Egypte - Etats-Unis .
Surveiller les élections au Proche-Orient pour en garantir
la transparence est une exigence occidentale, notamment de
Washington … qui agit souvent selon ses propres calculs.
Un contrôle au gré des intérêts politiques
«
C’est un étalon d’or régional pour effectuer des élections
libres et transparentes », c’est en ces termes que
l’Institut de Washington s’est félicité des élections
parlementaires jordaniennes du 9 novembre dernier. « Le roi
et le gouvernement ne se sont pas interférés dans le scrutin
», titrent de nombreux journaux internationaux. Suivre le
modèle jordanien lors d’élections devient aujourd’hui un
appel international.
En fait, les élections jordaniennes se sont déroulées sous
une haute surveillance internationale sans précédent. 3 000
observateurs arabes et 250 internationaux ont été répartis
dans les circonscriptions. Ouvrir les portes ou non aux
observateurs étrangers était un long débat qui a fortement
animé la Jordanie. Les déclarations officielles du Royaume
hachémite, jusqu’à un mois avant ces élections, rejettent
totalement une telle surveillance. « On refuse un contrôle
international, les élections sont une affaire de
souveraineté … Selon la Constitution, il est interdit à
n’importe quelle partie de surveiller le processus électoral
», répétait-on. Selon la loi électorale jordanienne, il
revient seulement aux candidats et à leurs adjoints de
surveiller les élections. Même la société civile a été mise
à l’écart.
Ce refus d’une surveillance étrangères
avait été jugé définitif durant les élections de 2007. Ces
élections qui ont été accusées d’être une large affaire de
fraude et qui ont été dénoncées par tous les médias
internationaux et locaux.
Mais cette fois, la Jordanie s’est trouvée face à une forte
pression internationale à laquelle elle a cédé. La
justification officielle de cette autorisation était autour
du terme même de contrôle ou surveillance. Le gouvernement
jordanien a déclaré avoir permis seulement une « observation
» des élections et non une « surveillance » par des
institutions locales et internationales. Mais cette présence
n’a pas empêché les incidents violents et le faible taux de
participation évalué à 53 %. Des faits qui ont été passés
sous silence dans les médias internationaux, qui se sont
concentrés seulement dans leurs articles sur l’éloge de
l’approbation jordanienne d’accepter la surveillance
étrangère.
Bahreïn est un exemple contraire à la Jordanie, celui d’un
pays qui a refusé bec et ongles la surveillance étrangère,
qu’elle soit arabe ou internationale. Cela a été le sujet
d’un long débat qui a précédé les élections parlementaires
bahreïnies d’octobre dernier et qui s’est terminé par un
retentissant « Non ». Les responsables du pays ont justifié
ce refus par le fait que les élections allaient se dérouler
sous contrôle et avec des garanties de transparence. Les
urnes transparentes, des cartes électorales électroniques,
l’interdiction de l’utilisation des portables lors
du scrutin … telles étaient les
mesures prises.
Ce refus a fait de Bahreïn la cible d’une vaste campagne de
contestation dans les milieux internationaux, avec
l’accusation que les élections se sont déroulées au milieu
d’une répression sans précédent. « Ce à quoi nous assistons
à Bahreïn ces jours-ci, c’est le retour à l’autoritarisme
pur et dur. Le gouvernement s’est emparé d’associations et a
fermé des médias qu’il n’aime pas afin de réduire au silence
les critiques », déclare Human
Rights Watch, qui presse
l’administration Obama à
dénoncer publiquement les violations qui se déroulent à
Bahreïn, un proche allié.
Des critiques qui vont bon train, bien que personne n’assure
qu’il y a eu de fraude durant les élections. Pas d’incidents
de bourrage des urnes. Mais selon les opposants, le pouvoir
dispose de moyens de pression pour faire élire ou non un
candidat et intimider les électeurs.
Et « la vision réformatrice bahreïnie » avait été vantée
après les élections de 2001 avec la victoire d’une femme non
voilée, libérale de gauche, et cet Emirat a été qualifié de
« cœur vibrant de la démocratie au Moyen-Orient », comme
l’avait fait en son temps Bill Clinton. Aujourd’hui, Bahreïn
ne conserve plus cette place. La couverture médiatique
internationale des élections pointe du doigt les
discriminations économiques à l’égard des chiites et le
découpage des circonscriptions.
Mais d’autres exemples viennent démontrer que cette notion
de transparence est négligée quand elle mène à des élections
consacrant la victoire des partis que rejette Washington.
L’Algérie en a été le premier exemple. En 1991, lorsque le
Front Islamique du Salut (FIS) a remporté une écrasante
majorité, Washington a par la suite encouragé le coup
d’Etat. Sans oublier la Palestine, quand le peuple a dans sa
majorité voté démocratiquement pour le Hamas, également sous
haute surveillance internationale. Mais le résultat n’avait
pas plu à Washington. Les Palestiniens ont été par la suite
sanctionnés collectivement pour ce résultat. S’ensuivirent
des blocages accompagnés de sanctions et un processus de
paix en panne.
Aliaa
Al-Korachi