Le rêve sioniste vu par les historiens
Morsi Attalla
Je ne suis pas d’accord avec ceux
qui s’opposent à la traduction des ouvrages israéliens, qu’ils soient en
hébreu, en anglais ou en français. La traduction n’a rien à voir avec la
normalisation, de plus cette position de refus constitue une certaine
arriération et un éloignement de la méthode scientifique que nous avions
adoptée après la défaite de 1967 et qui se base sur le principe « Connais ton
ennemi ». L’unique moyen de connaître les intentions et les objectifs réels de
l’Etat hébreu est de traverser l’esprit et la pensée israéliens, puisque dans
n’importe quelle société l’esprit des écrivains et penseurs constitue la
meilleure expression de la conscience, des ambitions et des rêves de cette société.
De plus, les écrits et les études
dévoilent les tendances des lignes générales de la politique de chaque Etat.
Cela n’empêche tout de même pas d’être prudent, car tout ce qui est écrit, en
particulier en Israël, n’exprime pas nécessairement la vérité de l’esprit de la
société israélienne dont la composition est très particulière.
Israël est un Etat où les
nationalités d’origine sont nombreuses et où les rôles sont très bien
distribués. De plus, grâce au patrimoine juif, l’Etat hébreu sait bien employer
les systèmes culturels, intellectuels et médiatiques comme des tubes à essai
prêts à être employés selon des objectifs très précis et des dates bien fixes.
Il y a des années, le monde arabe a été ébloui par un nouveau courant
intellectuel en Israël portant le nom de « Nouveaux historiens », dont le plus
célèbre était le penseur et écrivain juif Benny Morris. Celui-ci, avec un
nombre d’écrivains comme Tom Segev, avait guidé une campagne appelant à la
révision de l’Histoire israélienne en effectuant une nouvelle lecture
objective. Son ouvrage le plus célèbre « Rightness Victims » semblait
apparemment impartial en critiquant les politiques et les pratiques
israéliennes contre les Palestiniens. Mais le contenu dévoile une croyance
profonde du rêve sioniste qui aspire à la fondation d’un Etat juif sur les
territoires palestiniens. Ceci signifie que la critique des nouveaux historiens
se concentre sur le moyen d’exécuter le rêve sioniste au niveau de sa forme et
non pas celui de sa légitimité. En fin de compte, l’objectif est de prouver le
droit hébreu en Palestine et de justifier les pratiques atroces contre les
Arabes à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, c’est-à-dire pendant
la phase de préparation du projet sioniste armé.