotidien afin de lui apporter une nouvelle signification.
Al-Ahram Hebdo publie un extrait de son poème Tafkik al-saada.
Déconstruction du bonheur
Comme si
nous approchions de loin …
Rien du
tout …
Nous
avons donc échoué
Oublions
alors …
Je veux
dire … oublions la déception
Ne
permettons pas au complexe de culpabilité de nous gager à
bon marché.
Attrapons vite
La
vision folle qui apparaît à l’instant même …
La
félicité — notre amie malicieuse — pourrait être
D’ôter
la peau épaisse qui nous a aveuglés
Longtemps
Durant
des années nous avons cru
Créons-nous donc
Nous-mêmes
Pour la
première fois.
Blanc
A
l’origine des choses :
le nuage
L’homme
primitif
A fait
partir ses animaux
Pour
qu’ils s’éloignent
Et que
s’endorme la mémoire
En
effervescence, parce qu’elle est vide
Et il
s’endort.
Les
animaux lui ont envoyé
Leur
amour de loin
Car les
plantes étranges
Les ont
rendus heureux
Et ils
ne savent pas pourquoi …
Il a
fait un signe des yeux et ils se sont confiés
Il s’est
levé, a apporté les plantes et il a fumé
Il a
fumé profondément.
Il était
authentique à ce moment-là
Et il a
envoyé son bonheur au ciel avec sincérité
Et son
bonheur est devenu un nuage.
Les
enfants et les petits-enfants combattaient
Et les
années étaient une toile de fond
Très
brillante.
Ils
faisaient d’autres nuages
Et
d’autres et d’autres encore
Jusqu’à
ce que pleure le nuage mère
De tant
de fidélité des enfants de la terre
Dont il
a pensé du mal
Les
larmes alors
Sont
devenues
Pluie.
Noir
Nos
fantômes
Elle
réunissait dans le même ballon
Grand-mère
et moi-même
Le
ballon charmant
Qui
batifole dans les pupilles des yeux de nos enfants
Et sur
l’air sévère des pères sur les photos.
Elle dit
que les bras de grand-mère
Appartiennent aux lignes enchevêtrées de ma main
Et que
la voix du messager
Le jour
où il a capturé la mort sur l’arbre
N’est
pas très haute
Au-dessus
de l’air
Qui a
décidé de sourire avec moi généreusement,
Et à
côté
D’un
miroir
Elle
élabore maintenant
Ses
couleurs qu’elle suit des yeux.
La
fenêtre lui raconte :
—
Désenchantée,
Tu as
volé un peu de l’âme
Qui
papillonnait dans les chambres
Et tu
n’as pas pu la garder dans ton sac à main.
Puis le
jour où elle s’est souvenue d’elle
Elle l’a
sortie de sous les os
Pour la
rendre, un amoureux fantomatique,
Qui
oublie toujours
Avant de
prêter son âme
Par
fidélité envers tous les sourires qu’il devait
De
trouver refuge dans les bas-côtés du chemin
Ne
serait-ce
Que
l’instant du passage
Du
ballon
Brumeux,
juste ce qu’il faut.
Les
couleurs
Ou c’est
ainsi que nous pouvons être heureux
Rouge
Ou quand
nous découvrons soudain
Et sans
aucun ordre que nous aimons la vie
Tu
habites en un point
Que
personne d’autre ne voit
Sur la
carte de l’école.
Tu sors
de bonne heure
Pour que
te soit donné
Le
plaisir de parler avec les voitures.
Et si
l’on est content de toi
Les
choses arriveraient
A une
certaine relation
Avec une
certaine voiture,
Tu
n’achèteras pas une pareille,
Et tu ne
communiqueras pas avec une femme
Qui lui
ressemble par le brillant éclat des sentiments
Jamais.
L’une
d’elles te choisit, timidement,
Et elle
baisse la tête
Et tu te
mets dans le cœur de l’appel de la sirène.
Celui
qui conduit
Envoie
encore, par instants,
Un
baiser ou deux en l’air.
