Al-Ahram Hebdo, Evénement | Les Arabes et la realpolitik
  Président Morsi Attalla
 
Rédacteur en chef Mohamed Salmawy
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 Semaine du 9 au 15 juillet, numéro 722

 

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Evénement

UPM. La plupart des pays arabes, la Libye exceptée, ont répondu présent à l’invitation de Sarkozy dont le projet consacre une acceptation de fait d’Israël.

Les Arabes et la realpolitik

Le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, a complètement exclu que le sommet de l’Union pour la Méditerranée voulue par le président Nicolas Sarkozy puisse se faire sans Israël. Telle a été la réponse française intervenue face au grand débat qui a eu lieu dernièrement autour de cette question. Effectivement, la participation israélienne à l’UPM, qui doit être lancée les 13 et 14 juillet à Paris, en présence d’une quarantaine de chefs d’Etat et de gouvernement des pays de l’Union européenne et du sud du bassin de la Méditerranée et prévoyant la lancée officielle du projet de Sarkozy, a suscité d’énormes polémiques chez certains pays arabes, qui ont déclaré refuser une chorégraphie du sommet qui donnerait l’impression d’une normalisation de leurs relations avec Israël. Ils ont même reproché à Paris d’avoir œuvré au sein de l’Union européenne pour un partenariat renforcé avec Israël.

Pour les spécialistes, il existe toujours un problème concernant les relations entre les pays arabes et Israël, que ce soit dans le cadre des relations ou des accords politiques ou économiques. Emad Gad, rédacteur en chef de la revue Israeli Digest, affirme que ces rapports assez tendus sont dus au fait qu’aucun règlement politique n’a eu lieu concernant la crise palestinienne. « Pour qu’il y ait des chances de réussite pour cette union, il faut absolument qu’il y ait une entente politique entre tous les pays qui en font partie, sinon il serait donc préférable pour un Etat qui a des problèmes de ce genre de ne pas adhérer à l’UPM, comme il a été parfois le cas à l’Union européenne », lance Gad, qui  donne l’exemple de la Serbie qui n’a pas adhéré à l’UE parce qu’elle n’a toujours pas résolu ses problèmes en ce qui concerne l’indépendance de certaines provinces comme le Kosovo ou la Macédoine.

Ce point de vue n’est pas partagé par tous les analystes. Pour le politologue Saïd Okacha, la position des pays arabes qui sont à l’origine de ce débat est inexplicable. Pour lui, d’une part, Israël n’est pas un pays à prendre à la légère. « C’est un Etat qui a son poids politique, militaire et stratégique assez important ». D’autre part, ce projet d’union méditerranéenne est dans l’intérêt des pays arabes. « Au contraire, il faut que les Arabes profitent de ce rapprochement pour tenter de résoudre le conflit palestino-israélien ». Il faut donc essayer de montrer aux Européens que nous sommes disposés à instaurer des relations et des conversations avec Israël pour parvenir à une stabilité dans la région. Et non pas le contraire. « La solution n’est pas d’essayer d’éloigner Israël, mais au contraire de l’accepter tout en exprimant notre avis contre la colonisation », ajoute Okacha. C’est apparemment ce principe qui a été suivi par la plupart des Etats arabes. D’où, le fait que Paris assure ne pas craindre de vague anti-UPM de la part de ses alliés arabes. Ni même la répétition du front anti-israélien qui a paralysé le processus de Barcelone.

Effectivement, les pays arabes se sont contentés de demander des clarifications « sur les conséquences de l’entrée d’Israël dans la future union » lors d’une réunion du Forum de la Méditerranée, qui s’est tenu à Alger le 6 juin, puis rien de plus. Bien au contraire, qu’il s’agisse de l’Egypte, du Maroc ou de la Tunisie ainsi que de la plupart des pays du Sud méditerranéen, ils ont favorablement accueilli la proposition française.

