Angola .
Le parti au pouvoir, le MPLA, est archi-favori des
législatives des 5 et 6 septembre, les premières que connaît
le pays depuis la fin de la guerre civile en 2002.
Le test
Le
parti au pouvoir en Angola, le Mouvement Populaire pour la
Libération de l’Angola (MPLA), est plus que jamais le grand
favori des législatives des 5 et 6 septembre, les premières
depuis la fin de 27 ans de guerre civile en 2002. Le parti
domine la campagne électorale de bout en bout et est
omniprésent dans les médias, alors que les partis
d’opposition sont de plus en plus marginalisés.
Ainsi, les médias détenus par le gouvernement annoncent-ils
à longueur de journée les promesses électorales du
gouvernement à l’approche du scrutin. « Le gouvernement va
construire 2 000 nouveaux logements par an », lit-on
dernièrement en première page du Jornal de Angola
appartenant à l’Etat, avec une photo du président José
Eduardo dos Santos, au pouvoir depuis 1979. Le MPLA a aussi
les faveurs de la presse privée. Le journal Semanario
Angolense a par exemple publié un éditorial avec le titre :
« 10 raisons pour voter le parti au pouvoir, le MPLA ». La
radio d’Etat, TPA, consacre cinq minutes de temps d’antenne
par jour pour chacun des 14 partis en lice. Mais elle
diffuse également une heure par jour sur « les réalisations
» du gouvernement.
Cette domination des médias par le MPLA a attiré les foudres
de l’opposition et de certains observateurs. « C’est
choquant », s’est insurgé Isaias Samakuva, le leader du
principal parti d’opposition, l’Union pour l’indépendance
totale de l’Angola (Unita). « Mais le peuple angolais est
assez intelligent pour lire entre les lignes. Il sait que la
vie n’est pas aussi rose que ce que le gouvernement dépeint
à la télévision ». « Le MPLA utilise tous les moyens dont
dispose le gouvernement, y compris des avions militaires,
des hélicoptères, des bateaux et des camions pour servir sa
propagande », s’est écrié de son côté Analia de Victoria
Pereira, président du Parti libéral-démocrate. « C’est une
violation flagrante de la législation nationale qui interdit
au gouvernement de faire sa propagande à travers les médias
d’Etat », a pour sa part dit Fernando Macedo, un professeur
de droit à l’Université de Lusiada à Luanda, la capitale. «
A la fin, le MPLA aura beaucoup plus de temps d’antenne que
tous les autres partis réunis, ce qui influence évidemment
le résultat final de l’élection », a-t-il ajouté.
Le MPLA espère que les législatives renforceront sa
légitimité démocratique dans ce pays de près de 17 millions
d’habitants qui connaît aujourd’hui l’une des plus fortes
croissances du continent. Le MPLA pourrait ainsi accroître
la simple majorité qu’il détient dans l’Assemblée nationale
sortante (129 sur 220 sièges) pour atteindre les deux tiers
des sièges dont il a besoin pour être en mesure de changer
la Constitution. « Il me semble évident que le MPLA va
maintenir ou accroître sa majorité au Parlement », a estimé
Alex Vines, chef du programme Afrique au centre de
recherches Chatham House, à Londres.
Alors que le MPLA semble dominer dans les grandes villes,
notamment la capitale, l’Unita, issue du mouvement qui a
perdu la guerre civile en 2002, cherche, elle, à attirer les
électeurs dans les zones rurales. Les 12 autres petits
partis politiques en lice ont dû limiter leurs campagnes
électorales à des petits rassemblements autour de Luanda, en
offrant de la musique, de la bière et des promesses d’un
avenir meilleur.
Si elles sont menées à terme, ces élections constitueront le
premier processus électoral intégral depuis l’indépendance
de cette ancienne colonie portugaise en 1975. En 1992, les
Angolais s’étaient rendus aux urnes pour des élections
générales. M. Dos Santos et son parti, le MPLA, avaient
remporté le premier tour devant l’Unita. Le second tour n’a
jamais eu lieu, le leader de l’Unita, Jonas Savimbi, ayant
refusé de reconnaître le résultat du premier. La guerre
civile — qui a fait au total un demi-million de morts —
avait repris pour dix ans supplémentaires.
Le scrutin de septembre constitue également un test pour les
élections présidentielles de 2009. L’actuel président
devrait y briguer un nouveau mandat, qui coïncidera avec le
30e anniversaire de son accession au pouvoir.
Boom économique
Le MPLA, qui dirige le pays depuis l’indépendance, semble
surtout miser sur sa domination politique — il contrôle les
rouages de la vie politique — mais aussi sur les bons
résultats économiques pour conforter sa position et capter
le vote de la majorité des 8,3 millions d’électeurs.
Deuxième producteur de pétrole d’Afrique sub-saharienne
après le Nigeria, l’Angola, qui se reconstruit à un rythme
soutenu depuis la fin de la guerre civile en 2002, affiche
depuis 2004, grâce aux exportations pétrolières, un taux de
croissance annuel dépassant les 15 % et dispose de plus de
11 milliards de dollars de réserves nettes de change.
L’Angola, qui a rejoint l’Organisation des Pays Exportateurs
du Pétrole (OPEP) au début de 2007, attire les convoitises
de la Chine, avide de sources d’énergie pour soutenir la
croissance de son économie. Ainsi, Pékin offre-t-elle depuis
plusieurs années des crédits à taux d’intérêts préférentiels
à Luanda pour la reconstruction des infrastructures
dévastées par la guerre civile : routes, ponts,
télécommunications ...
Malgré ce boom économique, les Angolais, par de nombreux
indicateurs, restent aussi pauvres que jamais. Près de 70 %
de la population vivent en dessous du seuil de pauvreté,
avec moins de 2 dollars par jour et nombreux n’ont toujours
pas accès à l’eau potable ou l’électricité. L’opposition et
les organisations de la société civile n’ont de cesse
d’accuser le gouvernement de mal répartir la manne
pétrolière, qui remplit les poches d’une minorité et les
caisses de l’Etat. Ainsi, ce dernier a entrepris récemment
d’investir une partie de sa rente pétrolière en Europe, à
commencer par le Portugal, son ancienne puissance coloniale
.
Hicham Mourad