Le ministre du Tourisme, Zoheir
Garana, évoque les mesures prises pour la promotion
du tourisme en Egypte pour limiter les conséquences de la
crise économique mondiale. Il se montre confiant pour la
période à venir, malgré l’attentat survenu dimanche au
Caire.
« Il faut se concentrer sur la variété de l’offre pour viser
différentes tranches de touristes »
Al-Ahram
Hebdo : Quelles conséquences sont-elles à prévoir sur le
secteur touristique après l’attentat à la bombe dimanche
dans le quartier d’Al-Hussein ?
Zoheir Garana :
J’espère que cet attentat n’affectera pas le secteur
touristique en Egypte. Nous dénonçons cet acte abjecte qui a
fait un mort et des blessés parmi les Egyptiens et des
ressortissants étrangers. L’important maintenant pour le
gouvernement, c’est de maintenir la sécurité des citoyens et
des touristes.
— Vous rentrez d’Italie, où vous avez participé aux travaux
de la Bourse touristique internationale de Milan. Quel bilan
faites-vous de la participation égyptienne à cet événement ?
— La Bourse touristique internationale de Milan est l’une
des plus importantes au monde. Elle a été tenue cette année
avec la participation d’environ 146 Etats et plus de 5 000
exposants représentant les compagnies touristiques,
d’aviation et d’hôtellerie outre les représentants
spécialisés des médias. De notre côté, le secteur
touristique égyptien déploie tous les efforts nécessaires
pour promouvoir l’activité touristique italienne en Egypte,
surtout avec l’importance que se taille le marché italien
pour l’Egypte. L’Italie vient en tête de liste des pays
exportateurs de tourisme. Le nombre de touristes italiens
qui ont été enregistrés a dépassé un million et plus de 10
millions nuitées touristiques. Au cours de ce voyage, nous
avons passé en revue avec les organisateurs des voyages les
mesures entreprises par le ministère pour soutenir nos
partenaires à l’étranger. Nous avons entrepris d’intensifier
les campagnes de marketing conjointes et mieux former les
agents touristiques sur le produit touristique égyptien
diversifié en adoptant les meilleurs moyens de promotion et
d’activation pour faire face à la crise et réduire ses
effets. J’ai également mis l’accent sur le rôle du
gouvernement égyptien dans le développement de
l’infrastructure tout en œuvrant à attirer davantage
d’investissements durables dans l’industrie touristique.
— Votre visite en Italie signifie-t-elle que l’Egypte met
particulièrement l’accent sur le marché européen ?
— Elle a aussi pour objectif d’être au courant des derniers
développements de la scène touristique mondiale, surtout à
l’ombre des crises mondiales et régionales. Il est question
non seulement d’étudier les moyens nécessaires à promouvoir
l’industrie touristique face aux défis que l’Egypte se
trouve aujourd’hui obligée de relever. Mais également de
mesurer la réussite réalisée par le tourisme égyptien et de
montrer les mesures prises par l’Egypte pour faire face à la
crise.
— Au-delà de l’attentat dans le quartier d’Al-Hussein, quel
impact concret a eu la crise économique mondiale sur le
tourisme en Egypte ?
— Nous ne sommes pas séparés du monde et la crise a touché
la communauté internationale. Les répercussions se sont
ressenties dans plusieurs secteurs au niveau mondial. Ceci
nous a poussés à étudier profondément la situation pour
tenter de parvenir à des solutions capables d’éviter au
maximum les répercussions négatives de la crise. De plus,
certains indices de la crise étaient déjà clairs, dont le
plus important est l’inflation en particulier dans le
secteur pétrolier et alimentaire. De toute façon, la phase
prochaine prouvera si les répercussions sont graves ou
contrôlables. Et bien que la crise se soit rapidement
répandue par l’intermédiaire des baisses des taux de change
des devises, de la dépendance économique et des canaux
bancaires, elle constitue une alerte qui a poussé le
gouvernement égyptien à entreprendre des mesures de nature à
diminuer les risques.
— Quelles sont ces mesures ?
— L’économie égyptienne est fondée sur des bases et des
structures saines, correctes et claires qui permettent
d’éviter des complications. J’insiste à réclamer au secteur
touristique de ne pas toucher aux prix actuels. En effet,
quand il y a un effondrement dans un secteur, ceci influence
les autres secteurs. Par exemple, la faillite d’une grande
agence touristique britannique qui envoyait annuellement en
Egypte plus de 100 000 touristes peut avoir deux
répercussions : la réduction du nombre de touristes
britanniques en Egypte ou le transfert des quotas de
touristes d’autres agences. Il est donc inévitable de faire
face à de telles crises et faire plus d’efforts pour éviter
les répercussions de la crise en Egypte et éviter la baisse
du volume touristique en Egypte. Ne pas toucher aux prix est
donc une chose importante, puisque le cycle du rajustement
des prix nécessite entre 5 à 6 ans. Il ne faut pas refaire
la faute des crises précédentes, pendant la dernière
décennie. Dans la période à venir, il faut se concentrer sur
la variété de l’offre pour viser différentes tranches de
touristes. Il faut également que le secteur accepte la
probabilité de la diminution du bénéfice à cause de la
diminution des tranches de touristes qui ont les moyens de
voyager. Nous sommes en train de préparer des ateliers de
travail qui regroupent des experts touristiques,
économiques, médiatiques ainsi que des représentants du
secteur privé. Ces ateliers visent à détecter les éléments
de la crise et trouver des solutions.
