Al-Ahram Hebdo,Société | Le privé gagne du terrain
  Président Abdel-Moneim Saïd
 
Rédacteur en chef Mohamed Salmawy
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 Semaine du 19 au 25 août 2009, numéro 780

 

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Société

Universités. Plus du tiers des bacheliers classés premiers cette année au bac ont décidé de s’inscrire dans des universités privées. Un changement dans les mentalités ou une simple tendance ?

Le privé gagne du terrain

Rana abou-bakr a été classée première cette année au niveau de la République, section sciences. Son pourcentage dépassant les 99 % lui permet d’adhérer à l’université qu’elle désire. On l’appelle la bûcheuse et tout le monde la considère aujourd’hui comme une star puisqu’on l’a vue parler avec tant de confiance sur toutes les chaînes satellites. Elle racontait avec plaisir son parcours avec le « monstre », qui est le bac.

A l’encontre de toutes les attentes, Rana a surpris sa famille en leur avançant qu’elle avait décidé de poursuivre ses études universitaires à l’Université américaine du Caire (AUC). Un choix qui choque sa famille. Car, fille de 2 médecins, Rana a cassé le stéréotype qui prône le fait qu’un enfant de médecin doit par conséquent suivre l’itinéraire de son père.

Mais Rana a vu que la médecine est une carrière difficile et qui nécessite des études en permanence. « J’ai choisi l’AUC car c’est une université ancienne et prestigieuse. Elle date de 1919. Et les promus de cette institution occupent des postes importants dans tous les domaines. J’ai tant rêvé d’être une Aucian », dit-elle.

Rana, qui hésite encore entre la filière biologie et électroniques, est motivée pour l’enseignement à l’AUC. Ses anciennes camarades y sont inscrites et y trouvent le système d’enseignement à l’AUC moderne et pratique. Rana va bénéficier d’une réduction de 25 % sur les frais universitaires, car elle a perdu l’option de la gratuité étant donné qu’elle a une double nationalité, égyptienne et américaine. Seul un étudiant égyptien venant d’une école gouvernementale a droit à la gratuité des études à l’AUC.

Dr Amani Khaïri, la maman de Rana, a hésité au début, ne comprenant pas le choix de sa fille qui avait la possibilité de s’inscrire dans n’importe quelle université publique et suivre des études en médecine gratuitement.

Autrefois, la faculté de médecine du Caire était le choix idéal. Aujourd’hui, les meilleurs voient les choses autrement. « Je craignais que le choix de ma fille ne signifie qu’elle soit comparée à ceux qui n’avaient pas obtenu un pourcentage élevé au bac. Je ne comprenais pas pourquoi elle insistait à s’inscrire dans une université privée et avec de l’argent. Mais elle m’a convaincue en me disant que tout le monde savait qu’elle était brillante et qu’elle était libre de choisir », commente sa mère.

En effet, être parmi les premiers laisse toujours les parents et les élèves perplexes. Car un pourcentage élevé au bac signifie avoir droit à toutes les filières dans toutes les universités. Face à cette grande variété, faire un choix semble être une mission difficile.

En Egypte, et pendant des générations, les premiers étaient condamnés à choisir entre médecine, ingénierie ou pharmacie dans les universités publiques. Aujourd’hui, les choses ont changé, les choix aussi.

La bourse universitaire cette année révèle un véritable changement dans les mentalités. Sur les 35 classés premiers au bac, que ce soit dans la section sciences ou lettres, plus du tiers ont opté pour les universités privées.

Israa est la fille d’un ingénieur. Elle a été classée parmi les premières, section lettres. Ses parents l’ont encouragée à s’inscrire dans une université privée. « Nous avons pris cette décision durant l’année scolaire », dit le père. C’est au début de l’année qu’Israa a passé un examen d’admission à l’Université allemande et avec succès. Ses parents étaient prêts à dépenser n’importe quelle somme pour qu’elle fasse ses études dans une université privée. Mais la belle surprise est qu’Israa a eu un haut pourcentage au bac et peut donc y suivre gratuitement ses études universitaires. « D’habitude, les premiers en section lettres ont comme première option la faculté de sciences politiques, mais pour que ma fille devienne diplomate, il lui faudra un grand piston et je ne veux pas que son avenir dépende d’une telle intervention », explique le père d’Israa. Comme beaucoup de parents, il est convaincu que les promus de l’AUC et de l’Université allemande trouvent facilement des offres d’emplois sans attendre chez eux un seul jour.

Et même si ce père a étudié les beaux-arts dans une faculté publique, il sait que les choses ont changé. « A l’époque, le nombre des étudiants dans la promotion donnait plus de chance de communication avec le professeur, d’où l’opportunité d’apprendre plus facilement », regrette-t-il.

