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 Semaine du 3 au 9 novembre 2010, numéro 843

 

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Nulle part ailleurs

Activités Scolaires . Au monde des petits, le jeu politique a aussi ses propres règles. Participer, faire un choix et tenter de changer les choses semblent stimuler les gamins. Les élections dans les écoles sont une expérience à vivre et qui servira pour plus tard. Reportage.

Politiciens en herbe

La petite Nour Omar, 9 ans, élève en 4e primaire, semble être bien pensive. Sa seule préoccupation ces derniers jours est de se préparer pour les élections dans son école. Il s’agit pour elle de la plus importante bataille de sa vie, car c’est sa première expérience électorale. Depuis dix jours, les préparatifs vont bon train chez elle. Rien n’est laissé au hasard. Aidée par son père, elle dresse un programme intéressant pour faire sa propagande, cherche des slogans originaux pour sa campagne électorale et tient à économiser son argent de poche pour financer ses pancartes. De loin, la petite candidate a commencé à surveiller le déroulement du processus tout en élaborant sa propre tactique électorale. « J’ai l’intention de présenter ma candidature pour les élections du comité scientifique. J’aime bien les sciences comme matière et j’ai un tas d’idées à proposer pour améliorer l’usage du laboratoire de l’école », explique Nour. Mais ce n’est pas la seule raison. « Les candidates qui se sont présentées dans les autres comités sociaux, sportifs et artistiques jouissent d’une grande popularité. La concurrence va être ardue dans ces comités », confie la politicienne en herbe, tout en ajoutant qu’elle a opté pour le silence pour empêcher les autres de se présenter dans ce même comité.

Ici, il s’agit d’une expérience politique assez singulière. Si l’Egypte se prépare pour les élections législatives qui vont se dérouler dans un mois, à l’école moderne d’Egypte 2000, située au quartier d’Al-Tagammoe Al-Khamis, la bataille électorale bat son plein. Depuis deux semaines, élèves, professeurs et parents se sont lancés dans cette aventure avec beaucoup d’assiduité et de sérieux. Une expérience qui va leur permettre d’exercer leur droit à s’exprimer et à choisir leurs candidats.

Toutes les classes de la 4e primaire jusqu’à la première secondaire se sont transformées en véritables circonscriptions. Les murs des bâtiments sont couverts de pancartes toutes en couleur comme dans un carnaval. Mais là, les logos sont différents. Ce n’est plus le croissant (symbole du Parti national au pouvoir), le palmier (symbole du parti opposant, le néo-Wafd) ou le chameau, mais c’est plutôt Barbie, Pooh ou Mickey qui sont au devant de la scène. D’autres élèves ont choisi les t-shirts de certains célèbres footballeurs pour les imprimer sur leurs pancartes. Des paquets de chocolat et de bonbons sur lesquels sont inscrits les noms des candidats circulent dans les classes. Les assistants sociaux font le tour de l’école. « Notre but est d’introduire dans le monde des élèves des termes ayant trait à la politique tels que candidat, électeur, scrutin, vote, etc. On aide les élèves à se lancer dans cette expérience en leur expliquant comment préparer une campagne, comment faire de la propagande et gagner de la popularité, comment faire des promesses réalisables, etc. Quant aux électeurs, on les sensibilise à choisir leurs candidats d’après des critères objectifs. On leur conseille de ne pas élire celui qu’on aime, mais plutôt celui qui va être apte à remplir une tâche », souligne Gihane Al-Chazli, assistante sociale, aux jeunes candidats et électeurs.

Selon Adel Aboul-Magd, responsable des activités et de l’éducation sociale, il existe un décret ministériel promulgué par le ministre de l’Education concernant la tenue d’élections dans les écoles. Chaque école doit constituer des unions d’élèves dans les différents cycles éducatifs. Cette union est formée par élection. « Chaque classe pourra choisir cinq candidats pour les cinq comités, et à la fin, un seul sera élu pour devenir le secrétaire qui va représenter sa classe lors des unions des écoles au niveau de l’Egypte », avance Aboul-Magd.

Le droit de rêver

Les élèves d’aujourd’hui sont les leaders de demain, tel est le slogan adopté par l’école en se lançant dans cette expérience électorale, comme l’explique Dr Rafida Askar, PDG de l’école.