— Mais que révèlent les chiffres récents de l’activité
touristique ?
— Le tourisme égyptien représente actuellement 11,3 % du
PNB, 40 % des exportations égyptiennes non traditionnelles,
19,3 % des recettes en devises étrangères, 12,6 % de la
main-d’œuvre et 4 % des investissements dans les services.
De plus, l’Egypte occupe la 23e position sur la liste des 50
plus grands pays touristiques et la première position en
Afrique du Nord. Le tourisme égyptien représente également
27 % du total des revenus touristiques du Proche-Orient, 1 %
des revenus du tourisme mondial et 2,55 % du volume du
tourisme mondial. De plus, le programme électoral du
président Moubarak visait à atteindre l’objectif de 14
millions de touristes en 2011, de réaliser des revenus de
10,5 milliards de dollars et 240 000 chambres touristiques.
Le nombre de touristes a atteint l’année passée 12,8
millions en comparaison avec 11,1 millions l’année d’avant
avec un taux de croissance de 15,5 % et 129,2 millions de
nuitées avec une croissance de 15,9 %. Nous avons également
atteint 211 000 chambres, contre 198 000 en 2007. De plus,
il y a 157 000 chambres en construction.
Les marchés les plus importants pour l’Egypte sont la
Russie, l’Allemagne, l’Italie, la Grande-Bretagne, la
Pologne, l’Ukraine, la Libye, la France, l’Arabie saoudite
et les Etats-Unis. De plus, les nuitées de ces 10 Etats
représentent 61,4 % du total du tourisme en Egypte.
— Quel est le budget consacré à la promotion touristique en
Egypte ?
— Le budget est évalué à 40 millions de dollars alors que le
rendement provenant de ce secteur atteint 11 milliards de
dollars. Les chiffres démontrent les acquis réalisés par
l’Egypte grâce au plan de promotion en vigueur actuellement.
Lorsque j’ai pris en charge le portefeuille du Tourisme, le
nombre de touristes était de 8,6 millions. Ce chiffre a
atteint l’année dernière 12,35 millions et nos plans visent
à atteindre 25 millions en 2020, ce qui est tout à fait
possible avec le potentiel touristique de l’Egypte.
— Comment allez-vous faire face à la désaffection attendue
des investisseurs dans la période à venir ?
— J’ai étudié ce problème avec Farouq Al-Oqda, le gouverneur
de la Banque Centrale. Nous nous sommes mis d’accord sur la
nécessité de sauver les insolvables sérieux. La Banque
Centrale va intervenir pour régler leurs problèmes pour
sauvegarder les investissements touristiques dans toutes les
régions touristiques ainsi que le personnel travaillant dans
le secteur. Il est dans notre intérêt de ne pas perdre la
confiance des investisseurs parce qu’ils constituent une
partie de la réussite réalisée par l’Etat. Il faut donc
prendre en considération leurs intérêts.
— Pensez-vous que le tourisme intérieur et arabe peut
compenser la baisse du nombre de touristes occidentaux en
2009 ?
— Le tourisme arabe et intérieur constitue une partie
importante du tourisme égyptien. Dans la phase à venir, le
tourisme intérieur sera un facteur important aidant à
dépasser la crise. Quant au tourisme arabe, il représente 19
% du total du tourisme étranger.
— Croyez-vous que cette crise favorisera le tourisme de luxe
?
— Les indices ont prouvé que le tourisme aux dépenses
élevées, les hôtels et les bateaux de croisière qui
procurent des services de qualité, ont enregistré le plus
haut taux d’occupation au niveau du pays. Ceci pour affirmer
que le tourisme de luxe n’a pas été affecté par la crise
mondiale. Nous devons signaler que l’Egypte est l’un des
rares pays au monde qui jouit d’une fréquentation
touristique pendant les douze mois de l’année grâce à la
diversité de son offre. Nous avons le tourisme
archéologique, culturel et thérapeutique. Sans oublier le
climat agréable qui distingue l’Egypte tout au long de
l’année, ainsi que son peuple chaleureux et accueillant.
Propos recueillis par Magda Barsoum