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 Semaine du 17 au 23 juin 2009, numéro 771

 

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Arts

Cinéma. Dans son polar irrésistible Badal faqed (remplacement), le réalisateur Ahmad Alaa réussit à montrer une quête de rédemption possible dans une complicité entre deux frères différents.

Pour sortir de l’ombre

Il y a la loi, la drogue, le genre. Cela se met en place avec un implacable ordre. Un commandant de police, Mohsen Chamseddine (Ahmad Fouad Sélim) et son épouse (Sawsane Badr) se rendent à un orphelinat pour adopter un enfant de parents inconnus, Farès. Il y a d’abord la caractérisation de ce dernier. Enfant docile, il agit avec élégance, réussit à l’école et plus tard imitant son père, il devient officier de police (Ahmad Ezz). On le voit avec son épouse Maha (Racha Mahdi), à laquelle il est peu attentif car ils n’ont pas d’enfants. Il est tout dévoué à son travail et traque un gang de dealers, dont le chef, Ezzat Al-Hennawi, est un homme d’affaires protégé par des gens haut placés.

Farès devient séduisant à force d’être une pure figure de policier superclasse, intègre qui cherche à démanteler un réseau de trafic de drogue, par des délateurs avisés. Le cinéaste Ahmad Alaa réussit à donner à chacun toute sa place. Ezzat se révèle dans son environnement quotidien aux activités criminelles et au trafic illicite de drogue importée de l’étranger à l’insu des autorités. Ceux qui l’entourent sont des assassins, dont notamment Khadach (Mohamad Lotfi), qui distribue la drogue et recrute ses acolytes parmi les mordus de la marchandise.

Le réalisateur ne se contente pas d’inventer de brillantes variantes autour des affrontements des dealers et de leurs clients déficitaires qui engendrent le polar. Il introduit un second rôle sympathique, Nabil, le double de Farès, son frère jumeau, pour donner de l’énergie au récit et autoriser une recherche formelle qui permet de se rapprocher avec une sorte de pudeur de frères jumeaux, humains qui vivent et parfois meurent du résultat de leurs actes. La présence de Nabil (interprété aussi par Ahmad Ezz) provoque d’emblée un étrange jeu avec les images, les mots et les codes. Gueule de looser mais romantique, regard ravagé par l’intoxication à la seringue, Nabil débarque dans le film comme un condensé de tout ce qui pèse de passé et de codes. Contrairement à Farès, il a été adopté par une danseuse de cabaret, Qamar (Aïda Riyad), dans une ambiance de relâchement des mœurs, dont il porte la disjonction et la déréliction.

Etrange fantôme du passé, où ses parents l’ont abandonné sans identité ou appartenance reconnue, il refuse à son tour de reconnaître la filiation de l’enfant que porte May (Menna Chalabi), fille de Hennawi, grand dealer de drogue. Le corps, le phrasé et la gestuelle de Nabil sont les contraires, la critique de ceux de Farès, presque leur effondrement. Le mélange de contraires autorise la mise en place d’un délire total. Cet assemblage d’obéissance aux règles qu’incarne Farès et de capacité de les transgresser que porte Nabil rend possibles les deux moments les plus radicaux de remplacement, où l’un passe dans le champ clos de l’autre et le second est propulsé vers l’extérieur. Ici, le film interroge la possibilité de faire trouver par chacun non l’oubli mais la puissance d’une nouvelle énergie. Cela ouvre de nouveaux espaces et sera une promesse d’innocence et de retrouvailles entre les jumeaux, séparés depuis l’enfance par une conjoncture fatale.

Farès, troquant son identité contre celle de son frère, se fait captif de Ezzat Al-Hennawi pour démonter son trafic et infiltrer son circuit. Quant à Nabil, seul sur un terrain risqué, collabore avec la police pour débusquer l’arrivée de drogue destinée à Hennawi.

Le mouvement du film s’opère sur le mode de la métamorphose. Pur jeu sur les codes, conte de la fatalité de l’appartenance (à un passé, à une histoire triste), le film, en accord avec sa logique, fait de la présence de Farès un catalyseur pour aider Nabil à trouver ses marques, se détacher de l’ombre, achevant sa vie dans la tâche noble de faire tomber Hennawi et ses affidés. Dans un souffle de légèreté, il peut ainsi s’envoler sur un rayon de soleil. Dès lors, Farès peut reprendre sa place, effacer une partie de l’existence déchirée de son frère, assumer sa responsabilité par rapport à sa famille, May et l’enfant qu’elle porte, remettant sur les rails un avenir dégagé de tout. On passe un moment heureux à voir cette première œuvre d’Ahmad Alaa, chargée d’une énergie débarrassée des conventions classiques du genre.

Amina Hassan

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