Propreté.
En brouille avec la société de ramassage des ordures Veolia,
le gouverneur d’Alexandrie, Adel Labib, menace de revenir au
système des chiffonniers pour collecter les déchets ménagers.
Bras
de fer à Alexandrie
Les
chiffonniers, ces hommes qui arpentaient les rues et les
ruelles pour assurer le ramassage des ordures, seront-ils de
retour à Alexandrie ? Le gouvernorat d’Alexandrie, en
brouille avec la société française de nettoyage Veolia (en
charge de la propreté de la ville depuis 2001), a annoncé
qu’il envisageait un retour à l’ancien système de collecte
des ordures. « Nous étudions en ce moment le rétablissement
du système des chiffonniers pour ramasser les ordures
ménagères dans les rues d’Alexandrie », affirme une source
au gouvernorat, ayant requis l’anonymat. Le gouvernorat a
dit avoir l’intention d’engager des jeunes pour travailler
dans la collecte des ordures ménagères, moyennant un salaire
mensuel de 500 L.E. L’expérience sera appliquée dans le
secteur central d’Alexandrie. 10 millions de L.E. seront
consacrées à cette expérience. « Nous allons fournir 13
véhicules pour transporter les déchets vers les lieux de
déchargement. Si cette expérience réussit, nous allons la
généraliser aux autres quartiers d’Alexandrie », assure la
source anonyme. Un moyen d’agiter la menace face à Veolia.
« Nous
constatons aujourd’hui que les ordures s’accumulent un peu
partout à Alexandrie, surtout dans les ruelles. Il y a un
retard dans les horaires de ramassage des ordures et les
véhicules de collecte ne respectent plus les horaires. De
plus, le nombre de bennes à ordures mises en place par la
compagnie n’est pas du tout suffisant. Résultat : des amas
de déchets s’entassent partout », lance Mohamad Al-Sissy, du
conseil municipal de la ville d’Alexandrie.
En 2001,
le gouvernement décide de confier le nettoyage des grandes
villes à des sociétés étrangères de propreté. L’expérience
est menée au Caire et à Alexandrie, où plusieurs sociétés
opèrent désormais à la place des fameux chiffonniers. C’est
dans ce contexte que Veolia Environnement a été engagée par
la municipalité d’Alexandrie. Sa mission ? Collecter à
travers sa filiale Onyx plus de 5 000 tonnes de déchets
ménagers chaque jour. Durant les premières années de son
engagement, le groupe a réussi à améliorer la propreté de la
ville. Mais au cours des dernières années, le service de
propreté s’est dégradé et des différends n’ont pas tardé à
éclater entre la compagnie et la municipalité d’Alexandrie.
Onyx a été accusée d’avoir transformé les rues de la ville
en amas d’ordures. Les responsables de la compagnie se
défendent : « Si notre mission échoue, ce sera à cause des
habitants qui ne font rien pour nous aider », prévient
Hassan Abaza, directeur égyptien de l’entreprise française.
Et d’ajouter : « De Paris à Londres, d’Alexandrie à Miami,
nous assurons la propreté urbaine de très nombreuses villes
et de lieux prestigieux comme les Champs-Elysées. Nous avons
été affrontés à un certain nombre de problèmes. Premièrement,
le gouvernorat retarde le versement d’arriérés de paiement
dont nous avons besoin pour acheter de nouveaux équipements
et remplacer les bennes à ordures qui ont été volées ». Si
les piles d’ordures s’entassent dans les rues, c’est parce
qu’il y a un manque de bennes à ordures. « La plupart de ces
bennes ont été volées. Nous avons signalé ce problème au
gouvernorat, mais rien n’a été fait. Aujourd’hui, nous ne
disposons pas des sommes nécessaires pour fournir de
nouvelles bennes », affirme Hassan Abaza. Le gouvernorat
d’Alexandrie consacre chaque année 7 millions de L.E. pour
les travaux de propreté. Le gouverneur, Adel Labib, avait
promis le versement d’une partie des arriérées de paiement,
soit environ 25 millions de L.E., à Veolia afin de lui
permettre d’acheter les équipements dont elle a besoin. «
Nous n’avons rien eu pour le moment mais je crois que dès
que cette somme sera disponible, nous serons en mesure
d’assurer un service de propreté de meilleure qualité »,
précise Hassan Abaza. Il appelle le gouvernorat d’Alexandrie
à mettre en place une campagne pour sensibiliser les
citoyens à respecter l’environnement et à ne pas voler ou
dégrader le matériel de propreté. « Certains citoyens ont un
comportement inacceptable. Ils jettent leurs poubelles dans
les rues parfois juste à côté des bennes. Ils ne se donnent
même pas la peine d’ouvrir ces bennes pour y jeter leurs
ordures. D’autres encore n’hésitent pas à vider leurs sacs
de poubelle dans les bennes pour les réutiliser une autre
fois, laissant les ordures dispersées un peu partout. Si ces
gens ne sont pas conscients de l’importance et de la
nécessité de participer à la propreté de leurs rues, rien ne
changera », explique Abaza.
Huit ans
après sa mise en place, l’expérience des sociétés de
propreté est-elle un échec ? « Disons simplement il y a des
problèmes qui doivent être réglés », lance un responsable au
gouvernorat d’Alexandrie. Il explique que la décision de
Adel Labib de recourir à des jeunes pour collecter les
ordures au centre d’Alexandrie est une mise en garde. «
C’est un message qui consiste à dire que la municipalité
d’Alexandrie possède des alternatives et que si Veolia ne
rectifie pas le pas, le gouvernorat peut tout simplement
s’en passer ». Mais pour Veolia, c’est avant tout le
problème des arriérés de paiement qui doit être réglé, sans
quoi il ne sera pas possible de faire des progrès.
Samar
Zarée