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  Président Abdel-Moneim Saïd
 
Rédacteur en chef Mohamed Salmawy
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 Semaine du 6 au 12 janvier 2010, numéro 800

 

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Evénement

Securité. Une marche pour la levée du blocus contre Gaza entreprise par des Français appartenant à une association civile a pris une tournure plutôt aigre.

Avec les Français dans
 la « bande de Guiza »

Un bras de fer s’est engagé entre les activistes et le gouvernement égyptien. Reportage sur une manifestation insolite.

La scène est incroyable, surtout pour les passants égyptiens habitués à ne pas « crier trop fort » leur révolte contre certains agissements de leur gouvernement. Sur les trottoirs du Caire devant l’ambassade de France à Guiza, 300 militants français sont encerclés par une centaine de policiers anti-emeute. Cela n’a pas l’air de les effrayer pour autant. Ils continuent de scander leurs slogans haut et fort : « Libérez Gaza », « Gaza, Gaza, on oublie pas ! ». Certains d’entre eux brandissent des drapeaux palestiniens, d’autres portent le célèbre keffieh palestinien et des t-shirts verts sur lesquels sont inscrits « Palestine vivra » d’un côté et « Boycott Israël » de l’autre. Ils sont tous membres du collectif CAPJPO Europalestine, une association de citoyens français de toutes origines, se disant « déterminés à dénoncer sans relâche l’occupation des territoires palestiniens qui perdure depuis des décennies ».

En octobre dernier, ce collectif décide de préparer une « marche pour la liberté de Gaza » qui viendra commémorer le premier anniversaire de l’offensive israélienne sur Gaza, répondant ainsi à l’initiative lancée par CODEPINK : « The Gaza freedom march » l’été dernier aux Etat-Unis.

Arrivés au Caire le dimanche 27 décembre, ils découvrent que les cars qui sont supposés les transporter vers Rafah et avec lesquels ils avaient signé un contrat ne viendront pas, les autorités égyptiennes auraient refusé d’accorder l’autorisation. Les membres choisissent de protester vivement et entament un sit-in qui bloque entièrement l’avenue principale devant l’ambassade. La situation se développe rapidement jusqu’à ce que les forces de sécurité soient déployées et les activistes contraints à n’occuper qu’un bout de trottoir devant l’ambassade.

Deux jours après, c’est toujours le statu quo. Les cars n’arrivent pas et les activistes sont bien décidés à ne pas abandonner leur cause, même s’ils doivent pour cela endurer des circonstances exténuantes. Les ordres émis par le ministère des Affaires étrangères sont quant à eux très clairs : interdiction formelle aux médias d’approcher ou de s’infiltrer dans le groupe. Il faudra attendre que quelques-uns d’entre eux sortent de l’emprise policière « au compte-goutte » pour pouvoir les aborder. « La première nuit a été la plus éprouvante », raconte Belkacem, un activiste de 50 ans. « Nous n’avions pas le droit de nous déplacer hors de la sphère imposée par les forces de sécurité, maintenant ça commence à se relâcher petit à petit. Entre-temps, nous avons trouvé un surnom à cette place : la bande de Guiza, en allusion à la Bande de Gaza », lance-t-il sur un ton ironique. Belkacem reproche également à l’ambassade de France de ne pas avoir été à la hauteur de leurs attentes pour gérer la crise : « Une seule toilette pour 300 personnes, des queues interminables avant d’y entrer et l’obligation de montrer son passeport pour y accéder ».

Une sorte de « check-point » qu’il considère comme une injustice commise envers les expatriés joints au groupe à l’occasion de cette marche. Chris Den Hond en fait justement partie. C’est un Belge de 48 ans vivant à Paris qui reste de bonne humeur malgré les obstacles qu’il a rencontrés. « Le plus embêtant pour moi c’est la pollution sonore ainsi que celle plus marquante de l’air, il y a continuellement de fortes odeurs de gaz qui jaillissent des pots d’échappement, en conséquence, je me réveille les mains toutes noires », se plaint-il en les montrant. Mais il retrouve vite le sourire : « Ce qui est tout de même magnifique, c’est notre capacité à nous remonter le moral quand nous commençons à nous fatiguer en se demandant pourquoi nous sommes ici, sur les trottoirs du Caire, alors que notre rêve était de passer ce temps précieux des fêtes de fin d’années auprès des habitants de Gaza et leur montrer notre solidarité ».

En effet, selon Den Hond, l’enthousiasme ne manque pas. Non seulement grâce au groupe de musique MAP (Ministère des Affaires Populaires) qui a tenu à les accompagner et qui continue à les motiver, mais également par leurs propres slogans improvisés qu’ils crient en arabe, en anglais et en français. « On a même vu des larmes dans les yeux des soldats qui nous retiennent, quand certains d’entre nous se sont mis à scander : Al-Chaab al-arabi wahed ! (le monde arabe est une unité !), et ça m’a profondément touché ».

