Al-Ahram Hebdo, Idées | Pousser les plumes à se délier
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 Semaine du 29 juillet au 4 août 2009, numéro 777

 

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Idées

Ecriture. Les ateliers d’initiation sont de plus en plus fréquents avec des initiatives qui puisent leur source dans la nouvelle vague de librairies. Ils cherchent à impulser un changement dans la vie culturelle mais aussi à contribuer à la naissance d’une nouvelle génération d’écrivains.

Pousser les plumes à se délier

« Je ne rêve que d’une chose, c’est de devenir écrivain et un jour, je le serai », déclare Samar Ahmad, jeune participante aux ateliers d’écriture. L’image de l’écrivain comme d’une personne qui attend l’inspiration pour exprimer ses idées à l’aide d’une imagination débordante est encore tenace. Une image basée sur l’idée que l’on naît écrivain. Cependant, nombreuses sont aujourd’hui les tentatives qui tentent de démontrer qu’on peut aussi le devenir.

Intégrant une nouvelle dimension à leur rôle traditionnel, de nombreuses librairies ouvrent aujourd’hui leurs portes aux amateurs de l’écriture littéraire en leur proposant une aide professionnelle par l’intermédiaire d’écrivains connus. La pionnière dans les domaines des ateliers d’écriture est la librairie Kotob Khan qui, depuis sa création en 2006, ne cesse de prendre des initiatives pour promouvoir la vie intellectuelle égyptienne. En 2008, le premier atelier d’écriture créative a vu le jour grâce à la propriétaire et directrice de la librairie, Karam Youssef, en coopération avec l’écrivain et poète Yasser Abdel-Latif. « L’atelier a commencé par une sélection de textes envoyés par les personnes désirant y participer. Avec Yasser Abdel-Latif, nous avons choisi dix personnes, selon la cohérence du texte et, bien sûr, le style d’écriture », explique Youssef . « Au bout de dix mois de rencontres régulières, nous avons réussi à publier un livre regroupant les récits écrits par les participants », ajoute-t-elle.

Ketab al-sabea wal nisf massaa al-arbea (le livre de sept heures et demie le mercredi soir), dont le titre vient de l’horaire de la rencontre hebdomadaire des participants à l’atelier, est une compilation de récits qui portent sur le thème de la confession. Ce sont des dialogues psychologiques profonds qui tournent autour d’une histoire vécue par l’auteur ou d’une expérience personnelle. « Outre la chance d’avoir mon texte publié, l’atelier me fut d’un grand apport aussi bien personnel que professionnel », explique Nermine Idriss, participante à l’atelier, dont le récit s’intitule Wa qarrar al-arnab an yastarih (et le lapin décida de se reposer).

La vague se poursuit

Aujourd’hui, et après le succès du premier atelier, Kotob Khan accueille trois ateliers d’écriture. Le premier, dirigé encore une fois par Yasser Abdel-Latif, est cette fois un atelier de roman, « le premier roman » tel que Karam Youssef l’appelle. Cet atelier, auquel participent certaines personnes de l’atelier précédent, est plus approfondi et vise à faire rédiger par chaque participant une centaine de pages. « Nous pensions ne publier que l’œuvre la plus aboutie, mais en avançant, nous avons constaté que chacun d’entre eux mérite une publication qui lui est propre », raconte Youssef. Les ateliers de Kotob Khan ne se limitent pas uniquement à l’écriture romanesque, mais s’étendent à l’écriture ironique et sarcastique avec l’écrivain Omar Taher, connu pour ses best-sellers Chaklaha bazet (ça a l’air fichu) ou Capitaine Masr (capitaine d’Egypte), et à la critique littéraire, avec un atelier animé par l’écrivain et professeur de langue arabe Sayed Al-Bahrawi. « J’ai proposé l’idée de cet atelier à Karam car nombreux sont ceux qui me demandent une aide professionnelle dans l’écriture sarcastique », explique Omar Taher dont l’atelier a commencé il y a trois semaines.

D’un autre côté, la librairie Al-Balad a impulsé elle aussi deux ateliers d’écriture créative, le premier intitulé Al-Balad, dirigé par Bahaa Abdel-Méguid, écrivain et professeur de lettres à l’Université de Aïn-Chams. « En Egypte, nous n’avons pas d’institutions académiques enseignant les différents genres d’écriture, cela explique les succès de ces ateliers », développe Abdel-Méguid. Toutes les personnes intéressées peuvent participer aux rencontres hebdomadaires de l’atelier qui a débuté il y a quatre mois. Il n’y a pas de sélection ni de restriction, l’atelier propose des lectures critiques de textes présentés par ses participants. « Parfois, les jeunes talents ont peur de s’aventurer dans l’écriture, et cette participation leur permet d’observer de près le processus d’apprentissage, ce qui les rassure en quelque sorte », ajoute Abdel-Méguid.

