Al-Ahram Hebdo,Nulle part ailleurs | Souris à la vie, la vie te sourira

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 Semaine du 24 au 30 novembre 2010, numéro 846

 

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Nulle part ailleurs

Initiative . Faire face à l’avenir avec un sourire radieux et savoir être optimiste en toutes circonstances, tel est l’objectif du club de l’optimisme. Une première pour lutter contre la déprime chez les Egyptiens, classés parmi les peuples les plus pessimistes du monde. Focus.

Souris à la vie, la vie te sourira

Un adage africain dit : « Même quand il y a le feu en bas, il faut que toutes tes dents soient dehors ». Une phrase qui veut dire qu’il faut garder le sourire malgré toutes les adversités et rester positif même face à la crise ... Telle est la devise de Fayrouz Omar, PDG d’une ONG appelée Qalb kébir (grand cœur) et directrice de ce club de l’optimisme, le premier du genre. D’après elle, le mot optimisme a disparu du langage quotidien des Egyptiens, à cause des souffrances endurées ces dernières années. Il suffit de suivre les mines qui défilent dans les rues pour voir les visages sombres, les nerfs à fleur de peau et les disputes qui éclatent au moindre malentendu. La tristesse s’observe sur les visages reflétant les maux d’un quotidien pesant. Des difficultés en matière de nourriture, éducation, santé, sécurité et justice ont modifié la personnalité des Egyptiens réputés pour être un peuple de la nokta (qui adore la blague), mais qui est devenu aujourd’hui l’un des plus déprimés et pessimistes du monde. Et ce, d’après une étude faite par l’institut Gallup, une institution américaine qui mène des sondages, repris comme indices dans la presse mondiale. Le sondage effectué sur 150 000 personnes dans 140 pays a posé des questions sur les prédictions de chaque individu à propos de son statut, son opinion sur son gouvernement et ses aspirations pour une vie meilleure. 89 % des sondés confient être optimistes, surtout les peuples brésilien, irlandais, danois et néo-zélandais, à l’encontre des Egyptiens et des Zimbabwéens venus en tête de liste des peuples les plus pessimistes. De là, l’idée a germé dans l’esprit du Dr Fayrouz qui a décidé de créer le club d’optimisme afin de convertir les gens à la bonne humeur et à la voie positive.

Admettons-le d’emblée : être sarcastique, pessimiste, voire un peu aigri, c’est terriblement trendy ... A l’inverse, une bonne humeur permanente est souvent jugée suspecte. La preuve : aucune personne n’ose afficher un grand sourire au quotidien. Parce que depuis le Candide de Voltaire, les optimistes passent pour des idiots. Même Gustave Flaubert avait défini cet a priori dans son Dictionnaire des idées reçues : « Optimiste : équivalent d’imbécile ». Avancer l’optimisme comme remède pour en finir avec les maux de la vie relève donc de la propagande médiatique. « Pour moi, l’optimisme est justement l’inverse de voir la vie en rose. Je l’appelle la pensée positive. On devient optimiste en percevant clairement les sentiments et les pensées négatifs qui habitent notre cerveau et règlent notre façon de réagir face aux événements. Une fois identifiées, ces pensées négatives ne peuvent plus nous commander aussi facilement. Il n’est pas question de rester positif envers et contre tout ou de forcer son positivisme, mais l’important est de ne jamais renoncer », explique Dr Fayrouz, tout en ajoutant que l’optimisme n’est pas une aptitude congénitale au bonheur qui nous affranchirait des problèmes douloureux et des grands chagrins de notre vie, mais un apprentissage et un nouveau style de vie par temps de crise, d’où vient le rôle primordial joué par ce club.

Créé il y a deux ans, le club d’optimisme se trouve dans deux quartiers, Al-Haram et Hélouan. La plupart de ses membres sont des jeunes et son but est de lutter contre la déprime des Egyptiens, surtout ceux qui utilisent le slogan « Ça ne sert à rien ». Le club offre des stages durant six semaines en échange de 50 L.E. par mois. Une courte durée mais qui s’avère suffisante pour s’initier à l’optimisme. Ici, l’apprentissage se fait de façon indirecte basée essentiellement sur les jeux, les films vidéo, la musique, les couleurs, le sport et surtout les séances de « défoulement ». Dans ce club, on rencontre toutes les tranches d’âge, puisqu’il s’adresse à tout le monde. « Notre club ne cherche pas à convaincre seulement les pessimistes, les sceptiques ou autres cyniques, mais il s’adresse aussi aux personnes qui ont opté pour l’optimisme, et ce contact augmente la force et l’efficacité de leur enthousiasme », affirme Fatma, directrice du club.