A l’opposé, le dirigeant libyen Moammar Kadhafi n’a pas hésité à dire publiquement tout le mal qu’il pensait du projet de Nicolas Sarkozy. « Nous ne prendrons en aucun cas le risque de déchirer l’unité arabe ou africaine », a lancé le dirigeant libyen, dénonçant l’UPM comme « un appât » ou « une forme d’humiliation ». Des déclarations qui n’ont eu aucune influence sur le président français qui a affirmé que « la Libye avait déjà refusé d’entrer dans le processus de Barcelone parce qu’il faisait la part trop belle à l’Europe et qu’il incluait Israël (...). Ce qui nous rassure, c’est qu’aucun autre pays n’est sur la même ligne ». La plupart des pays arabes ont donc confirmé leur présence au sommet du 13 juillet. Quant à la Libye, comme le pense Okacha, c’est l’un des pays arabes qui n’a aucun poids politique et qui a l’habitude de se rétracter le lendemain d’une déclaration.

 

Israël, une victoire silencieuse

Une réaction française qui a sûrement rassuré le côté israélien qui, en revanche, a décidé de garder le silence profond. En effet, un atout que ne possèdent pas les Etats arabes, Israël a un statut bien avancé avec l’Union européenne. En effet, l’Union européenne et les responsables israéliens se sont retrouvés à Luxembourg le 16 juin pour donner le coup d’envoi de l’intensification de leurs relations économiques et politiques. l’année dernière, l’Etat hébreu avait réclamé un rapprochement sur plusieurs dossiers, notamment santé et environnement, ainsi que des consultations politiques plus régulières. Un statut prouvé par chiffres. Israël est l’un des trois partenaires méditerranéens les plus importants de l’UE (la Turquie, Israël et l’Algérie représentent ensemble 60 % du commerce total de l’UE). De plus, l’Union européenne est le premier partenaire commercial d’Israël. En 2000, les importations des pays membres de l’Union à partir d’Israël étaient de 9,876 millions d’euros. En 1990, elles n’étaient que de 3,626 millions. Elles ont donc triplé en 10 ans. Elles représentent un quart du total des exportations israéliennes. La même année, les exportations des 15 vers Israël s’élevaient à 15,693 millions d’euros, soit 43 % des importations israéliennes.

D’un autre côté, la France soutient à fond sa cause et ne penserait à aucun prix s’opposer à l’Etat hébreu. En effet, les intentions françaises ont d’ailleurs été déclarées dès le départ. Le président Sarkozy a reconnu publiquement que la présence de tous les dirigeants arabes n’était pas acquise, en ajoutant que « s’il devait en manquer un ou deux, eh bien, nous verrons bien  (...) mais ça n’empêchera pas le train d’avancer », a-t-il lancé lors d’une conférence de presse à Rome.

Normalisation ou pas, la réponse est claire. Les débats ne cessent pas autour d’Israël. Mais la vérité est que les Etats arabes ne se sont pas opposés au sommet. Même l’Algérie, qui avait au départ pris position contre le projet, a déclaré que l’UPM ne peut pousser les pays arabes à entretenir des relations directes avec Israël. « Il y a toujours la possibilité de travailler avec nos partenaires tout en respectant les positions des uns et des autres », a déclaré Mourad Medelci, ministre algérien des Affaires étrangères.

Chaimaa Abdel-Hamid

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Michael Rayan,
conseiller et chef de la section des affaires politiques, de la presse et de l’information auprès de la délégation de la Commission européenne en Egypte, souligne que l’UPM reste dans le contexte du processus de Barcelone.

« Profiter de l’initiative de Sarkozy de manière à ce qu’elle soit marquée de l’empreinte de l’UE »

Al-Ahram Hebdo : Le projet de l’Union Pour la Méditerranée constitue-t-il une nouvelle formule venant combler un échec relatif au processus de Barcelone vivement critiqué ?

