Entretien.
Ismaïl Séragueddine, directeur de la Bibliotheca Alexandrina, revient sur
les 500 000 ouvrages français donnés récemment à la Bibliothèque, la classant
au 6e rang mondial.
« Ce don fera de la BA la principale bibliothèque du livre français dans
la région arabe »
Al-ahram hebdo : Quels exemples pouvez-vous donner des trésors que
possède la Bibliotheca Alexandrina aujourd’hui, sept ans après sa création ?
Ismaïl Séragueddine : Toute jeune qu’elle est, en la
comparant avec d’autres bibliothèques du monde, la Bibliotheca Alexandrina
abrite des chefs-d’œuvre dans différents domaines, puisque nous avons plus de
680 000 livres avec plus de 2 800 ordinateurs, dont 40 consacrés aux visiteurs.
Un véritable trésor est celui des 70 000 rouleaux de l’ancienne Bibliothèque
d’Alexandrie, 5 000 anciens manuscrits, des photos très rares du roi Farouq,
ainsi que le livre du fameux photographe Rio relatif à l’inauguration du Canal
de Suez. Côté arts, nous possédons l’oud du fameux musicien Sayed Darwich avec
des disques musicaux très rares, de même que la bibliothèque complète du
réalisateur égyptien Chadi Abdel-Salam en plus de 900 000 peintures très
importantes.
— 500 000 livres en langue française ont été récemment donnés à la
bibliothèque. Pourriez-vous nous donner plus de détails ?
— Ce don s’est effectué dans le
cadre des initiatives de coopération méditerranéenne menées par le président
égyptien et son homologue français, Nicolas Sarkozy, d’une part. D’autre part,
j’entretiens des discussions ouvertes avec mes collègues français qui ont aidé
dans cette donation. C’est la plus grande donation culturelle dans l’histoire
des bibliothèques, après
— Comment évaluez-vous la valeur de cette donation culturelle parmi le
trésor existant déjà au sein de la Bibliotheca Alexandrina ?
— Ce cadeau va certainement
classer la Bibliotheca Alexandrina à sa juste place parmi ses homologues. Les
quelque 40 000 livres en langue française qui constituent le patrimoine de la
Bibliotheca ont augmenté après cette offre pour atteindre plus de 536 000
ouvrages en français. Ce qui fait de la Bibliothèque d’Alexandrie la 6e grande
bibliothèque francophone dans le monde du point de vue nombre d’ouvrages
français, venant après celle de la Bibliothèque Nationale de France (BNF),
possédant 305 000 ouvrages, celle du Canada 365 000 ou la bibliothèque de New
York. D’autre part, la Bibliotheca Alexandrina sera la principale bibliothèque
du livre français dans la région arabe, devançant ainsi la Tunisie, l’Algérie
et le Maroc, ainsi que les pays d’Afrique et d’Asie.
— Est-ce que la Bibliothèque possède une politique de donation bien
précise ? Quels en sont les critères et les procédés ?
— Une section consacrée à
l’échange aux offres est chargée de faire l’échange des productions de la
Bibliothèque avec d’autres publications de toutes les institutions dans le
monde depuis la Chine jusqu’aux Etats-Unis. De plus, nous distribuons beaucoup de
publications à travers le monde, soit dans les universités et institutions ou
dans les bibliothèques nationales. Nous avons également réussi à organiser une
campagne en collaboration avec le Conseil suprême de la culture et des
particuliers pour collecter un nombre de livres pour la nouvelle ville de Fès
au Maroc dans le cadre du soutien des bibliothèques arabes.
— Quand est-ce que la réception des 500 000 ouvrages sera-t-elle
effective ?
— Une cérémonie à l’occasion de
l’envoi de la 1re cargaison s’est tenue le 30 novembre au port de Marseille
pour importer le premier conteneur qui se compose de 34 000 caisses, environ
260 000 livres. La cérémonie était en présence du représentant du président
français, du ministre français de la Culture, du président de la BNF, de
l’ambassadeur d’Egypte en France et moi-même comme invité d’honneur. En février
prochain, le restant des ouvrages sera livré lors d’une autre cérémonie
réunissant des personnalités culturelles internationales.
— Où se place la Bibliotheca Alexandrina aujourd’hui sur la carte de la
révolution numérique, notamment après le lancement de la base de données numériques
?
— En fait, de nos jours, être
électroniquement relié au monde est un des véritables défis relevés par la
Bibliotheca Alexandrina. C’est pourquoi nous avons tenu à créer la plus grande
bibliothèque numérique arabe dans le monde entier depuis quelques mois. Nous
avons réussi à numériser jusqu’à présent plus de 130 000 ouvrages en langue
arabe en littérature, sciences, religion et géographie. Ces livres sont surtout
soit des livres très spécifiques, des livres rares ou épuisés ou des ouvrages
particulièrement anciens. Aujourd’hui, cette série de livres est à la
disposition du lecteur sur le portail numérique de la Bibliotheca. Cela
garantit également la protection du patrimoine de la Bibliotheca.
Propos recueillis par Samar Zaree