Al-Ahram Hebdo, Idées | Le renouveau comme religion

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 Semaine du 22 au 28 décembre 2010, numéro 850

 

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Idées

Roman . Le 5e Forum international du Caire pour la créativité romanesque arabe s’est tenu du 12 au 15 décembre au Conseil suprême de la culture sous le titre « Le Roman arabe jusqu’où ? ». Bilan de l’expérimentation dans le roman aujourd’hui.

Le renouveau comme religion

Genre littéraire protéiforme, moderne, ou postmoderne, le roman a toujours suscité, auprès des spécialistes et des critiques, d’infinies questions. Le 5e Forum international du roman arabe, organisé par le Conseil suprême de la culture, a ainsi réuni des chercheurs, professeurs et romanciers pendant une série de conférences et de tables rondes, sur quatre jours, pour réfléchir aux nouvelles problématiques du genre romanesque. Vers où ? Quel est l’avenir du genre dans un monde multiculturel et global ? Question qui a sous-tendu en filigrane toutes les réflexions et les interventions.

Gaber Asfour, président du comité organisateur du forum qui s’est tenu du 12 au 15 décembre, a rappelé d’emblée lors de la séance d’ouverture que le roman arabe, très loin désormais de ce temps où le modèle occidental était un exemple de civilisation à suivre en littérature aussi, s’est ouvert à lui-même des horizons innovants. Le roman a franchi les limites explorées. Il accueille tous les autres arts et genres. Transgénérique, la littérature arabe connaît par exemple maintenant le roman poétique (al-riwaya al-chéeriya). Un romancier tel que Khairi Chalabi n’a-t-il pas écrit des pages entières rimées dans un roman ? De même, le roman a rejoint les nouvelles technologies. On trouve des romans en ligne ou des romans en interaction avec la culture de l’image. Le monde virtuel soutient la narration.

De nombreuses personnalités ont tour à tour réfléchi sur le roman numérique puis ont abordé l’exemple marquant du roman d’Ibrahim Abdel-Méguid Fi kol osboue youm gomaa (chaque semaine il y a un vendredi). Dans ce texte romanesque, l’espace virtuel, qu’est l’Internet, est intrinsèquement lié à la structure et à la fonction signifiante du roman. La dialectique entre le monde virtuel et le monde réel décide du devenir des personnages. Dix-huit personnages exactement parmi lesquels un philosophe, une jeune fille qui cherche un prétendant, un jeune homme révolté, un professeur d’université, une tueuse professionnelle, un conducteur de microbus épuisé, une journaliste dévergondée et d’autres types psychologiques. L’histoire de chacun, laissée comme un aveu sur le net, construit la charpente du récit. Le site devient le lieu où ils se rencontrent, se croisent, et ils vivent à travers lui. Annexée au roman à la fin, une page contient le profil de chaque personnage, son portrait qui ressemble à un C.V. L’écrivain a démontré par ce roman que le contact et les relations entre les gens ont perdu toute chaleur humaine et se réalisent électroniquement à travers les programmes de « chat » : des vérités intimes sont dévoilées banalement au plus grand nombre. Mais il s’agit surtout d’une étape-clé dans l’évolution des formes romanesques dans le système littéraire arabe, car l’écrivain utilise le potentiel visuel de l’écran et du site électronique et la configuration du groupe virtuel qui réunit les personnages. Expérimentation réussie.

Mélange entre réel et fantastique

L’expérimentation des formes nouvelles, tout comme il existe un art expérimental, s’est révélée être effectivement le centre d’intérêt qui a préoccupé la majorité des intervenants.

Pour le critique Ibrahim Fathi, l’expérimentation est partie intégrante de toute véritable création et elle est donc constitutive du genre romanesque. Chaque œuvre qui a fait date dans l’histoire littéraire est expérimentale puisqu’elle se situe par rapport à un refus des structures narratives traditionnelles. Selon lui, l’expérimentation contemporaine dans le roman égyptien touche aussi à l’espace — et non seulement au temps — qui devient en lui-même un personnage.

Un autre aspect en est le mélange entre la narration du réel et la dimension fantastique. Ou l’intertextualité (le dialogue entre les textes), ou la polyphonie (plusieurs voix dans le roman), ou bien les techniques du jeu avec les registres de la langue ou avec la multiplication des points de vue dans le texte. Bref, tout ce qui bouscule la forme comme structure symbolique. Et tout ce qui fait la modernité du genre en dépassant la forme fixe et les contraintes. Pour le critique palestinien Fayçal Darag, l’expérimentation a été la solution ultime à l’issue d’une crise entre romanciers et institutions du pouvoir. C’est en son essence un acte de liberté revendiquée. D’autres, à l’instar du professeur et critique Mohamed Badaoui, pensent que l’actuelle idéologie de l’expérimental prend ses sources à partir de l’époque de la première guerre, où la littérature arabe cherchait ses modèles et qu’elle a atteint maintenant « le non-genre », qui est un modèle non défini. Un résultat de la déconstruction des modèles, en somme. On pense aussi que l’hybride est né de l’expérimental. Que l’expérimentation est légitime quant au principe puisqu’il n’est pas admis de proposer au romancier une formule d’écriture prête à l’emploi. Que le roman doit connaître des expériences extrêmes comme le roman théorique (c’est-à-dire le roman dans le roman, il se réfléchit lui-même). Que l’avenir sera au roman expérimental. L’idée admise à l’unanimité c’est que l’expérimental est indispensable pour perpétuer le genre romanesque qui est tout le temps work in progress. Pour que le roman ne meure pas.

Suzanne El Lackany

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