Mais que pourrait faire ce club face à ces misères ? Et comment réussirait-il à booster le moral et vaincre le pessimisme ambiant ? Est-ce en distribuant des pilules de gaieté ? Des questions qui sont posées à tort et à travers par les gens, après avoir lu la publicité faite pour joindre ce club. « Nous travaillons d’abord sur les citations que répètent sans cesse ceux qui voient le verre à moitié vide et qui reflètent l’impuissance et les pensées négatives comme : ça ne sert à rien ... il n’y a pas de sécurité ... tous les gens sont mauvais ... la vie est moche et ne vaut pas la peine d’être vécue, etc. Sans oublier encore les raisons personnelles et permanentes avancées en guise d’explications des échecs, comme : je suis stupide, je n’ai pas de chance ... et qui font le lit du pessimisme. Puis nous essayons de changer la vision des choses, de remettre en cause les pensées dévalorisantes et d’entreprendre l’action au lieu de l’impuissance », dit-elle, tout en soulignant qu’en pratiquant la pensée positive, la personne réfléchit avant de stresser devant une situation, pense aux conséquences et de la manière par laquelle elle peut s’en sortir. Est-ce que le fait d’angoisser, de pleurer ou de stresser devant une situation difficile va changer cette situation en une autre meilleure ? Telle est l’indispensable gymnastique pour les tempéraments chagrins qui veulent modifier leur disposition d’esprit.

Soyez optimiste

Passons à la pratique. Dans ce club où les activités durent deux heures seulement, de 19h à 21h, le rythme est très accéléré. Pourtant, tout est bien organisé. Une vingtaine de personnes, hommes et femmes, petits et grands, sont réunies dans une grande salle, le moins âgé a 16 ans et le plus âgé 52 ans. A noter que souvent, les séances s’effectuent en dehors, soit dans un centre culturel comme Saqiet Al-Sawi ou dans les différents jardins en plein air. Une situation idéale pour un club ? Le coach, une psychologue toujours souriante, les divise en quatre groupes et donne à chaque membre un plat contenant différentes graines, lentilles, riz, petits pois, fèves, haricots, etc. et leur demande de mettre chaque espèce à part et en un temps record. Le groupe qui gagne est effectivement celui qui a commencé par séparer les grandes graines, ensuite les moyennes et enfin les plus petites. Un jeu et une méthode qui montrent qu’il faut commencer à résoudre les grands problèmes et ne pas s’attarder aux petits détails ou aux petits conflits. Un autre jeu, celui de mettre une quantité d’eau dans une main et d’essayer de la déplacer d’une main d’une personne à l’autre. Puis voir la quantité perdue, et ce pour apprendre la valeur de la collaboration dans la vie. « Il faut sortir du moi-je pour faire revivre un nous sincère et audacieux », leur dit Asmaa Sayed, le coach. Une fois les jeux terminés, la séance de « fadfada » commence. Chacun des membres commence à parler ouvertement et à raconter ses soucis. Cette séance a une grande utilité car non seulement elle fait sortir les ennuis emprisonnés, mais elle met également à jour les pensées qui leur viennent face aux difficultés, en étant à l’écoute du dialogue qu’ils entretiennent avec les autres. Ainsi la personne déprimée sent un repos et une paix intérieure et les autres aussi acquièrent une expérience et comprennent qu’ils sont peut-être plus chanceux car ils n’ont pas eu d’aussi graves soucis. Parfois certains donnent l’impression d’avancer dans la vie avec la certitude qu’elle ne leur réserve que le meilleur, et d’autres sont persuadés que le pire les attend. Comme l’exemple de Samira, une secrétaire qui a peur de se marier. Elle a longtemps flirté avec la dépression, avant de se faire aider par un psychothérapeute. Elle regrette encore, à 35 ans passés, d’avoir été imprégnée par la vision négative du monde que sa famille véhiculait. « Enfant, on ne m’a pas montré le monde sous un jour favorable. Ma mère, divorcée, ruminait des idées noires à propos du mariage. Les moindres entreprises étaient, a priori, vouées à l’échec et quand les choses n’allaient pas, je me sentais à la fois incapable et victime d’une hostilité généralisée », s’exprime Samira qui autrefois préférait les couleurs très foncées, mais qui a commencé à porter aujourd’hui les couleurs claires et gaies. Or, l’affaire ne s’arrête pas ici. Autrement dit, on ne se contente pas d’exposer les problèmes, mais on essaye de faire un lien entre adversité, interprétation et conséquence. Hassan, 40 ans, est un optimiste invétéré qui ne se résigne jamais. Celui-ci raconte qu’il a traversé de sombres périodes durant son enfance. Sa mère l’a abandonné à sa naissance et son père s’est marié avec une autre. Proche de la délinquance, il a connu le manque d’affection, les fugues, la scolarité tôt achevée, les petits boulots … Jusqu’au jour où il a décidé que ça suffisait et s’est mis à vouloir. Il a commencé à travailler dans un hôpital comme porteur. Ensuite, il a suivi et réussi les cours d’aide-soignant. Puis, voulant aller encore plus loin, il a parié sur le diplôme d’infirmier. Pari gagné. « Tu te rends compte, dit-il, moi qui n’étais rien, j’ai maintenant un boulot ». Et quand on lui parle de son triste passé, il répond : « Je n’ai pas baissé les bras. J’ai eu de la chance, je ne me suis jamais drogué ». Il ne se plaint jamais, il évoque toujours sa chance. Un accident de moto — une fracture mal réparée — l’a obligé à rester plus d’un an plâtré et marchant avec des béquilles. « J’ai de la chance, je suis vivant », assurait-il, toujours souriant. Et de poursuivre : « J’imagine toujours qu’il existe une issue favorable et qu’il m’appartient de trouver la solution, car souvent d’une expérience négative ou d’un échec peut naître quelque chose de meilleur ».