Michael Rayan : En fait, non. Le projet de l’Union Pour la Méditerranée a pour point de départ le processus de Barcelone. Il repose ainsi sur plusieurs piliers : tout d’abord, des projets de développement bilatéraux entre l’Union européenne et les pays du Sud. Ensuite, des projets de développement régionaux. Un collectif qui marche, regroupant les pays arabes et Israël, en dépit de toutes les critiques qu’il suscite parfois. Les principes de l’UPM découlent donc de ce processus. Ils sont basés sur une gestion conjointe, un vrai partenariat Europe-pays arabes-Israël. Cela dit, il ne s’agira pas d’un modèle européen à imposer. Celui-ci sera décidé par des discussions des deux côtés. Un progrès important que réalise l’UPM : cette éventuelle co-présidence Nicolas Sarkozy-Hosni Moubarak, leader des pays arabes. Il reste que l’objectif de l’UE n’est pas le seul dialogue politique, mais de développer des projets régionaux en matière d’énergie, d’environnement d’interconnexion électrique. L’aspect environnemental est un exemple de coopération. Il s’agit de nettoyer la Méditerranée, un objectif qui touche les deux partenaires..

— Quelles sont d’après vous les principales difficultés dans ce contexte ?

— Une difficulté dans le partenariat : comment travailler ensemble. La réalité des indices du succès de Barcelone est que les Arabes et Israël peuvent discuter ensemble sur la même table. Ce qui a lieu effectivement. Ils travaillent normalement et commencent à discuter . L’UE propose une initiative pour que tous les pays travaillent des projets pratiques. L’inclusion d’Israël est une opportunité pour résoudre le conflit arabo-israélien à travers des projets concrets.

— Pourquoi l’UE s’est-elle alors opposée au projet initial du président Sarkozy concernant la création de l’UPM ?

— Je ne suis pas d’accord sur le fait que l’UE s’oppose à l’UPM. Notre objectif était que le travail se déroule de manière conjointe. Ce qui s’est passé, c’est que le président Sarkozy a proposé le projet aux pays amis. L’Allemagne, elle, était intéressée au départ par un projet regroupant les pays arabes; Israël et toute l’Union européenne. A présent, il a tout le soutien des Etats membres. Nous sommes confiants que le projet a une bonne chance de réussir. Mais la question était la suivante : pourquoi la France qui est intégrée dans l’UE lancerait-elle un mini-projet ? En politique commerciale, défense, sécurité, relations extérieures, il est impossible de créer une politique qui se détache de l’UE. Le point de vue européen était logique, ce n’était pas une opposition à l’UPM. Ce qui compte, c’est comment profiter de l’initiative de Sarkozy de manière à ce qu’elle soit marquée de l’empreinte de l’UE.

— Il y a une impression dans les pays du Sud que l’Europe privilégie dans ses priorités la question de l’immigration.

— Pour la France qui préside l’UE, la question de l’immigration et du droit d’asile revêt une priorité. Comment trouver une concordance Nord-Sud à cet égard ? C’est une question très importante qui doit progresser régulièrement. On espère donc qu’il y aura progrès dans la gestion des dossiers Nord-Sud avec la présidence française avec les projets énergétiques climatiques, environnementaux, la question des routes maritimes, des ports. C’est une coopération qui a des buts ambitieux.

— Y a-t-il eu des approches communes entre l’Egypte et les Européens sur les démarches à venir ?

— Une réunion regroupant des députés euro-méditerranéens, européens et arabes vient d’avoir lieu. Cela s’est déroulé en de bons termes. Il a été question du Processus de Barcelone et des critiques ont été faites du côté arabe évoquant certaines faiblesses, mais il n’est pas question d’échec. D’ailleurs, un parlementaire égyptien, Mohamad Aboul-Einein, membre du PND, est le chef de la commission des affaires économiques, financières, sociales de l’UPM. Il est en faveur de cette union. En plus, le Conseil euro-égyptien a tenu une réunion où l’ambassadeur de France, Philippe Coste, a pris la parole.

Propos recueillis par
 Ahmed Loutfi

 

 




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