Et le
ciel a voilé ses yeux
Et s’est
caché derrière la montagne …
Avant le
passage à niveau du train
L’amour
de la danse s’empare de la belle
Et la
danse lui a répondu
Je veux
dire, à son désir enfoui,
Avant de
l’entourer comme une créature de la nuit.
Elle
dort sur le ventre
Et elle
joue avec ses pieds,
Elle
glisse
Puis
expose son dos au soleil.
Elle
fait tout ce qui a traversé
L’imagination de ses aïeules
Quand
elles étaient entre les mains
Des
ouvriers des Voitures Al-Nasr.
Elle
s’apaise
A la fin
…
Et elle
a laissé dans ton corps
De
petits souvenirs
Elle
veut, calmement,
Dévoiler
la profondeur de ton bonheur
Véritable
Quant tu
découvres que le médecin est vraiment bon
« Tu
seras guéri bientôt, jeune homme »
Puis la
profondeur de ton amour de la vie
Alors
que tu reçois les télégrammes
De la
mort
Belle …
de la part des yeux volants.
Le
Turquoise
Quand tu
es entouré de bonté
La mère,
les tantes, la sœur
Rêvent
en même temps
La mère
a vu le père mourir encore une fois
Elle
ouvre alors les Jours d’Ibn Sirin
Et elle
a dit :
Une
personne qui nous est proche
Verra
des malheurs rire d’elle.
Le vieux
téléphone noir
Nous
allons tous vers lui, avec la vitesse du spectre
Et nous
sommes heureux
Car nous
attendons toujours la sonnerie
Qui
indiquera : votre pressentiment est juste
Vous
êtes intelligents.
La tante
raconte
Que le
cercueil blanc lui a fait signe
Et s’est
retourné trois fois
Et a
laissé partir son cœur.
L’autre
tante arrive vite vite
Et dit :
notre arrière grand-père
Que nous
avons soutenu avec nos âmes
Et nous
avons oublié auprès de lui la blancheur des cœurs
Il a dit
: ce bus
Il a
deux chemins
Le
premier est né de la brume
Et le
second est un ami admirable.
Le
nouveau téléphone rouge
La sœur
s’embarque sur ses ondes
Pour
nous apprendre que l’oiseau qui protège la maison
A vendu
une aile hier
Et des
vilains lui ont marchandé son ciel.
Tu es
dans le cœur un peu de tout cela …
De
l’odeur de l’encens
Qui
échappe de leurs yeux tous les matins,
Du calme
du pays de la vérité
Enchanteur et magique.
Seulement tu vois se réaliser ce qu’ils ressentent
Et ce
que les cœurs leur ont annoncé
Et tu
suçotes tes lèvres
Parce
que tu es un monsieur qui a obtenu des diplômes
Mais en
toute franchise
Tu
caches un bonheur
Que tu
délivreras un jour
Lorsque
tu t’exileras dans un pays lointain.
Bleu
ciel
Quand la
musique est ton amie
Tu as
été touché par une grâce
Et tu as
été parmi les élus
Pour qui
la musique veille sur eux
Avec une
tendresse maternelle
Elle
mettra alors tes pas
Sur le
début du chemin
Et te
dira : lance-toi
Et tu te
sentiras riche
Ou elle
te permettra d’être en toi
Parce
que tu es de cette étoffe
Mais tu
oublies,
Et elle
sait mieux,
Elle
t’apprend de temps à autre
Que cela
n’arrivera jamais
Pour que
ne parle pas un mélomane
Pour
dire qu’elle est une magicienne qui hypnotise.
Elle te
donne les clés
Et les
entrées de toutes les forces
De l’âme
Puis
elle compose avec ta danse
En une
présence soufie
Ou sur
tous les édifices
Ou même
lorsque tu incarnes
Les
rôles des morts dans la famille.
Mais si
tu es surtout un homme qui doute
Qui
craint qu’elle ne change d’attitude
Et
qu’elle ne soit pas fidèle aux serments
Ou
qu’elle jette son dévolu tour à tour
Sur un
esprit rebelle autre que toi
— Ce qui
pourrait arriver bien sûr —
Oublie
donc tout de tout cela
Et
épargne le ravissement
De
fermer les yeux
Pour le
désespoir.
Traduction de Suzanne El Lackany