Législatives .
Se déroulant globalement dans un calme relatif, les
élections de dimanche ont été marquées par les magouilles «
classiques ». Reportages dans des circonscriptions-clés.
Une ville politisée
Dans
le gouvernorat de Hélouan, ville
industrielle à 35 km au sud du Caire connue pour
l’engagement politique de ses résidents, le principal duel
se jouait entre le candidat indépendant Moustapha Bakri et
le PND Sayed Mechaal, ministre
de la Production militaire. Pour le siège réservé aux
ouvriers (qui constitutionnellement doivent former 50 % des
députés), la concurrence était entre trois candidats du PND,
deux candidats affiliés à la confrérie des Frères musulmans
et un certain nombre de figurants.
Il est 9h du matin, les bureaux de vote viennent d’ouvrir
leurs portes aux électeurs. 24 écoles abritent les 250
bureaux de vote de cette circonscription.
La présence sécuritaire est renforcée et de nombreux
véhicules blindés sont déployés dans les principales rues de
la ville en prévision de toute violence.
Mais contrairement aux attentes, l’affluence était faible et
les quelques électeurs éparpillés votaient dans le calme. Un
calme brisé à chaque fois que l’un de ces autocars qui ont
sillonné la ville à longueur de journée venait déposer
quelques dizaines d’électeurs. « Ils transportaient les
ouvriers des usines militaires que l’on a emmenés voter pour
leur patron, Mechaal », accuse
son concurrent Moustapha Bakri.
Peu avant midi, le ministre Sayed
Mechaal débarque devant la nouvelle école mixte de
Hélouan, une école dont il a «
parrainé » la rénovation. C’est là qu’il a choisi de voter.
Ses partisans portant des t-shirts à son effigie
l’attendaient depuis des heures. A l’apparition du ministre,
ces derniers ont commencé à scander : « Nous sommes avec le
ministre, nous sommes avec le grand ». Le ministre a dû
attendre dans sa voiture un bon quart d’heure, le temps que
son rival qui se trouvait dans le même bureau finisse sa
tournée. A sa sortie, Bakri, qui n’était accompagné que par
une poignée de sympathisants, a eu droit à quelques huées
hostiles de ceux de
Mechaal. Il a répondu par un
furtif V de la victoire avant de disparaître de la scène,
laissant derrière lui le ministre danser avec ses
sympathisants dans la rue.
Leurs permis en main, les journalistes et les photographes
accrédités n’ont pas été autorisés à accéder aux bureaux de
vote. Le ministre a intercédé en faveur d’un seul
photographe qui se réclamait de la « presse officielle ».
Dans la foulée, des tracts sont distribués. « Découvrez la
réalité de Bakri, cette grande gueule », crie un supporter
de Mechaal tout en distribuant
un pamphlet qui attribue toutes sortes de corruption au
candidat indépendant. « Ce n’est qu’une comédie, les deux
(candidats) sont aussi menteurs l’un que l’autre », lui
lance Ossama, un habitant
sexagénaire de la ville.
Deux heures avant la fermeture des bureaux de vote, Bakri a
fait un sit-in au bureau du lycée Al-Maasara
pour les jeunes filles, en découvrant deux urnes bourrées à
craquer de bulletins remplis, selon lui, par un délégué de
Mechaal. Bakri a alerté la
commission électorale.
Il faut préciser que les électeurs de la circonscription de
Hélouan avaient commencé leur
bataille électorale beaucoup plus tôt que ceux des autres
gouvernorats. Il y a plusieurs mois, cette circonscription a
subi une modification des « frontières administratives », ce
qui a privé Bakri d’une importante partie de son électorat.
Le gagnant dans cette affaire ne fut autre que le futur
candidat PND, Mechaal. Les
protestations de Bakri n’ont rien changé et il a dû partir
déjà sur un handicap.
Ola
Hamdi