Mizian Fathallah, un autre activiste de 42 ans, préfère plaisanter sur le pittoresque de la situation :

« Quand j’ouvre les yeux le matin, la première chose que je vois, c’est les casques des soldats au-dessus de ma tête, drôle de réveil ! Au lieu d’être allongé sur une plage, on l’est sur le sol ! ». Toutefois, il reprend un air sérieux avant de continuer.

« Notre objectif n’a jamais été ni de perturber la circulation ni d’embarrasser le gouvernement égyptien comme il a été rapporté dans certains médias. Notre but était plutôt de nature politique : attirer l’attention du monde entier sur les massacres qui ont lieu dans la bande de Gaza depuis le blocus imposé par Israël ». « Si ça ne tenait qu’à nous, nous serions déjà en Palestine à l’heure qu’il est, nous avions même un calendrier d’activités prévu avec des associations civiles à Gaza jusqu’au 2 janvier prochain. Pour ce faire, les documents requis par l’ambassade d’Egypte en France avaient été fournis, toutes nos procédures et démarches sont légales depuis le début ».

Bien que les démarches en question aient été prises de longue date, les résultats sont malheureusement décevants. Belkacem le résume en quelques mots sur un air bien triste : « Cette expérience nous a donné une petite idée de ce que vivent les habitants de la bande de Gaza, mais pour ma part, je ne remettrai plus les pieds en Egypte » .

Pacynthe Sabri

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Abdallah Al-Achaal, expert juridique et ex-assistant du ministre des Affaires étrangères pour les affaires juridiques internationales, les accords et la planification politique, critique farouchement

« La barrière prive les Palestiniens de leur droit d’échapper à la mort »

la décision d’édifier une barrière souterraine le long de la frontière avec la bande de Gaza.

Al-Ahram Hebdo : Comment jugez-vous la décision de la construction de la barrière selon le point de vue du droit international ?

Abdallah Al-Achaal : La construction de cette barrière est un crime sur le plan du droit international. Pour comprendre, il faut réviser cette juridiction : chaque pays est libre de faire ce qu’il veut à condition de ne pas porter atteinte à ses voisins. Dans notre cas, la construction de cette barrière  cause non seulement des atteintes à cette génération de Palestiniens, mais aux générations futures aussi. L’Egypte a signé l’accord de Genève, ce qui implique son engagement à aider le peuple voisin victime d’une guerre, les Palestiniens, et non pas de s’associer avec leurs colonisateurs pour renforcer le blocus. Ainsi, il n’y aura ni nourriture, ni médicaments ni besoins essentiels qui pourraient être disponibles aux Palestiniens. C’est comme si on les privait du seul moyen de secours. On les prive de leur droit à échapper à la mort. Goldstone dans son célèbre rapport s’est élevé contre la fermeture du passage de Rafah. L’Egypte, avec cette barrière, se trouve en position d’un partenaire d’Israël qui œuvre pour éliminer le peuple palestinien, c’est un génocide. Le gouvernement égyptien a en plus commis un crime humanitaire.

Quelles seraient les répercussions de cette initiative sur les plans interne et externe ?

— Le rôle régional de l’Egypte a connu une détérioration en faveur d’autres forces, comme la Turquie. L’établissement de cette barrière risque de confirmer ce recul. Actuellement, le chef d’Etat à stature régionale est Erdogan. Le gouvernement égyptien explique que sa décision vise à protéger la sécurité nationale contre la contrebande des armes et drogues. En fait, cette décision ne peut pas être justifiée de cette façon. Pour la contrebande, elle existe sur toutes les frontières et il y a d’autres mesures prévues pour la régler, cette décision vise en premier lieu l’élimination du Hamas. Et pour la sécurité nationale, elle est certainement menacée par ce projet de cette barrière, à l’origine israélo-américaine, selon le pacte signé en 19 janvier 2009 entre les deux ministres des Affaires étrangères israéliennes et américaine, Tzipi Livni et Condoleezza Rice. Un projet israélo-américain exécuté par l’Egypte. La Cour internationale de justice a condamné le mur qu’Israël a érigé en Cisjordanie parce qu’il est construit hors des territoires israéliens. Donc pour leur faciliter la tâche, nous avons construit une barrière sur notre territoire qui sert leurs buts. Le cœur du problème est que la décision égyptienne n’est pas indépendante. La notion des intérêts suprêmes de l’Egypte n’est pas définie clairement. Et sur le plan intérieur, c’est erroné de prendre une décision pareille alors qu’on est à proximité des élections.

Quelle est la réaction positive qui peut être prise a cet égard ?

J’appelle tous les Egyptiens à intenter un procès contre le gouvernement pour déclarer un refus populaire commun contre l’établissement de cette barrière. J’appelle aussi au changement à travers les élections, c’est le seul espoir d’un pays en voie de développement l

Propos recueillis par
Mavie Maher

 

 

 




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