La librairie accueille également un atelier intitulé Al-Hekaya we ma fiha (l’histoire et ses composantes) né d’une initiative indépendante sur un groupe du site Facebook. Les jeunes talents intéressés par l’écriture étaient invités à déposer leurs récits qui ont ensuite été sélectionnés pour aboutir aux participants à un atelier concret dirigé par l’écrivain et traducteur Mohamad Abdel-Nabi. « La création d’un atelier a toujours été mon rêve car j’ai moi-même participé à plusieurs ateliers quand je commençais mon expérience littéraire. Maintenant, je peux transmettre ma propre expérience aux jeunes talents ». Plusieurs écrivains et critiques littéraires sont invités aux rencontres de l’atelier de Abdel-Nabi, tels l’écrivain Tareq Imam ou le critique Sayed Al-Wakil et une remise de diplôme est prévue à la fin de l’atelier qui a débuté il y a deux mois. « En tant que critique, la participation à une telle manifestation littéraire m’est très importante car cela me permet d’observer les nouveaux talents au moment même de leur naissance », explique Sayed Al-Wakil.

L’apprentissage de l’écriture … possible ?

L’un des aspects intéressants de cette série d’ateliers est que les participants n’ont pas tous suivi des études littéraires, loin de là, et certains travaillent même dans des domaines très éloignés de l’écriture. Ainsi, Mohamad Farouq est-il chimiste, mais trouve l’occasion de participer à Al-Hekaya we ma fiha. « L’écriture n’est pas uniquement un moment d’illumination ou un talent, c’est aussi un travail qui requiert une technique. Cet atelier m’a familiarisé avec plusieurs techniques d’écriture comme le développement de l’idée et des personnages ». On peut également être mère, épouse, comptable et vouloir exprimer ses visions du monde comme Inès Lotfy, qui rêve de « pouvoir écrire une histoire aboutie » en améliorant son style et en perfectionnant le talent avec la bonne technique. Pour d’autres, comme Samar Ahmad, dont le talent est très apprécié par les animateurs de l’atelier de Kotob Khan, sa formation fut littéraire, mais son travail actuel dans une compagnie d’appareils mobiles est loin d’être littéraire. « Faire des études littéraires est une chose, devenir écrivain est une tout autre chose. J’ai participé au premier atelier de Kotob Khan et je participe au second car j’ai besoin d’être encadrée et d’avoir un avis qui puisse me guider dans mon processus d’écriture », explique-t-elle.

Le concept donc paraît variable, puisque c’est une combinaison de talent et de technique. « Les ateliers d’écriture en général sont des ateliers d’apprentissage. Certes, il faut faire preuve de volonté et d’inspiration, mais à mon avis, la technique d’écriture est comme toute autre technique ... elle s’apprend », explique Karam.

Dans ce cas-là, l’écriture se limiterait presque à la transcription des idées sur papier. Mais le talent et la cohérence des idées restent des éléments indispensables au processus d’écriture. « Un atelier ne crée pas un écrivain, mais il aide ceux qui ont du talent en leur donnant les techniques et les outils d’écriture », explique Mohamad Abdel-Nabi. D’après Bahaa Abdel-Méguid, « l’écriture a trois composantes, le talent, l’héritage culturel de l’écrivain et la technique ».

Yasser Abdel-Latif, le premier et le seul à avoir supervisé une expérience concrète (avec une publication collective), n’a jamais tenté d’apprendre aux participants des techniques spéciales d’écriture. Son travail consistait à les pousser à s’autocritiquer. « Dès le premier jour de l’atelier, Yasser nous a clairement expliqué qu’il ne s’agissait pas d’un apprentissage. Nos séances ont été de longs moments de sélection d’idées. Yasser nous aidait à choisir les idées les plus pertinentes, et nous guidait vers les parties qui ont une meilleure résonance littéraire, et c’est ainsi que chacun a pu créer un récit unique », raconte Samar Ahmad.

Apprentissage ou encadrement, les ateliers d’écriture, peu importe le genre, sont très fructueux et appréciés aussi bien par les participants que par les animateurs. « L’échange d’idées entre plusieurs personnes dans un atelier est plus productif que le monologue d’un seul écrivain, il stimule la créativité », conclut Sayed Al-Wakil.

Dina Abdel-Hakim
May Azmi

 




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