Gabon . En attendant les résultats complets prévus jeudi, les trois grands favoris ont promis un partage plus équitable des ressources naturelles. Le fils du président défunt semble être en tête.

En attente du vainqueur

Comme prévu, les Gabonais ont voté dimanche dernier en masse pour élire le successeur du président Omar Bongo. Il s’agit de 18 candidats dont trois sont les grands favoris et déjà ces derniers ont annoncé leur victoire. Ces trois favoris, Ali Bongo, André Mba Obame et Pierre Mamboundou, ont promis un partage plus équitable des ressources pétrolières, minières et forestières.

A cause de cette situation enflammée, les autorités gabonaises ont lancé des appels au calme. « Nous avons commencé cela dans le calme, continuons dans le calme », a déclaré la présidente par intérim, Rose Francine Rogombe, qui a demandé aux candidats d’accepter les résultats de cette élection et de ne pas envoyer leurs partisans dans la rue. De nombreux observateurs et candidats affirment craindre des troubles post-électoraux comme dans plusieurs pays africains. « Le Gabon est un pays de paix, nous sommes habitués à organiser les élections régulièrement. La démocratie, c’est accepter le succès comme la défaite », a estimé Rogombe. Dans le système électoral à un tour du Gabon, le candidat qui obtient le plus de voix est déclaré vainqueur, même s’il ne réunit pas la majorité absolue.

En effet, la situation était tendue, au cours du scrutin dans plusieurs quartiers de Libreville, ainsi que dans certaines provinces. De son côté, Ali Bongo, fils du défunt président, Omar Bongo, a déclaré dimanche dernier penser faire un « très bon score » s’approchant « de 50 % ». Dans cette même lignée, le Parti Démocratique Gabonais (PDG, au pouvoir), a déclaré que son candidat, Ali Bongo, était le « gagnant » de l’élection présidentielle, sans toutefois fournir de chiffres officiels. « Les résultats nous donnent gagnants, largement gagnants ». Cependant, les analystes notent qu’il conserve une forte influence sur l’Etat et l’appareil du PDG. « Le candidat du PDG a été bien élu et les chiffres de la CEnap (Commission Electorale Nationale Autonome et Permanente), et ultérieurement de la Cour constitutionnelle, le confirmeront », a déclaré lundi le secrétaire général du PDG, Faustin Boukoubi. Alors qu’aucun chiffre n’avait encore été communiqué ni par la Cénap, ni par le gouvernement ou par le ministère de l’Intérieur, qui co-organisent les scrutins au Gabon.

Mais les déclarations de Bongo sont partagées par son adversaire. Son opposant historique, Pierre Mamboundou, s’est présenté, lui aussi, comme le vainqueur, parlant de « victoire finale ». En effet, Pierre Mamboundou, 62 ans, a été investi candidat par une coalition de cinq partis, l’Alliance pour le Changement et la Restauration (ACR). Il a été candidat aux présidentielles de 1998 et 2003 qu’il affirme avoir remportées. Surnommé « l’homme en rouge » pour sa couleur de prédilection — signifiant « carton rouge » au régime, selon ses militants —, il n’a jamais participé à un gouvernement. Il est de l’ethnie des Punu (ou Bapunu), la deuxième selon l’importance numérique.

Quant au 3e favori du scrutin, André Mba Obame, il se présente en indépendant, après avoir passé 25 ans aux côtés du président Bongo. Surnommé « AMO », il a été longtemps très proche de Ali Bongo. Il a détenu plusieurs portefeuilles ministériels, dont celui de l’Intérieur (2005-2009). En effet, il est considéré comme le rival le plus sérieux. A 48 heures du scrutin, cinq candidats à l’élection présidentielle ont annoncé vendredi la formation d’un front commun pour tenter de barrer la route à Ali Bongo, en décidant de se désister au profit d’André Mba Obame.

Pendant la campagne, Ali Bongo, 50 ans, investi par le Parti Démocratique Gabonais (PDG, au pouvoir), a pu profiter de la machine électorale fondée en 1968 par son père Omar Bongo. Le PDG a remporté toutes les élections nationales depuis l’avènement du multipartisme en 1990. Ali Bongo faisait face à 22 candidats jusqu’à l’annonce, vendredi dernier, du désistement de cinq d’entre eux en faveur de l’ex-ministre de l’Intérieur (2005-2009), André Mba Obame, laissant 18 candidats en lice.

Sans renier la figure de Omar Bongo, tous les candidats — y compris ceux restés longtemps dans les arcanes du pouvoir — ont reconnu le peu d’efforts réalisés pour le développement sous son régime, réputé clientéliste et corrompu. Plusieurs présidentiables ont critiqué la validité du fichier électoral jugeant le nombre d’électeurs trop élevé pour une population d’1,5 million d’habitants.

Plus de 300 observateurs nationaux et internationaux étaient accrédités pour surveiller le scrutin. Les résultats complets devraient être annoncés ce jeudi, selon une source gouvernementale. En effet, Omar Bongo est mort en juin à Barcelone après avoir dirigé pendant plus de 41 ans le Gabon, petit pays de 1,5 million d’habitants épargné par les conflits ethniques et qui est le cinquième producteur de pétrole de l’Afrique subsaharienne. Son fils a quitté le ministère de la Défense après s’être vu reprocher par l’opposition de bénéficier d’un avantage injustifié dans la campagne en restant à ce poste. Le Gabon exporte du pétrole depuis les années 1960, mais la plus grande partie de sa population vit dans la pauvreté et, après des années de contrôle sans faille, la fin du règne de Omar Bongo a été assombrie par l’ouverture d’enquêtes sur son énorme fortune personnelle en France. Les réserves pétrolières du pays diminuant peu à peu, plusieurs candidats — dont Ali Bongo — ont jugé venu le temps de diversifier l’économie gabonaise.

Maha Salem