Al-Ahram Hebdo,Société |
  Président Morsi Attalla
 
Rédacteur en chef Mohamed Salmawy
Nos Archives

 Semaine du 3 au 9 septembre 2008, numéro 730

 

Contactez-nous Version imprimable

  Une

  Evénement

  Enquête

  Dossier

  Nulle part ailleurs

  Invité

  Egypte

  Economie

  Monde Arabe

  Afrique

  Monde

  Opinion

  Société

  Arts

  Idées

  Littérature

  Visages

  Environnement

  Voyages

  Sports

  Vie mondaine

  Echangez, écrivez



  AGENDA


Publicité
Abonnement
 
Société

Education . Le bac français appliqué dans quelques écoles privées égyptiennes de langue française, après avoir été annulé suite aux événements de 1956, est une expérience encore nouvelle. Les premiers bacheliers viennent juste d’obtenir leur diplôme. L’occasion de faire une première évaluation.

L’alternative du bac français

« Il s’agit non seulement de l’apprentissage, mais surtout d’une façon différente de réfléchir, de se comporter et de voir la vie. J’ai tout à fait changé de personnalité au cours de ces trois dernières années », ainsi s’exprime Nayera, une des 28 filles qui viennent d’achever leurs études du baccalauréat français dans un établissement égyptien. C’est bien la première fois qu’une promotion de bac français sort d’une école égyptienne privée enseignant le français, à savoir le Sacré-Cœur de Ghamra.

Ce genre d’éducation qui était toujours réservé au Lycée français de Maadi et plus tard aux écoles internationales et interdites aux Egyptiens que sous certaines conditions, vient dernièrement de s’intégrer dans les anciennes écoles enseignant le français et dites « écoles de langues ou religieuses ». Cette première promotion avait pour la première fois la chance de suivre le système égyptien jusqu’au cycle préparatoire et d’avoir le droit de choisir entre la poursuite de ce même cursus ou le baccalauréat français.  En fait, l’école du Sacré-Cœur qui vient d’appliquer le système du bac français ainsi que les autres écoles religieuses qui s’apprêtent à entamer l’expérience sont des établissements qui ont toujours coopéré avec la Mission laïque française. Le système d’éducation français était l’unique cursus appliqué dans ces écoles jusqu’à la guerre de 1956 suivie d’une nationalisation ou d’une mise sous séquestre des établissements .

Ensuite, ces écoles ont introduit à la société égyptienne des générations qui ont eu accès à un enseignement de langue française de haute qualité, tout en suivant le cursus égyptien. Aujourd’hui et après un demi-siècle, voici le baccalauréat du système français qui revient dans ces écoles pour occuper sa place d’antan.

La seule différence cette fois-ci, c’est sa présence côte à côte avec le bac national. Jean-Pierre Vidal, attaché de coopération éducative et linguistique à l’ambassade de France, souligne qu’il y a de plus en plus d’élèves qui désirent avoir un baccalauréat français et ne peuvent pas y accéder. Car, d’une part, le Lycée français ne peut plus absorber un nombre supplémentaire d’élèves et a atteint son comble. Et d’autre part, les écoles internationales qui appliquent les bacs étrangers sont très coûteuses pour la majorité de la population.

Selon le nouveau système proposé, les élèves auront la possibilité d’obtenir l’équivalent du bac égyptien (sanawiya amma) parallèlement au bac français. Pour avoir cette équivalence, les élèves devront passer à plusieurs reprises au cours des trois ans du cycle secondaire des épreuves obligatoires dans certaines matières n’existant pas dans le système français, comme l’arabe et la religion.

Cet amalgame de formation permettra donc à ces élèves d’intégrer l’ensemble des universités publiques, privées et internationales en Egypte ou ailleurs dans le monde.

Voilà donc la singularité de cette nouvelle expérience adoptée par l’école du Sacré-Cœur : une coexistence de deux systèmes. Vidal explique que ce bac, comme tout le système éducatif français, est basé sur des points fondateurs. D’abord, sur la pratique d’une série d’activités permettant à l’élève d’être actif et de jouer un rôle positif, de créer son propre univers, d’apprendre à appliquer toutes les connaissances qu’il a acquises à chaque occasion et surtout pendant les situations problématiques. Ainsi, l’élève devient-il autonome dans son apprentissage, ajoute-t-il.

La crainte de l’inconnu

Une méthode d’enseignement tout à fait différente du système égyptien basé sur le parcœurisme. Une raison pour laquelle beaucoup de parents ont préféré inscrire leurs enfants dans ces écoles qui viennent d’intégrer le bac français. « J’ai beaucoup hésité avant d’inscrire mes enfants à un système d’enseignement étranger. Mais quand ma fille aînée a vécu le cauchemar du bac égyptien, j’ai catégoriquement changé d’avis et j’ai décidé d’épargner aux trois autres filles et à moi-même cette souffrance », dit Leïla Héneine, qui affirme qu’en comparant les deux systèmes, elle n’a jamais regretté cette décision.

La panique des parents et des élèves ainsi que la série de souffrances qu’ils vivent pendant les deux ans continus du bac égyptien ont obligé les gens à refaire leurs calculs.

En plus, le fardeau des cours particuliers indissociables de la sanawiya amma encourage plusieurs à renoncer au système égyptien. Leïla affirme que le bac français peut paraître coûteux, puisque ses frais s’élèvent à 22 000 L.E. par an. Mais, cette même somme est dépensée dans les leçons particulières.