Le secret du bonheur

Dans ces séances, il est important de respecter le niveau de chacun. Le coach peut évoquer une voie ou une solution devant quelqu’un qui souhaite s’en sortir. Mais le chemin n’est pas le même pour tout le monde. Le secret du bonheur, alors ? Le lâcher-prise. Ne plus avoir peur de l’échec, oser avancer, apprendre à rebondir et ne jamais se laisser décourager. Facile ? Pas tant que ça !, lance Asmaa qui, avant de terminer la séance, n’oublie pas de leur entretenir une importante habitude. Et voici une méthode simple qu’elle emploie au quotidien : le sourire !

Et ça marche ! Chaque jour, dès le matin, regardez-vous dans la glace et faites-vous un grand sourire. Faites du sourire un exercice. Vous ne ressentez pas de la joie ? Souriez quand même, le sentiment de joie surviendra. Dans la journée, souriez souvent, à vous-mêmes, à vos proches, aux amis, aux connaissances que vous croisez dans la rue. Non seulement vous vous ferez du bien, mais vous attirerez la sympathie. Au lieu de grimacer avant d’accomplir une corvée, souriez. Vous verrez, c’est stimulant. Et votre travail vous paraîtra plus facile. Chaque fois que votre esprit tend à basculer vers la morosité, faites un sourire. Il déclenchera une bouffée d’optimisme. « La concentration sur une idée entraîne l’état correspondant. Par exemple, l’idée de calme amène le calme, l’idée d’énergie amène l’énergie. Et si vous vous concentrez sur une idée optimiste, elle entraînera un état optimiste. Vous voulez accomplir une action ? Pensez d’abord : est-ce possible ? Si vous jugez que c’est possible, pensez : je le veux. Et rassemblez-vous mentalement sur la chose à faire. Vous verrez ensuite qu’elle s’accomplira facilement. Bref, l’humour est la seule clé qui ouvre toutes les portes. Chaque jour qui passe est le premier jour du reste de notre vie, alors il faut en profiter au maximum », conclut Asmaa avec un grand sourire, tout en assurant que s’il fallait encore une raison pour rejoindre le camp des optimistes, rappelons que ceux-ci sont en meilleure santé, grâce à un système immunitaire plus efficace.

Reste ensuite à s’entourer de gens qui ont la pêche car, bonne nouvelle, l’optimisme est contagieux ! Ensuite, gardons à l’esprit que le bonheur est aussi une décision. On peut choisir d’être heureux, mais pour réaliser cela, il faut le vouloir. Vraiment.

Chahinaz Gheith

 




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