Le public en mal d’existence

Il est vrai que sur les 500 meilleures universités du monde, aucune université égyptienne publique n’y figure. Avec des milliers d’étudiants dans chaque promotion, les amphithéâtres encombrés où les étudiants arrivent à peine à entendre les explications du professeur, les laboratoires modestement équipés et le cercle vicieux des cours particuliers, les universités publiques n’attirent plus.

Au fil des ans, ces institutions publiques n’ont pas réussi à répondre aux besoins des étudiants brillants.

Il est vrai que les coûts exorbitants des universités privées empêchent la plupart des étudiants d’y accéder. Or, les bourses proposées par ces institutions sont une aubaine pour ceux qui ont été classés premiers.

D’après Alaa Sabet, chef de la rubrique Enseignement dans le quotidien Al-Ahram Al-Massaï, le Conseil suprême des universités a adressé dernièrement de fortes critiques aux universités publiques en ce qui concerne le niveau des études qu’elles offrent aux étudiants. « Certaines filières dans des universités publiques ont été jugées inférieures aux normes. Le conseil avait même proposé aux étudiants qui possèdent les moyens financiers de s’inscrire dans des filières payantes au sein des universités publiques », explique Sabet.

Le peu d’intérêt accordé au côté pratique dans les universités publiques a aussi encouragé beaucoup d’étudiants à s’inscrire dans des universités privées. Ces dernières offrent des avantages auxquels on ne peut résister, tels que des stages de formation à l’étranger, des bourses dans des entreprises multinationales de renommée et des offres d’emploi, sans compter les laboratoires super-équipés et les locaux qui ressemblent à des hôtels cinq étoiles.

Mais, leur côté le plus fort s’avère être le système d’études modernes convenant aux besoins du marché du travail. Ce qui explique pourquoi tous les diplômés de ces universités sont recherchés.

Cette année, et pour attirer un grand nombre parmi les meilleurs bacheliers, les universités privées ont entamé le pas pour les trouver. Elles ont offert des bourses à tous ceux qui ont été classés premiers au niveau de la République. Et ce, tout le long de leurs études. « Nous avons introduit des filières comme l’ingénierie de communication et la pharmacie bio-technologique. De telles filières n’existent plus dans les universités publiques », explique Dr Mahmoud Hachem, président de l’Université allemande.

« Nous avons comme mission de sélectionner les étudiants prometteurs qui peuvent jouer un rôle dans l’avenir. Nous n’acceptons que les élèves ayant obtenu plus de 90 % au bac et ce, pour préserver le niveau de notre université. Le fait de choisir dès le départ les meilleurs est une façon de focaliser sur les cerveaux qui peuvent aider dans le processus du développement ». Le Dr Hachem précise que le système des bourses universitaires a été appliqué dès le premier jour de l’inauguration de l’université en 2003 et 25 étudiants en ont bénéficié. Actuellement, on en compte 315, soit le tiers du nombre d’étudiants de l’université. Un niveau d’enseignement de qualité et une diversité des choix qui expliquent pourquoi la tendance générale penche de plus en plus vers l’éducation privée.

Pourtant, Dr Salwa Al-Gharib, secrétaire générale du Conseil suprême des universités publiques, voit que cette tendance ne va pas durer longtemps. Pour elle, le grand nombre d’étudiants dans les universités publiques est la raison de leur détérioration. Un phénomène que le gouvernement a décidé de prendre en charge. « Nous avons décidé de consacrer une somme d’un milliard de L.E. pour la réforme de l’enseignement dans les universités publiques. Nous allons construire 20 nouvelles facultés au niveau des 17 universités publiques dans toute l’Egypte ».

Une étape qui, selon Al-Gharib, redonnera à l’université publique son prestige d’antan et lui permettra de concurrencer les universités privées qui, au départ, suscitaient beaucoup de doutes quant à la qualité de leur enseignement et n’attiraient que les étudiants en manque de pourcentage suffisant pour accéder aux filières publiques prestigieuses. Mais la tendance a vite basculé en l’espace de quelques années.

Dossier réalisé par Dina Ibrahim


 

De Kafr Al-Cheikh
à la GUC

Mohamad Abdel-Hakim Abdel-Razeq, originaire de Kafr Al-Cheikh, un des gouvernorats du Delta, s’est classé le premier dans la filière maths au niveau de la République. Ce jeune garçon, pieux et conservateur, confie que ce n’est pas difficile d’être le meilleur. « Je trouve que le fait de se concentrer sur ses études au moins 3 heures par jour est suffisant pour avoir de bonnes notes ». Etre classé premier de la République l’a fortement réconforté et il a senti que toute sa vie a totalement changé.