« En suivant le système français, j’ai réalisé pour la première fois le rapport entre ce qu’on apprend dans les livres et la vie quotidienne. On apprend à réfléchir, à former un avis, à prendre des positions et non pas à faire partie d’un troupeau qui apprend par cœur des textes pour les reproduire sur des feuilles d’examen et les oublier le lendemain sans savoir quel bénéfice ils apportent », c’est ainsi que réfléchit Nayera et toutes les autres élèves qui ont passé par cette expérience.

Ce bac convient aussi aux familles dont le travail exige le déplacement d’un pays à l’autre. Leurs enfants doivent suivre un système international. Rami, ingénieur, travaille dans des entreprises multinationales, ce qui l’empêche de s’installer en Egypte pendant de longues durées. Ses enfants ne l’ont jamais accompagné, puisque le système éducatif égyptien est très différent de celui appliqué dans les autres pays. Il n’était pas non plus convaincu du fait d’inscrire ses enfants dans des écoles internationales qu’il jugeait « occidentales, important des idées et des cultures qui ne nous conviennent pas ». Avec l’intégration du bac français dans les écoles égyptiennes, il a trouvé une solution à son problème.

Le système d’évaluation appliqué dans le bac français est aussi très singulier.

Une chose semble inquiéter les gens peu habitués à ce système. « Ce que je crains c’est que l’on nous exige d’inscrire nos enfants uniquement dans les universités étrangères et non pas égyptiennes, car ces dernières ne consacrent que 5 % de leurs sièges aux élèves ayant des diplômes étrangers », explique Hicham, directeur d’une entreprise privée.

Pour lui, il vaut mieux investir son argent dans l’enseignement universitaire que secondaire.

« Cet enseignement est le facteur essentiel qui décide des opportunités de travail qui vont s’ouvrir à nos enfants et de la carrière qu’ils pourront se faire », explique Hicham.

Une opinion partagée par la pédagogue Samar Ibrahim. Pour elle, ce bac français et tous les autres diplômes étrangers sont nécessaires seulement pour les gens qui veulent continuer leurs études universitaires à l’étranger. Aujourd’hui, les gens ont recours à ce genre d’enseignement juste pour fuir le système égyptien inutile. Il existe aussi des craintes par rapport à la culture, car beaucoup de parents s’opposent à l’idée que leurs enfants soient complètement déracinés et isolés de leur propre culture. Car ils n’étudient ni l’histoire, ni la géographie de l’Egypte.

Certains préfèrent attendre et observer de loin avant de juger. Amal Malawi, responsable de l’éducation de la langue française à l’école du Bon Pasteur, se demande si les élèves ayant obtenu le bac français ne seront pas obligés de suivre leurs études dans l’Université française d’Egypte pour profiter de la langue française qu’ils possèdent. Dans ce cas-là, ils n’auront pas beaucoup de choix, car cette université ne comprend qu’un nombre très limité de filières.

Les écoles hésitent aussi à appliquer ce système. Et ce, par manque d’équipement car pour intégrer le bac français dans un établissement, il faut des locaux bien équipés, des laboratoires et des centres de documentations assez avancés.

D’autres établissements n’ont pas les moyens d’employer des professeurs étrangers.

D’autres craignent l’existence des deux systèmes au sein d’une même école. Ce qui a été le cas dans les établissements ayant appliqué cette expérience. Cela crée des situations assez délicates entre les élèves. Car, ceux inscrits dans le système international ont souvent droit à des locaux très chic, climatisés et hautement équipés et ce, sans oublier les cantines vendant des articles très séduisants. Alors que les élèves du système national ne peuvent pas en bénéficier. Ce qui leur donne l’impression d’être des « élèves de second degré ».

Il est donc trop tôt de dresser un tableau complet de cette expérience, mais il est sûr qu’elle attirera de plus en plus d’adeptes désireux de fuir les tracas insoutenables du bac égyptien l

Hanaa Al-Mekkawi

Retour au sommaire

 

Jean-Pierre Vidal, attaché de coopération éducative et linguistique à l’ambassade de France.

Al-Ahram Hebdo : Quel est le but de l’instauration à l’heure actuelle du bac français dans des écoles égyptiennes ?

Jean-Pierre Vidal : Notre objectif n’est pas de remplacer le bac égyptien par le bac français, mais plutôt d’offrir aux élèves cette unique opportunité de choisir un autre système d’études et d’obtenir à la fin un diplôme étranger.

— Que pourrait apporter ce système aux élèves ?

— Nous apprenons aux élèves à se débrouiller tous seuls face à toutes sortes de situations ou problèmes, à faire de la recherche, à rassembler les informations nécessaires pour arriver à une solution. A la fin du processus, l’élève apprend à juger et à évaluer ce qu’il a appris.

— Quelles perspectives par la suite ?

— Si l’élève obtient 10/20, il a le droit de rejoindre n’importe quelle université française, britannique ou canadienne en Egypte ou dans le monde.

 




Equipe du journal électronique:
Equipe éditoriale: Névine Kamel- Howaïda Salah -Thérèse Joseph
Assistant technique: Karim Farouk
Webmaster: Samah Ziad

Droits de reproduction et de diffusion réservés. © AL-AHRAM Hebdo
Usage strictement personnel.
L'utilisateur du site reconnaît avoir pris connaissance de la Licence

de droits d'usage, en accepter et en respecter les dispositions.