Les
Arabes préfèrent Netanyahu
Wahid
Abdel-Méguid
Quelle
scène surprenante ! Le premier ministre israélien Benyamin
Netanyahu, connu pour son extrémisme, participe à la
cérémonie organisée par l’ambassade égyptienne à l’occasion
de la commémoration de la Révolution du 23 Juillet.
Netanyahu ne s’est pas contenté de ce geste qui lance un
message implicite. Il a longuement parlé de la paix alors
que c’est la dernière personne au monde en harmonie avec
n’importe quel effort de paix.
Cette
scène peut susciter une question : est-ce que Netanyahu a
vraiment changé ? La réponse est facile. Il suffit de jeter
un coup d’œil sur les conditions qu’il a posées pour
accepter « la solution des deux Etats » pour savoir qu’il
n’a pas changé. Il en est de même en ce qui concerne sa
réaction envers la réclamation du président américain de
geler la colonisation.
Netanyahu reste donc Netanyahu, c’est plutôt Israël qui
change. Son échiquier politique est en transformation à
cause d’un penchant continu vers la droite dont les milieux
deviennent de plus en plus extrémistes. En effet, la droite
est devenue le centre de pesanteur de cet échiquier, alors
que de l’autre côté, la position palestinienne s’affaiblit.
En effet, le fossé s’élargit entre les factions
palestiniennes et la division politique entre le Hamas et le
Fatah et la séparation géographique entre la bande de Gaza
et la Cisjordanie augmentent de plus en plus. Cette
division-séparation est capable de faire perdre aux
Palestiniens leur force politique qui émane de la légitimité
de leur cause. C’est cette légitimité qui, jusqu’aujourd’hui,
a empêché que le conflit soit tranché au profit de
l’occupation, bien qu’il n’existe aucune égalité dans la
balance militaire. La machine militaire sioniste n’a jamais
réussi à soumettre les Palestiniens, bien qu’ils soient
presque totalement désarmés, mais politiquement forts. Et
voilà qu’ils sont en train de perdre leur force alors que
l’extrémisme augmente de plus en plus en Israël. Il est donc
possible que dans quelques temps, les Palestiniens qui ont
toujours prôné la solution des négociations, ainsi que
d’autres Arabes, qualifient Netanyahu de modéré.
Quand
l’extrémisme s’est de plus en plus répandu en Israël, et
quand la droite extrémiste est devenue de plus en plus
forte, l’opinion de certains Palestiniens et Arabes avait
changé envers Sharon qui, auparavant, était considéré comme
le représentant de l’extrême droite et ce, alors que les
forces qui le soutenaient étaient marginales.
Or,
aujourd’hui, la droite plus extrémiste que Netanyahu n’est
plus marginale. La présence d’Avigdor Liberman au ministère
des Affaires étrangères en est la preuve. C’est la première
fois dans l’histoire d’Israël que ce ministère soit dirigé
par le leader de l’un des partis de droite les plus
extrémistes. Et par conséquent, le moins disponible d’entrer
en contact avec n’importe quelle partie arabe ou
palestinienne. Liberman n’était pas présent à la cérémonie
du 23 Juillet, alors qu’un grand nombre de ministres
israéliens y ont participé.
De plus,
Israël ne pouvait pas supporter auparavant la présence d’un
ministre des Affaires étrangères aussi extrémiste. Et même
quand des leaders likoudiens célèbres, connus par leur
extrémisme, comme Ishak Shamir et David Levy ont occupé ce
poste, ils exprimaient une certaine flexibilité apparente.
Quant à
Liberman qui s’est accaparé de ce ministère grâce à la force
de son poids politique, il n’a pas besoin d’exprimer une
quelconque flexibilité. Il sait qu’il exprime une tendance
qui peut très prochainement assumer la charge de la
présidence du gouvernement, et ce, à cause du penchant
continu dans la carte politique israélienne vers la droite.
En
réalité, ce changement n’est nouveau que dans ses taux qui
montent à une vitesse vertigineuse. Il a commencé il y a 2
décennies, quand le deuxième leader du Likoud, Ishak Shamir,
dont l’extrémisme n’a pas besoin de preuve, avait été exposé
à de fortes pressions en 1989. Le secrétaire d’Etat
américain de l’époque, James Baker, lui avait attribué la
mission d’engager un dialogue avec des personnalités
palestiniennes.
C’est
pour cela que, quand Shamir a démissionné de la direction du
Likoud en été 1992, le climat était favorable à l’élection,
à la tête du Likoud, de Netanyahu qui est encore plus
extrémiste.
Or,
Sharon, qui tenait fortement à ce poste, ne s’est pas calmé.
La distance politique qui le séparait de Netanyahu n’était
pas longue. Et il ne pouvait parier sur ce poste qu’en ayant
recours à la calomnie. Alors, dès que Netanyahu a échoué aux
élections de la Knesset en 1999 face à Barak, Sharon était
prêt à s’accaparer de la direction du Parti juste avant la
chute d’Oslo.
Le
gouvernement de Sharon, formé en 2001, a présenté l’exemple
de l’Etat « terroriste » contre l’Intifada d’Al-Aqsa, ne
laissant aucun crime de guerre sans le commettre. Cependant,
l’effondrement d’Oslo a créé des climats favorables pour une
nouvelle tendance vers des positions plus extrémistes à
l’intérieur du Likoud et d’autres forces de droite à
l’intérieur d’Israël.
C’est
alors qu’au milieu de l’année 2003, la « flexibilité » de
Sharon et ses « concessions » ont été critiquées quand il
s’est mis d’accord avec les Américains pour aider le
gouvernement de Mahmoud Abbass que Yasser Arafat avait été
obligé de former quand il allait être isolé à l’intérieur de
sa maison à Béthléem. Donc, dès que Sharon avait accepté le
redéploiement partiel des forces à l’intérieur de la
Cisjordanie et la libération de quelques prisonniers
palestiniens, il a été fortement attaqué puis obligé de
quitter le parti.
Il est
fort probable que Netanyahu connaisse le même destin à cause
de la tendance continue à l’intérieur d’Israël vers une
droite de plus en plus extrémiste. Et comme Netanyahu
dirigeait pendant 2 ans la campagne qui a provoqué la
démission de Sharon, le courant likoudien le plus extrémiste
dirigé par Mouchi Vaglean se prépare à s’engager dans un
combat féroce contre lui. Cette tendance est très proche de
celle adoptée par le parti de Liberman (Israël Baïtona). Il
en sera de même pour toutes les forces de droite en Israël à
des degrés différents, comme le parti Chass, l’Union
nationale et la Maison juive.
Par
conséquent, il semble que la question qu’il faut plutôt
poser concerne le destin du choix même de la paix et non
seulement la possibilité de lancer un nouveau processus de
paix.