Parlement . Le discours présidentiel de dimanche à l’occasion de l’inauguration de la nouvelle session aire s’est inscrit dans la continuité.

L’économie comme priorité

C’est le volet économique qui a occupé la grande partie de l’allocution du président Hosni Moubarak devant les élus des deux chambres du Parlement. Travailler pour davantage de justice sociale, pour combattre la pauvreté, et étendre l’ombrelle de la sécurité médicale, telle est la « feuille de route » de cette nouvelle session parlementaire inaugurée dimanche.

« Nous avons pu surmonter deux crises mondiales consécutives avec nos propres ressources, sans que notre économie ne tremble », s’est félicité le président, saluant le succès du programme de libéralisation économique engagé par le gouvernement. « Nous devons compléter prochainement l’application de l’agenda des réformes », a-t-il affirmé, alors que le gouvernement s’est fixé pour objectif une croissance de 8 % les 5 prochaines années.

Le président n’a pas oublié de réitérer l’intérêt spécial qu’il portait aux citoyens démunis. Ces derniers, qui n’ont pas encore goûté aux fruits de la croissance, représentent, malgré tout, 40 % de la population. « Notre principale priorité reste de contenir le chômage et de créer plus d’emplois », a-t-il promis.

C’est devant un Parlement « débarrassé » des députés de la confrérie, officiellement interdite, des Frères musulmans que se prononçait M. Moubarak. Les Frères, qui occupaient le cinquième des sièges de la chambre sortante, ont échoué à remporter un siège au premier tour des élections de novembre dernier. Ils ont décidé de boycotter le second tour, suivis par le parti de l’opposition libérale du néo-Wafd. Sur les 508 sièges disputés, le PND a remporté 420. Le reste étant distribués entre élus issus de partis politiques de peu de poids et des indépendants généralement proches du pouvoir.

A l’intention de ceux qui contestaient l’intégrité des élections législatives remportées à une majorité écrasante par le Parti National Démocrate (PND, au pouvoir), le président a répondu que ces élections étaient « un pas important » sur la voie de la démocratie. Celle-ci « est une culture dont la pratique se renforce d’année en année », ajoute le président, qui a dévié de son discours largement dépolitisé pour lancer une remarque moqueuse à l’attention des candidats qui ont décidé de former un « Parlement parallèle ».

Les priorités, telles que définies par le président, concernaient toujours, dans une perspective d’investissement, la réglementation de l’acquisition de terrains publics. L’appel du président à adopter une nouvelle législation répond à l’annulation récente, à l’issue d’un procès judiciaire, du contrat de l’acquisition par le géant de l’immobilier Talaat Moustafa Group d’un terrain à l’est du Caire. Un procès qui a failli tourner au séisme économique et qui a mis en évidence les compétences conflictuelles des divers organismes publics.

Le discours présidentiel s’est également inspiré de l’actualité régionale, notamment la volonté des pays du Bassin du Nil de modifier l’accord sur le partage des eaux de ce fleuve en reconsidérant à la baisse le quota de l’Egypte. Outre son appel au développement de l’usage des eaux souterraines et à la rationalisation des eaux d’irrigation, Moubarak a confirmé son attachement à une solution négociée avec les voisins riverains.

Concernant l’énergie, une autre haute priorité de la « sécurité nationale », le président a mis fin aux rumeurs selon lesquelles le site du futur réacteur nucléaire Al-Dabaa, dans le nord-ouest du pays, aurait été cédé à un entrepreneur touristique. Le nouveau réacteur sera bel et bien érigé sur ce site, et les appels d’offres pour sa construction seront lancés dans les semaines à venir, a annoncé le président.

Assez conventionnellement, le discours présidentiel a réservé un passage au conflit israélo-palestinien, où le président Moubarak — critiqué à l’intérieur pour son alignement sur les politiques régionales américaines — a fustigé les Etats-Unis et Israël, leur faisant porter la responsabilité du gel des négociations de paix.

L’image d’une Egypte visée par des ennemis extérieurs a été cultivée par le président, qui s’est posé en garant de sa sécurité. La guerre contre « les forces de l’extrémisme et du terrorisme » se poursuit ainsi que contre « les tentatives d’ingérence » qui visent à saper l’unité nationale des musulmans et chrétiens, affirme M. Moubarak.

En dehors des grandes lignes définies par le président, les observateurs estiment que l’agenda législatif de ce nouveau Parlement évitera toute loi susceptible de compromettre cette stabilité intérieure tant voulue à la veille des élections présidentielles de 2011.

Rien de neuf donc, y compris le désintérêt des opposants qui ne s’attendaient pas à ce que le président mette l’accent sur la réforme politique.

Finalement, les spéculateurs de la « succession » au sommet de l’Etat n’ont eu pour réponse que l’image d’un président physiquement très en forme, étalant des projets à long terme et répondant du tac au tac à ceux qui l’interrompaient. La perspective d’un sixième mandat présidentiel en 2011 est plus plausible qu’il y a un mois.

Chérif Albert