« L’objectif est de donner la chance aux petits de pratiquer la démocratie. Il suffit que l’enfant ait confiance en lui-même et le courage de poser sa candidature. Le manque de participation politique dans les élections à tous les niveaux est un problème dont souffre actuellement le monde des grands. Cependant, demain, ce petit qui s’est habitué à participer ne sera guère un citoyen passif », avance Askar. Sur son bureau s’entasse aujourd’hui une pile de promesses électorales qu’elle va examiner, avec la probabilité de les réaliser comme moyen d’encourager les enfants à poursuivre ce périple. « On me propose de consacrer un jour où les élèves pourront venir à l’école sans uniforme, de réduire les devoirs, de préciser un rendez-vous périodique avec moi. Ce sont toutes des idées réalisables. Je veux que les enfants se sentent aptes à transmettre leurs voix, à se sentir capables de changer les choses », lance la PDG qui fait tout pour développer chez eux cet esprit positif.

Un rêve de changer les règles du jeu politique et qui semble être aussi un motif qui a poussé les parents à participer à cette expérience et à la vivre avec leurs enfants. Une simple tournée dans les coulisses de l’école révèle cet esprit optimiste qui règne. « Si notre génération n’a pas réussi à exaucer son vœu, peut-être que la jeune génération y parviendra », dit un père. Des slogans, des promesses et des programmes qui promettent un meilleur avenir pour l’Egypte.

« Votez pour le petit Einstein », lance le petit Ismaïl. « Il faut être unis pour gagner les autres », conseille Youssef Al-Badri qui a imprimé sur sa pancarte sa photo avec l’entraîneur de la sélection nationale Hassan Chéhata. « Mon père est membre du conseil d’administration au club Zamalek, je peux me servir de ses relations pour organiser un tournoi en mon nom », ajoute le jeune Adham qui s’est servi de l’expérience de ses parents qui ont passé eux-mêmes par cette expérience d’élections pour gagner. « Il est temps de munir la bibliothèque de notre école de CD modernes », avance le jeune politicien.

A, b, c … votez

L’école s’est transformée en une ruche d’abeilles. Dans la classe de 5e C, la concurrence est ardue. Nicolas et Mahmoud ont les yeux braqués sur le tableau. Les papiers de candidature circulent d’une main à l’autre. Le titulaire joue le rôle du juge. Il surveille le processus électoral. Les assistants sociaux contribuent à la surveillance. Les enfants commencent à voter pour les noms inscrits au tableau. Nicolas a reçu 8 voix sur 18 alors que Mahmoud en a obtenu 8 autres. Une seule voix va déterminer le gagnant. Trois élèves n’ayant pas posé leur candidature vont se charger du dépouillement. Nicolas est gagnant. Les deux candidats qui ont voté l’un pour l’autre se serrent la main. Nicolas va mettre en application son programme électoral qui vise à semer la paix entre les élèves. « Je déteste les conflits et je vais œuvrer pour éliminer les raisons des différends, surtout entre Youssef et Ramez qui se disputent tout le temps », résume Nicolas. Un appel qu’il espère voir appliquer dans le monde des grands pour mettre fin aux conflits. Une leçon que les petits veulent transmettre. La diversité religieuse ne les empêche pas de choisir le candidat le plus approprié. « Il est vrai que Ramez est mon ami, mais j’ai opté pour Jonathan car je pense qu’il est plus apte à servir la classe et à nous donner la chance de former une équipe de foot », explique le petit Youssef. Ici, on n’a pas besoin d’appliquer le système du quota pour réserver des sièges aux coptes car sur 5 sièges, les élèves coptes en ont remporté 4.

La bataille électorale continue à s’enflammer d’une classe à l’autre. Les nerfs sont tendus en 4e primaire. Un état d’alerte règne. Joie, espoir et angoisse sont au rendez-vous. La petite Chahi pleure après sa défaite. Kenzy, qui jouit d’une très grande popularité dans sa classe, est en avance. Elle attend avec impatience le nombre de voix que rassemble sa rivale. La campagne n’est pas terminée, puisque toutes les deux ont obtenu le même nombre de voix. La petite Habiba insiste du regard pour mobiliser ses amis à voter pour elle. « Je suis sûre que je vais gagner. J’ai au moins le consentement de 5 amis », avance Habiba qui, malgré les promesses, a perdu. C’est Kenzy qui a gagné. Fière de sa victoire, la petite sera nommée secrétaire de sa classe. La petite commence à recevoir des félicitations mais aussi des remontrances de la part de ses camarades. Nour montre son angoisse. « J’ai peur que Kenzy ne change de caractère. Elle pourrait devenir arrogante et nous donner des ordres », confie Nour d’un ton mature. Et d’ajouter : « Les sièges ont une force magique sur les gens, c’est ainsi que me répète souvent maman ».

Dina Darwich

 




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