« Je suis issu d’une famille de classe moyenne, plus proche de la pauvreté. Grâce à cette réussite, j’ai pu remplacer la souffrance de mes parents par la joie et la dignité. Je suis très reconnaissant pour les efforts qu’ils ont déployés pour que je puisse achever mes études scolaires très coûteuses à cause des cours particuliers », dit Abdel-Razeq. Et d’ajouter qu’aucun élève ne peut échapper aux cours particuliers, surtout durant les 2 années successives du baccalauréat qui déterminent l’avenir de tout un chacun. Puisque ce problème existe aussi dans les universités publiques, Abdel-Razeq a pensé à autre chose et a profité de son haut pourcentage pour s’inscrire, et gratuitement, à l’Université allemande. Il a non seulement bénéficié d’une bourse, mais aussi d’une chambre gratuite dans la cité universitaire. « J’ai reçu une autre bourse de l’Université britannique, mais sous la condition d’obtenir la mention très bien tout le long de mon cursus universitaire ». Alors que l’Université allemande n’exige que la mention bien pour conserver sa bourse.

Abdel-Razeq ne pouvait pas se permettre de prendre ce risque puisque le fait de perdre sa bourse signifierait pour lui reprendre tout à zéro dans une université publique et donc gratuite. « La première année à l’université privée sera difficile car je dois m’intégrer dans un autre niveau social d’étudiants, en plus de toutes les matières qui sont en anglais alors que je sors d’une école publique ». Il est inquiet quant à la découverte de ce nouveau monde, car il n’a jamais quitté sa ville natale. Il va se retrouver dans un milieu destiné à des étudiants issus d’une classe aisée. Mais ce petit combattant n’a pas l’intention de baisser les bras. « Mes rêves sont plus grands que moi. J’aimerais devenir PDG dans une société de grande renommée dans le domaine de l’ingénierie ».

Chebl,
un as de la mécanique

« Je ne voulais plus être sous le joug des professeurs qui préfèrent soutenir les enfants de leurs collègues, ni subir n’importe quelle autre injustice, car je n’ai pas de piston », dit ouvertement Amr Chebl, classé deuxième, section maths, au niveau de la République. Cet Alexandrin a opté pour l’Université allemande (GUC) car le choix de sa spécialisation convient le mieux à son cursus scolaire au Victoria College. Faire des études en anglais n’est pas une difficulté pour lui car c’est sa première langue. Chebl a toujours été un excellent élève et porte un grand amour à son école qu’il considère comme son premier foyer. « J’avais l’habitude de m’inscrire aux concours et je les ai tous gagnés pour rehausser le prestige de mon école que j’aime beaucoup », explique Chebl, qui considère les concours comme un moyen de confirmer ses compétences intellectuelles. Chebl est persuadé que le système d’enseignement à l’Université allemande est différent, car les étudiants mènent un mode de vie autre que celui des universités publiques. Des commodités, un enseignement de qualité, des classes non chargées et des professeurs allemands sérieux et honnêtes.

Depuis sa plus tendre enfance, il s’est toujours intéressé à la mécanique. Son père, qui possède une entreprise de camions et de poids lourds, était étonné de le voir réparer des pièces et poser des tas de questions aux mécaniciens.

Chebl confie avoir toujours détesté le parcœurisme. Son vrai plaisir c’est de réfléchir et de faire un travail manuel. « Je voudrais devenir ingénieur en mécanique car j’ai le don et la patience de démonter un moteur, pièce par pièce. Je comprends aussi les systèmes électrique et hydraulique qui font fonctionner une voiture ». Il justifie ainsi son choix de la filière.

Yasmine,
une fille qui voit loin

Yasmine Chaalane a été classée troisième au niveau de la République. Elle a choisi de satisfaire ses parents en portant le titre de docteur, mais pas en faisant des études en médecine, mais plutôt en pharmacie. Cette étudiante du Sacré-Cœur d’Alexandrie a plusieurs dons. Elle n’est pas une simple bûcheuse, mais elle aime aussi le basket-ball et la natation. Elle a conservé tous ses livres littéraires et préfère lire Charles Dickens et Shakespeare.

La perfection est toujours l’objectif de Yasmine, même dans les jeux. Elle se passionne pour enregistrer de grands records dans les jeux sur ordinateur.

Yasmine ne se contente pas d’avoir été la meilleure à l’école, mais elle veut continuer à l’être à l’université. Et elle voit que si elle avait choisi une université avec un grand nombre d’étudiants, elle se serait perdue dans la foule.

Elle a choisi une nouvelle filière introduite dans les universités privées. « J’ai appris que la filière pharmacie bio-technologique est très demandée dans les sociétés multinationales. En bref, la tendance mondiale exige de nouvelles spécialisations allant avec la demande du marché mondial », dit Yasmine, tout en expliquant la raison pour laquelle elle n’a pas voulu faire médecine. En effet, Yasmine ne supporte ni d’être en contact avec des malades ni d’examiner des cas graves. « Je sens que c’est trop dur de voir des patients souffrir de douleurs, alors soigner un malade à travers la fabrication de médicaments est plus proche de mon caractère ». Ce choix correspond parfaitement à ses aspirations d’autant plus que la pharmacie offre des spécialisations très intéressantes.

Elle compte se pencher sur la médecine alternative et aspire à découvrir d’autres techniques de traitement.

 




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