Edition.
La maison Merit fête ses dix ans. Affichant haut et fort son
indépendance et sa liberté, elle a su se faire une place
particulière avec des auteurs de tous bords.
Moment d’émotion à Merit
La bien-aimée de Ramsès II est le nom qu’a choisi Mohamad
Hachem, propriétaire et directeur de la maison d’édition qui
célèbre ses dix ans. C’est en collaboration avec des
intellectuels égyptiens et après de nombreuses réunions,
avec en tête l’intellectuel Ibrahim Mansour, que la maison
d’édition a connu le jour en 1998. Ibrahim Mansour, un des
premiers à proclamer la naissance d’une culture indépendante
en Egypte, avec Hachem ont incarné cette idée avec une autre
définition de l’édition afin d’aider les jeunes écrivains et
les écrivains hors establishment. « Notre vision depuis la
création de Merit est de présenter une culture non soutenue
et indépendante du gouvernement et des différentes
appartenances politiques, et le plus important une culture
qu’on ne peut ni arrêter ni interdire », explique Hachem.
La maison d’édition, pendant ses dix ans d’existence, a
édité un nombre important de livres pour de nombreux auteurs
égyptiens, tel Khaïri Chalabi, Alaa Al-Aswani, Hamdi Abou-Goulayel,
Ossama Al-Danasouri et d’autres, des livres littéraires,
politiques, sociaux et des traductions d’œuvres du monde
entier. Des idées et des auteurs polémiques, le tout
présenté sous une couverture dont le dessin est toujours
différent et suscite la réflexion du lecteur, ou même du
passant devant une étagère de librairie. « Ahmad Al-Labbad,
cet artiste à qui je dois la moitié de notre succès, a
métamorphosé les couvertures du livre arabe », lance Hachem.
Il est vrai que Merit a pu charrier un grand public
d’intellectuels, mais aussi de simples lecteurs, de tous les
âges, toutes les classes sociales et les appartenances
politiques. « Merit est une expérience qui dépasse la maison
d’édition âgée de dix ans, elle constitue en elle-même un
lien entre les différentes générations », explique le
chercheur égyptien Nabil Abdel-Fattah dans son discours lors
de la célébration qui a eu lieu au théâtre Al-Rawabet. Non
seulement Merit est une bouée de sauvetage aux auteurs
boudés, mais aussi une aide à tout jeune auteur non connu.
Ahmad Mourad, auteur de Vertigo, son premier et unique livre
pour l’instant, explique son expérience avec la maison
d’édition : « Vertigo est ma première expérience littéraire,
moi qui suis à l’origine photographe, j’avais besoin d’une
maison d’édition qui puisse me guider et avant tout qui ne
vise pas le gain, c’est ce que j’ai retrouvé chez Merit ».
En effet, la maison, depuis sa création et
jusqu’aujourd’hui, a présenté de nombreux nouveaux auteurs
qui ont connu un grand succès auprès des lecteurs et qui
sont à la deuxième voire la troisième édition de leurs
livres.
« Je voulais éditer mon livre chez Merit, mais j’avais déjà
signé un contrat avec une autre maison d’édition. Je ne le
regrette pas maintenant, mais je pense que si j’avais édité
mon livre chez Merit, mon livre aurait connu un destin
différent et même s’il avait été interdit, cela n’aurait
jamais arrêté Hachem, il l’aurait peut-être réédité », dit
Magdi Al-Chaféi, auteur et dessinateur de la BD Metro qui
fut récemment interdite.
Le concept de liberté est un pilier fondateur chez Merit et
pour son créateur, qui défie la censure en éditant toutes
sortes d’idées. Modeste mais décidé, Hachem fait du livre
une passion qu’il défend avec obstination. « Je ne défie pas
la censure juste pour être différent, mais parce qu’il faut
maintenir la liberté d’expression et de réflexion. C’est
ainsi que les sociétés évoluent », s’exclame Hachem.
Avec des larmes d’émotion lors de la célébration, Hachem
décrit Merit comme une tentative modeste qu’il espère
pouvoir maintenir. L’auteur Hassanein Kechk prend alors la
parole pour dire « Merit est née pour vivre ».
Alors,
bonne continuation.
Dina
Abdel-Hakim